Question de Mme BORVO COHEN-SEAT Nicole (Paris - CRC) publiée le 06/03/1998

Question posée en séance publique le 05/03/1998

M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question
s'adressait à M. le Premier ministre.
Le Gouvernement affirme que la priorité doit être donnée à l'emploi des jeunes. Comme chacun sait, nous soutenons
toutes les mesures qui vont dans ce sens.
En effet, le quart de la population active, parmi les jeunes âgés de seize à vingt-cinq ans, est sans emploi, et 120 000
jeunes sont au chômage depuis plus d'un an. Par ailleurs, 18% des jeunes âgés de vingt à vingt-neuf ans vivent en dessous
du seuil de pauvreté, et ceux qui travaillent occupent plus souvent que la moyenne des emplois à durée limitée, puisqu'un
emploi à durée limitée sur cinq est occupé par une personne âgée de moins de trente ans.
Enfin, 45 % des jeunes âgés de dix-huit à vingt-huit ans vivent chez leurs parents, et seulement 11 % d'entre eux ont choisi
cette solution.
Dans son rapport, légitimement salué par tous, Mme Join-Lambert a mis en évidence la dégradation accélérée de la
situation des jeunes par rapport à l'emploi depuis le début des années quatre-vingt-dix.
Les propositions présentées hier par Mme Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, permettront sans doute, sur trois
ans, de renforcer les dispositifs d'insertion, ce qui est positif.
Mais les urgences sont immenses, et on ne peut laisser la situation se dégrader. La société doit prendre un engagement
fort à l'égard des jeunes pour leur proposer un emploi ou une formation.
Nous ne pensons pas qu'il faille accorder aux jeunes un revenu d'assistance en les confirmant dans leur situation ; il faut au
contraire leur donner les moyens de s'en sortir, les moyens d'entrer dans la vie active, à laquelle ils aspirent.
Pour cela, ne serait-il pas possible de mettre en place en faveur des jeunes de dix-huit à vingt-cinq ans une allocation liée
à une formation et à des mesures d'insertion, ce qui répondrait à l'une des préoccupations de Mme Join-Lambert de
prendre en compte les ruptures qui interviennent dans le processus d'insertion de la vie active ?
M. Seillière, président du CNPF, a demandé de rencontrer M. le Premier ministre afin de lui soumettre des propositions
tendant notamment à offrir un emploi aux chômeurs et aux jeunes. L'objectif est louable tant la responsabilité des
entreprises dans le chômage des jeunes est grande. C'est la raison pour laquelle M. Robert Hue, secrétaire national du
PCF, vient de proposer un moratoire sur tous les plans de licenciements actuels.
Dans le même ordre d'idées, n'y a-t-il pas à rechercher, dans le cadre de l'assurance chômage, des pistes de financement
afin de faire contribuer les employeurs au paiement d'une allocation de recherche de premier emploi ? (Applaudissements
sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)

- page 1224


Réponse du ministère : Emploi publiée le 06/03/1998

Réponse apportée en séance publique le 05/03/1998

M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Madame le sénateur, vous venez de poser la question
de savoir s'il ne serait pas temps, dans notre pays, de créer une allocation d'aide aux jeunes de moins de vingt-cinq ans
qui éprouvent des difficultés à vivre, tout simplement. Vous avez dit - comme Mme Join-Lambert, et je partage ce point
de vue - qu'il n'est pas souhaitable d'instituer un RMI pour les jeunes ni un dispositif d'assistance en leur faveur.
La réponse que le Gouvernement apporte sur ce problème est triple.
Premièrement, j'ai écrit hier à la présidente de l'UNEDIC, Mme Notat, qu'il est souhaitable que les partenaires sociaux
réfléchissent à l'indemnisation du chômage alors que de nombreux jeunes entrent sur le marché du travail par une
succession de contrats précaires qui ne leur donnent pas droit à l'indemnisation du chômage et alors même qu'on ne leur
offre pas la possibilité de bénéficier d'un contrat à durée indéterminée.
La diminution du nombre d'heures travaillées a entraîné le rejet de nombreux jeunes qui, auparavant, avaient droit à une
indemnité de chômage.
Deuxièmement, le Gouvernement a souhaité que tous les jeunes qui sont loin de l'emploi, loin d'une qualification directe,
soient suivis pendant dix-huit mois, que leur soit proposé un parcours individualisé allant de certaines mesures d'insertion
jusqu'à la qualification et à l'emploi, période pendant laquelle ils pourraient être rémunérés par le biais d'une procédure
d'insertion, d'un stage de préqualification, d'un stage d'obtention des acquis de base ou d'un CES - pourquoi pas ? - voire
d'une opération de qualification in fine.
En outre, le fonds d'action « jeunes », qui passe de 25 millions de francs à 200 millions de francs, permettra d'aider les
jeunes en grande difficulté qui ont besoin d'être soutenus entre les diverses solutions qui leur sont proposées.
Enfin, troisièmement, nous souhaitons que 40 000 contrats supplémentaires de qualification et 20 000 contrats
d'orientation soient proposés aux jeunes dans les trois ans qui viennent, notamment à ceux qui sont en difficulté, afin que
chacun puisse trouver sa voie en étant rémunéré pendant cette période.
Je crois vous avoir apporté, madame le sénateur, la meilleure réponse possible : nous entendons dispenser un financement
lié à l'insertion et à la formation et non un financement d'assistance, que vous-même rejetez. (Applaudissements sur les
travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)

- page 1224

Page mise à jour le