Question de M. DUGOIN Xavier (Essonne - RPR) publiée le 16/04/1998
M. Xavier Dugoin appelle l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le problème de la dépénalisation de l'usage du cannabis. En effet, une dépénalisation de l'usage de certains stupéfiants (dépénalisation qui semble être souhaitée par certains membres du Gouvernement) ne va pas sans poser problème. Depuis plusieurs années, les pouvoirs publics, par l'intermédiaire de campagnes de publicité et par l'augmentation des taxes, ont fait de la lutte contre le tabac et l'alcool une priorité. Alors que ces actions visant à la résorption de ces deux grands fléaux commencent à porter leurs fruits, est-il nécessaire et logique d'en légaliser un troisième plutôt que de tout faire pour l'éradiquer. Le cannabis tue. A l'instar du tabac, il favorise les maladies cardio-vasculaires et certains cancers, tout comme l'alcool, il est à l'origine de nombreux accidents de la route. Aussi souhaite-t-il que le Gouvernement affirme qu'il compte faire de la lutte contre tous les stupéfiants une de ses priorités et qu'il précise sa position quant à une éventuelle dépénalisation des drogues dites " douces ".
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Réponse du ministère : Justice publiée le 29/10/1998
Réponse. - Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire que la dépénalisation de l'usage de certains stupéfiants ne fait pas partie des projets que le Gouvernement envisage de soutenir dans le cadre de sa réflexion sur le traitement des conduites toxicomaniaques. Les statistiques relatives à la répression du délit d'usage de stupéfians démontrent à cet égard que l'activité judiciaire en ce domaine n'a pas fléchi : sur plus de 1 300 jugements de condamnation prononcés du seul chef d'usage, 22 % comportaient une peine d'emprisonnement ferme d'une durée moyenne de 3,6 mois. Il convient de souligner qu'à ce jour, la réponse judiciaire n'est pas uniquement répressive. En effet, dans le cadre de la loi du 31 décembre 1970, qui organise une articulation entre autorités sanitaires et sociales et judiciaires, 8 812 procédures d'injonctions thérapeutiques ont été initiées par les parquets en 1996, alors qu'elles n'étaient que de 4 935 en 1992. A l'issue d'une évaluation de cette mesure réalisée dans le courant de l'année 1997, qui a conclu à la nécessité de renforcer la diversification des réponses judiciaires à la toxicomanie, le garde des sceaux souhaite développer : la prise en charge des toxicomanes déférés devant la justice, dès le début de la procédure et durant toutes ses étapes ; les alternatives aux poursuites : rappel à la loi, orientation vers une structure sanitaire, sociale ou professionnelle ; les alternatives à l'incarcération : mesures d'accompagnement socio-éducatif et de soins avant jugement (orientation ou injonction thérapeutiques parallèles aux poursuites et contrôle judiciaire socio-éducatif), permettant d'éviter la détention provisoire et d'entamer une démarche de réinsertion et d'accès aux soins ; les peines alternatives à l'emprisonnement et les aménagements de peines : travail d'intérêt général, ajournement avec mise à l'épreuve, placement à l'extérieur, semi-liberté ou libération conditionnelle, qui permettent de concilier la réponse pénale avec un suivi pluridisciplinaire. Un projet de circulaire relative aux réponses judiciaires apportées à la toxicomanie, en cours d'élaboration, précisera les modalités d'application de ces orientations, qui privilégient une approche pluridisciplinaire de la lutte contre la toxicomanie et manifestent un souci constant de ne pas laisser sans réponses sanitaire et répressive les conduites de dépendance, quel que soit le produit qui en est à l'origine. A cet égard, le Premier ministre vient de demander à la nouvelle présidente de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) d'élargir le cadre d'intervention de cette structure interministérielle à tous les abus de produits licites tels que le tabac et l'alcool ou les médicaments psychotropes. Toutefois, l'interdit pénal que constitue l'incrimination d'usage de stupéfiants doit continuer de jouer un rôle dissuasif à l'égard des populations concernées et notamment à l'égard des plus jeunes.
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