Question de M. SOUVET Louis (Doubs - RPR) publiée le 19/03/1998
M. Louis Souvet attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères concernant les exactions commises par les autorités serbes à l'encontre des populations civiles du Kosovo. Les pays de la Communauté européenne ne peuvent permettre que perdure un tel état de fait contraire au plus élémentaire des droits de l'homme. Il demande quelles actions le Gouvernement français va entreprendre dans ce domaine, tout retard dans la mise en place d'une solution ne peut qu'être préjudiciable à la population civile du Kosovo.
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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 11/06/1998
Réponse. - Comme le souligne l'honorable parlementaire, l'évolution de la situation au Kosovo est particulièrement préoccupante. En effet, les violents incidents qui ont marqué la région depuis le 28 février dernier ont déjà fait près de 150 victimes, parmi lesquelles on compte de nombreux civils. Aussi, les Etats membres du groupe de contact et l'Union européenne n'ont pas manqué de condamner l'usage exclusif de la violence par la police serbe, comme les attentats terroristes organisés par l'armée de libération du Kosovo. La conviction selon laquelle un règlement global de la crise ex-yougoslave ne saurait ignorer la question du Kosovo sauf à courir le risque d'un nouvel embrasement a également conduit la France et ses partenaires du groupe de contact à décider d'exercer de fortes pressions sur les parties pour que se noue enfin un véritable dialogue politique : celui-ci est indispensable à l'apaisement des tensions, mais doit aussi déboucher sur la définition d'un statut d'autonomie renforcée dans le cadre des frontières internationalement reconnues de la RFY et dans le respect des droits fondamentaux de tous les citoyens du Kosovo. La forte cohésion de la communauté internationale et sa mobilisation rapide se sont ainsi traduites par un certain nombre de mesures : lors de leur réunion du 9 mars, à Londres, les ministres du groupe de contact ont décidé l'application immédiate de mesures coercitives à l'encontre des autorités serbes et fédérales : saisine du conseil de sécurité en vue du vote d'un embargo sur les armes (ce qui a été fait le 30 mars) ; engagement de cesser de fournir des équipements susceptibles d'être utilisés à des fins de répression interne ou de terrorisme ; refus de délivrer des visas aux représentants serbes et yougoslaves responsables de la répression ; moratoire sur les financements publics à l'exportation et à l'investissement ; réuni à Rome, le 29 avril, au niveau des directeurs politiques, le groupe de contact (à l'exception toutefois de la Russie) a décidé le gel des avoirs détenus à l'étranger par les gouvernements yougoslave et serbe ; constatant, le 8 mai dernier, à l'occasion du Sommet de Birmingham, l'absence de tout progrès, les Etats membres du groupe de contact (à l'exception de la Russie toujours) ainsi que le Canada ont décidé l'interdiction de tout nouvel investissement en Serbie ; enfin, après l'ouverture du dialogue entre M. Milosevic et M. Rujova (15 mai), les Etats membres du groupe de contact réunis à Birmingham (16 mai) ont décidé de suspendre la mise en uvre de la décision de gel des investissements. La fermeté du groupe de contact a donc payé. L'approche privilégiée par la France dès l'origine (des sanctions graduées - en distinguant mesures immédiates, différées et propositions mises à l'examen -, avec le maintien d'une perspective positive pour Belgrade en cas d'ouverture politique substantielle), traduite dans un certain nombre de démarches particulières (lettre commune de MM. Védrine et Kinkel au Président Milosevic du 19 novembre 1997 ; lettre du Président de la République remise à M. Milosevic par le directeur politique, le 3 avril 1998), reste plus que jamais justifiée. La rencontre organisée à Belgrade, le 15 mai, entre le Président Milosevic et M. Ibrahim Rugova a constitué une véritable avancée dont le premier résultat tangible est la première réunion des négociateurs désignés par les parties, le 22 mai à Pristina. Cependant, nous devons rester à la fois vigilants et lucides. En effet, tandis que les tensions sur le terrain demeurent très fortes, ces premières réunions ne constituent que les premières étapes d'un processus de discussions qui reste encore particulièrement fragile et qui devra donc sans doute bien des fois être porté à bout de bras. Ceci implique notamment que la communauté internationale continue de maintenir les pressions sur Belgrade : c'est pourquoi seule la mesure visant les investissements en Serbie a été suspendue à ce stade. Ceci implique également que les parties consentent les efforts nécessaires à la consolidation et au développement du processus de négociations : c'est d'ailleurs à ce prix que la RFY pourra retrouver sa place au sein de la communauté des nations, comme au demeurant l'Union européenne et la France le souhaitent.
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