Question de M. BORDAS James (Indre-et-Loire - RI) publiée le 12/06/1998
Question posée en séance publique le 11/06/1998
M. le président. La parole est à M. Bordas.
M. James Bordas. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, et moi non plus je ne vais pas être raisonnable (Ah
! sur certaines travées du RPR) car je vais revenir sur le dossier Air France, dont je voudrais élargir les perspectives.
Nous savons combien nous coûtent les tergiversations du Gouvernement : 1 milliard de francs de chiffre d'affaires, au
minimum.
« Ni vainqueur, ni vaincu » a déclaré M. Gayssot, peut-être !
M. Dominique Braye. Sauf les contribuables !
M. James Bordas. Ce qui est sûr, c'est que ce sont les contribuables qui finiront par payer l'addition, soit directement,
soit de manière déguisée au moment de l'ouverture du capital d'Air France.
Les Français, pour une très large majorité d'entre eux, n'ignorent pas que cette affaire risque de leur coûter beaucoup
plus cher encore et non pas seulement en termes financiers mais aussi en termes d'emplois.
Regardons en effet autour de nous.
A l'étranger, les fusions d'entreprises se multiplient dans le secteur automobile, le secteur bancaire et celui des
télécommunications. Aujourd'hui, si une entreprise nationale veut survivre dans le système concurrentiel mondial, elle
doit impérativement s'allier avec ses partenaires internationaux. Sinon, elle finira par disparaître ou devra être soutenue
à bout de bras grâce à l'argent public.
M. Dominique Braye. Comme toujours !
M. James Bordas. M. le Premier ministre admet que des alliances sont nécessaires et qu'elles ne sont possibles que
sur des bases claires et saines.
Ne pensez-vous pas que le Gouvernement vient d'envoyer le plus mauvais des signaux aux investisseurs étrangers,
celui d'un Etat actionnaire, qui privatise sans privatiser, et dont le comportement varie au gré du temps et des intérêts
politiques ?
Ne pensez-vous pas que, malgré la « suspension » du conflit actuel, vous venez, par vos hésitations, d'hypothéquer
l'avenir, non seulement d'Air France, mais de toutes les entreprises publiques qui doivent se tourner vers le marché pour
assurer leur avenir et garantir leurs emplois ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées des Républicains et
Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
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Réponse du ministère : Équipement publiée le 12/06/1998
Réponse apportée en séance publique le 11/06/1998
M. le président. La parole est à M. le ministre. (Brouhaha sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. René-Pierre Signé. Les Français ont voté !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur,
franchement, je crois que l'intérêt de tous - intérêt, j'en suis sûr, partagé par-delà les clivages politiques, et par-delà les
différences d'appréciation - c'est qu'Air France puisse gagner,...
M. Gérard Braun. La compagnie n'en prend pas le chemin !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... c'est qu'Air France puisse se
développer, non pas en bradant au fur et à mesure une partie de ses activités, en supprimant des emplois, comme ce
fut malheureusement le cas pendant trop d'années, mais en passant des alliances. Peut-être la chose vous a-t-elle
échappé, mais nous venons de passer avec les Etats-Unis un accord bilatéral qui n'avait pas pu être conclu depuis
plusieurs années. Nous avons réussi.
Revenant d'un séjour dans ce pays, je peux vous confirmer l'intérêt qu'il revêt pour les deux pays.
Air France, grâce à une véritable consolidation, peut passer des accords appelés « partage de codes » - avec deux
grandes compagnies américaines : Delta Airlines et Continental Airlines.
Tout cela est le résultat de la politique du Gouvernement pour donner des atouts supplémentaires à Air France. La
décision de construire de nouvelles pistes à Roissy en est un exemple. Nombre d'entre vous m'ont d'ailleurs félicité
d'avoir pris cette décision, mais discrètement, bien sûr, car il aurait été plus difficile pour vous de le faire publiquement !
M. Dominique Braye. On reconnaît que c'était bien !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Mais ce n'est pas fini ! Nous avons
également rouvert l'école de formation de pilotes.
Tout un environnement est donc en train de se mettre en place et il permettra d'investir, d'acheter des avions, de créer
des emplois, d'accroître le nombre de pilotes, d'augmenter le trafic aérien vers les Etats-Unis de près de 15 %...
M. Dominique Braye. Avec l'argent du contribuable, toujours !
M. Guy Fischer. Vous l'avez dépensé autrement, vous !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Justement, l'argent du
contribuable, vous l'avez utilisé en 1993 pour recapitaliser la compagnie à hauteur de 20 milliards de francs, ce que je
ne vous reproche pas.
M. Paul Masson. Ah !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Et vous voudriez maintenant brader
la compagnie au secteur privé après y avoir injecté autant d'argent. Nous, nous ne braderons pas Air France !
M. Jean Chérioux. Vous êtes en train de le gaspiller !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Air France se développera et
ouvrira pour cela une partie de son capital.
M. Dominique Braye. Avec l'argent du contribuable !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Aujourd'hui, les pilotes et la
direction se sont mis d'accord, monsieur le sénateur, sur une démarche de développement d'Air France dans un esprit
de compétitivité face à la concurrence internationale. Le principe de l'accord sur l'échange volontaire salaire-actions a
été acquis. Le maintien des salaires pendant sept ans a été admis.
Par ailleurs, un des engagements qu'avait pris l'ancien président a également été tenu,...
M. Dominique Braye. Vous l'avez viré !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... à savoir la suppression de la
double échelle des salaires.
C'est un accord pour lequel, je le crois honnêtement, il n'y a ni vainqueur, ni vaincu comme dans tout compromis.
M. Dominique Braye. Sauf les Français !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. C'est une bonne chose pour les
rapports sociaux dans l'entreprise. Il ne peut exister de développement dans une entreprise digne de ce nom sans que
les salariés soient partie prenante des décisions qui sont prises. (Applaudissements sur les travées du groupe
communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
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