Question de M. FISCHER Guy (Rhône - CRC) publiée le 21/05/1998

M. Guy Fischer appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur l'inquiétude des salariés des centrales thermiques d'Electricité de France (EDF) face à la concurrence qu'engendre le développement des procédés de production d'électricité par cogénération. L'exemple de la centrale de Loire-sur-Rhône (69) est édifiant, où la dernière tranche fonctionnant au charbon (sur 4 à l'origine) se trouve directement concurrencée par les productions d'électricité par cogénération (sociétés de chauffage urbain, entreprises chimiques...) et où 100 emplois sont menacés. Lors des travaux de la commission d'enquête sénatoriale sur la politique énergétique de la France, plusieurs personnalités entendues, dont M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie lui-même, ont évoqué la cogénération en terme de diversification de la production, d'économie, ou de moindre pollution, sans apparemment relever les effets pervers en terme de concurrence. De fait, sous prétexte que la cogénération économiserait les combustibles et réduirait la pollution, on offre des faveurs exorbitantes aux cogénérateurs. Cette situation constitue une aberration économique, si l'on considère, par exemple, qu'EDF est mise à contribution pour financer ces installations et est contrainte de leur acheter leur surplus d'électricité à des coûts supérieurs au coût moyen de sa propre production du kilowatt heure. A la veille de la transposition en droit national de la directive sur l'ouverture à la concurrence du marché de l'électricité, ne conviendrait-il pas, avant toute chose, de moraliser des dispositions qui privilégient les sociétés privées, au détriment de l'entreprise publique, des emplois et des usagers ? Ne faudrait-il pas également déterminer la place de la thermique classique, en prenant en compte l'utilisation rationnelle des sources d'énergie de la planète et la rentabilité des installations existantes ? Il lui demande de bien vouloir lui faire connaître le point de vue du Gouvernement sur cette question.

- page 1593


Réponse du ministère : Économie publiée le 30/07/1998

Réponse. - La question posée évoque les inquiétudes des salariés des centrales thermiques d'EDF face au développement des installations de cogénération. La cogénération, c'est-à-dire la production simultanée d'électricité et de chaleur valorisée, représente un enjeu de premier plan. Sur le plan énergétique, il s'agit d'une filière compétitive, qui permet d'atteindre de très bons rendements et de réaliser des économies d'énergie primaire par rapport à une production séparée de chaleur et d'électricité. Sur le plan industriel, la cogénération constitue un facteur de compétitivité pour les entreprises présentant des besoins de vapeur importants, dans la mesure où elle permet de réduire leur facture énergétique. Elle constitue également une solution attractive pour la satisfaction des besoins de chauffage dans le secteur tertiaire, et pour les exploitants de réseaux de chaleur. Enfin, sur le plan de l'environnement, la cogénération se traduit, grâce à son rendement élevé, par des émissions polluantes réduites par rapport à celles résultant d'autres modes d'utilisation des énergies fossiles. Cette filière est ainsi largement utilisée dans d'autres pays européens. De nouvelles conditions d'achat par EDF de l'électricité produite par cogénération ont été définies en 1997 à l'issue d'une concertation associant les pouvoirs publics, EDF et les représentants des cogénérateurs, et ont été approuvées par mon département ministériel. Elles sont fondées sur les économies de coûts d'investissement et d'exploitation procurées par la cogénération au système électrique et comportent transitoirement une incitation additionnelle à la recherche d'une meilleure efficacité énergétique. Par ailleurs, EDF peut être amené à prendre des décisions de mise en arrêt garanti ou de déclassement de certaines tranches des centrales thermiques classiques, afin d'optimiser le coût de fonctionnement du système électrique national au bénéfice du service public et de respecter les contraintes environnementales. Ces évolutions doivent évidemment se faire dans le respect des dispositions du statut du personnel des industries électriques et gazières, après toutes les concertations utiles avec le personnel. Il va également de soi que les décisions de mise en arrêt garanti ou de déclassement doivent être précédées d'une information des élus locaux et doivent faire l'objet, en tant que de besoin, de mesures d'accompagnement. Le secrétaire d'Etat à l'industrie a demandé au président d'EDF d'y apporter une grande attention. L'expérience du récent déclassement de la centrale de Pont-sur-Sambre paraît avoir valeur d'exemple en la matière, avec une pleine association des élus locaux. Enfin, la future loi d'organisation du service public de l'électricité ne définira pas le contenu de la politique énergétique nationale, par exemple en ce qui concerne le choix entre les diverses énergies primaires. Mais à la lecture du document de concertation intitulé " Vers la future organisation électrique française ; des informations et des questions pour réussir la nouvelle organisation du service public de l'électricité ", il aura été noté le souci que la prochaine loi laisse à la société et aux pouvoirs publics une entière possibilité de choix en matière énergétique, et fournisse les mécanismes permettant de continuer à concrétiser la politique énergétique nationale.

- page 2460

Page mise à jour le