Question de M. SOUVET Louis (Doubs - RPR) publiée le 20/08/1998
M. Louis Souvet attire l'attention de Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur la modification du régime des eaux, plus exactement sur l'institution d'un nouvelle redevance. Théoriquement destinée à l'intervention des agences de bassin dans la lutte contre les inondations, cette charge supplémentaire entraînera, pour les industries de carrières et matériaux de construction, une augmentation de 25 à 50 % du prix des matériaux et donc une baisse significative de leur compétitivité. Pour le seul secteur géographique Bourgogne - Franche-Comté ce sont 1 000 emplois directs qui sont menacés. Il convient de rappeler que toutes les exploitations, avant d'être autorisées, doivent produire un certain nombre d'études d'impact sur l'eau et l'environnement. D'ailleurs, il est admis que leur contribution à la dénitrification des nappes ainsi qu'à l'absorption partielle des crues n'est pas négligeable. Il lui demande donc si le Gouvernement entend réexaminer de manière approfondie ce dossier tant en ce qui concerne l'origine des pollutions que les conséquences socio-économiques.
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Réponse du ministère : Aménagement du territoire publiée le 24/09/1998
Réponse. - Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a pris connaissance, avec intérêt, de la question concernant les conséquences de la mise en place de la redevance pour modification du régime des eaux (MRE). Le principe d'une redevance de ce type résulte de l'application de la loi sur l'eau de 1964 (art. 14) et du décret d'application du 14 septembre 1966 (art. 18). En vertu des dispositions de ces textes les agences de l'eau sont autorisées à percevoir des redevances sur les personnes publiques ou privées : soit qu'elles contribuent à la détérioration de la qualité de l'eau ; soit qu'elles effectuent des prélèvements dans la ressource en eau ; soit qu'elles modifient le régime des eaux dans tout ou une partie du bassin. L'objet d'un projet de décret est donc d'instaurer cette troisième redevance, seule l'assiette des deux premières ayant été définie par le décret de 1966. Ce projet résulte de la décision prise lors de la communication en conseil des ministres du 20 mai 1998 d'appliquer le principe " pollueur-payeur " aux activités susceptibles de perturber le régime des eaux. Ces activités sont celles qui peuvent aggraver les inondations, mais aussi déstabiliser les berges et le fond des cours d'eau, abaisser le niveau des nappes phréatiques ou en accroître la vulnérabilité aux pollutions et contribuer à la dégradation irréversible des écosystèmes aquatiques. A ce titre les extractions de matériaux en lit majeur, qui fragilisent et peuvent déstabiliser la structure de la rivière (tant au niveau du lit majeur que du lit mineur), sont apparues comme un fait générateur incontestable d'une modification du régime des eaux et dans un certain nombre de cas de risques d'inondation. Cette activité, même conduite avec précaution et suivie d'une remise en état des lieux, crée des excavations plus ou moins importantes dans la vallée, au voisinage des cours d'eau. En cas de crue importante, ces excavations peuvent créer un risque de modification de l'écoulement général de la crue et de déplacement brutal du chenal principal, la succession de plans d'eau auprès de la rivière pouvant constituer, de fait, un prédécoupage pour un nouveau lit. Quand elles existent, les digues de protection de ces plans d'eau peuvent également constituer un obstacle à l'écoulement et contribuer à une réduction du champ d'expansion des crues. En outre, si la crue les franchit, des travaux très importants doivent alors être engagés pour ramener la rivière dans son lit initial en cas d'inondation. D'autres effets peuvent également être craints tels que : la destruction de la végétation alluviale ; la sape des berges en lit mineur ; l'abaissement des nappes aux pollutions accidentelles, notamment en période d'inondation ; la suppression de la couche de filtrage des eaux de ruissellement. Des actions correctives correspondantes peuvent s'imposer pour restaurer les lits et les berges, reconstituer la ligne d'eau ou pour améliorer la protection des nappes contre les pollutions. Comme l'a indiqué le Conseil d'Etat en 1994, ces actions, comme plus généralement celles qui concernent la prévention des inondations, ne peuvent être financées par les agences de l'eau que grâce à la création d'une redevance spécifique, assise sur les activités évoquées mais également sur toutes celles qui génèrent, d'une façon significative, une imperméabilisation des sols, des modifications hydrauliques, ou une réduction du champ d'expansion des crues. Une telle solution, conforme aux principes du système de gestion de l'eau en France, paraît plus équitable que l'utilisation du produit des redevances recouvrées au titre de la pollution ou du prélèvement sur la ressource auprès des consommateurs d'eau ou des activités industrielles. Enfin, la mise en uvre de cette nouvelle sera précédée d'une large concertation avec les représentants des élus et des organisations professionnelles, avec les administrations concernées et au sein des comités de bassin. Elle devra se faire avec progressivité pour atteindre en début de VIIIe programme des agences de l'eau, le niveau d'environ 3 % du montant actuel des redevances perçues par les agences de l'eau. Les modalités d'intégration de cette mesure dans la taxe générale sur les activités polluantes (RGAP), dont la création a été annoncée par le Gouvernement le 22 juillet, seront également examinées. Sur le rendement total de cette mesure, estimé à environ 290 millions de francs en valeur actuelle, un peu moins de 12 % concerneraient l'activité d'extration de granulats et, pour l'essentiel, les trois bassins de Loire-Bretagne, Rhin-Meuse et Rhône-Méditerranée-Corse. En conséquence, il convient de souligner la très faible incidence financière prévisible de cette mesure sur les entreprises d'extraction de granulats, de même que l'absence de distorsion de concurrence qu'elle provoquera dans une profession dont le marché intérieur est captif.
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