Question de M. MOREIGNE Michel (Creuse - SOC) publiée le 19/03/1998
M. Michel Moreigne attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur le projet de traité de libre-échange transatlantique. La Commission de Bruxelles, et notamment Sir Leon Brittan, souhaite qu'un traité de libre-échange, baptisé " New Transatlantic Market ", soit signé à tout prix entre l'Union européenne et les Etats-Unis d'Amérique, afin de supprimer l'essentiel des obstacles commerciaux entre les deux principales puissances économiques du monde. Il devrait être soumis au vote des ministres des affaires étrangères européens le 30 mars prochain. Cet accord de libéralisation des échanges prévoit l'élimination de tous les tarifs douaniers sur les biens industriels avant 2010 et celle des barrières techniques au commerce. Il prévoit également la libéralisation dans les domaines des marchés publics, de la propriété intellectuelle et des investissements. De plus, il suppose la mise en place d'un tribunal transatlantique, totalement contradictoire avec l'Organisation mondiale du commerce (OMC), dont la compétence serait de régler les différends internationaux. Si ce projet aboutit, on peut craindre que ces dispositions s'appliquent progressivement aux autres domaines que sont l'agriculture, l'audiovisuel, la culture, etc. Ainsi, il risque de ruiner toutes les chances de construction politique européenne, et de fragiliser la future monnaie unique alors que l'élargissement à l'Est n'est pas résolu. Ne doutant pas de l'attitude qu'adoptera le gouvernement français face à l'initiative malheureuse du vice-président de la Commission européenne chargé de la politique commerciale, il lui demande quels sont les contre-projets de la France pour renforcer la construction politique européenne, et pour faire aboutir la volonté déterminée de grandeur et de rayonnement que François Mitterrand a fait fructifier au début des années 1990 avec le soutien du chancelier Helmut Kohl.
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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 16/04/1998
Réponse. - L'honorable parlementaire a bien voulu attirer mon attention sur l'initiative de la Commission visant à créer un " nouveau marché transatlantique ". Comme le sait l'honorable parlementaire, le projet de traité, présenté par la Commission au conseil " affaires générales " du 30 mars 1998, porte sur les éléments suivants : création d'une zone de libre-échange en matière de services ; engagement de démanteler les tarifs industriels sur une base NPF (clause de la nation la plus favorisée, ce qui suppose une extension aux pays tiers des avantages donnés à titre bilatéral) à l'horizon 2010 ; élimination des entraves techniques ; introduction de dispositions relatives à l'investissement, à la propriété intellectuelle et aux marchés publics. Bien que favorable au renforcement des relations politiques et économiques entre l'Union européenne et les Etats-Unis, partenaire majeur du système international, la France a très clairement marqué son désaccord face au projet de la Commission. Ce projet, qui est contraire à la priorité que la France souhaite accorder au multilatéralisme dans le cadre de l'OMC, ne présente aucune garantie quant à l'exclusion de l'agriculture et de l'audiovisuel du champ d'une éventuelle discussion. Il fait également peser un risque majeur sur l'autonomie de la construction communautaire et l'évolution de l'acquis qui constituent une priorité absolue pour la France. Dans ces conditions, la France a rappelé sa plus vive opposition au projet de la Commission lors du conseil " affaires générales " du 30 mars. J'ai moi-même adressé, conjointement avec le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, un courrier au président de la Commission européenne allant dans ce sens. La France considère que la priorité doit être accordée, dans le suivi des relations transatlantiques, au règlement des contentieux existants, notamment sur les lois extraterritoriales. Elle souhaite que l'Union européenne fasse preuve dans ce domaine de fermeté et de solidarité. S'agissant de l'évolution des relations transatlantiques, elle rappelle que le plan d'action adopté à Madrid en décembre 1995, qui est loin d'avoir épuisé toutes ses potentialités, constitue le cadre dans lequel ces relations doivent progresser. L'honorable parlementaire peut être assuré, dans ce contexte, de l'attention personnelle que j'accorde au suivi de ce dossier.
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