Question de M. HAMEL Emmanuel (Rhône - RPR) publiée le 12/02/1998

M. Emmanuel Hamel attire l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'information parue à la page C 9 du quotidien Le Figaro du 14 janvier dernier selon laquelle le rapport rédigé par des magistrats, policiers, éducateurs spécialistes de la délinquance juvénile dans le Val-de-Marne et intitulé " Le sentiment d'impunité des mineurs, mythe ou réalité ? " traite " de la violence urbaine et de la nécessité de concilier les impératifs de l'ordre public avec ceux de la police judiciaire. " Selon le magistrat auteur des travaux de synthèse, " entre policiers et magistrats, nous sommes tombés d'accord pour dire qu'à l'occasion de violences urbaines, il ne s'agit pas d'attraper les jeunes qui courent le moins vite mais d'étayer les procédures. A cette fin, il convient que les policiers puissent repérer les meneurs, connaissent la logique judiciaire afin de ne pas considérer une relaxe comme un désaveu de leur travail. " Il lui demande quelle est sa réaction face à cette analyse.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 29/10/1998

Réponse. - L'honorable parlementaire a bien voulu appeler l'attention de Mme le garde des sceaux sur les violences urbaines ainsi que sur la nécessité d'une plus grande compréhension des logiques respectives et d'une plus grande coordination entre les services de police et l'institution judiciaire, tel que l'interview du vice-président du tribunal pour enfants de Créteil le met en évidence. Les violences urbaines, avec la délinquance juvénile, constituent l'une des priorités du ministère de la justice. Pour y apporter une réponse efficace, une grande cohérence entre l'intervention policière et les actions judiciaires apparaît indispensable. Elle ne pourra cependant être mise en uvre qu'à partir d'une bonne connaissance, par les uns et par les autres, des contraintes inhérentes à leurs fonctions et des exigences légales en la matière. Confrontés à l'urgence de leur intervention, les services de police ont la tâche extrêmement difficile de ramener le calme, de procéder à des arrestations et de réaliser, sous le contrôle du procureur de la République, des procès-verbaux d'audition dans le respect des dispositions du code de procédure pénale. Ce respect conditionne en effet la possibilité et la validité de la réponse judiciaire qui prend alors le relais de l'intervention policière. Les dispositions légales en la matière sont l'expression d'un Etat de droit qui fonde sa légitimité tant sur le maintien de l'ordre public que sur la garantie des libertés individuelles. Au stade de la décision judiciaire, l'une des conditions préalables à une condamnation pénale réside dans la présence, dans la procédure, de charges suffisantes permettant de retenir la culpabilité des personnes renvoyées devant la juridiction pénale. Dans ce contexte, le soin apporté par les officiers de police judiciaire à l'établissement des procédures paraît essentiel. Lorsque ces conditions sont remplies, la justice peut apporter une réponse pénale aux actes de violence et le traitement en temps réel, désormais généralisé sur la quasi-totalité du territoire national, lui permet de le faire en temps utile. S'agissant des mineurs mis en cause dans ce type de procédures, elle peut en outre prononcer les mesures éducatives inscrites dans l'ordonnance du 2 février 1945, dans la perspective essentielle de permettre à chaque mineur condamné d'intégrer un certain nombre de repères afin d'éviter une récidive. Ce n'est qu'au travers une concertation régulière entre les services de police et l'institution judiciaire que naîtra une réponse encore plus appropriée et plus effective au phénomène des violences urbaines. A cet égard, s'agissant de la participation des mineurs à ce phénomène, le travail réalisé dans le Val-de-Marne entre le tribunal pour enfants, le parquet des mineurs, la direction départementale de la sécurité publique et la direction de la protection judiciaire de la jeunesse me semble porteur de sens et de progrès. La circulaire du garde des sceaux en date du 15 juillet dernier relative à la politique pénale en matière de délinquance juvénile insiste, elle aussi, sur la nécessité d'un travail étroit entre le parquet des mineurs et les services de police et de gendarmerie au sujet, notamment, de l'évaluation de la délinquance juvénile sur un territoire donné. Cette circulaire souligne également l'importance qui s'attache à ce que les services de police et de gendarmerie, parallèlement à la procédure qu'ils élaborent concernant les faits pour lesquels un mineur se trouve dans leurs locaux, établissent systématiquement une notice de renseignements sur la situation familiale et sociale de ce mineur, et ce afin d'éclairer le magistrat dans sa prise de décision. Enfin, l'extension, au sein de la police nationale, des compétences des brigades des mineurs à l'égard de la délinquance juvénile, s'agissant notamment des violences survenues en milieu scolaire dans les vingt-six départements désignés prioritaires, telle qu'elle a été réaffirmée par le conseil de sécurité intérieure du 8 juin dernier, permettra sans doute de renforcer l'efficacité de la justice en matière de délinquance juvénile. Il en est de même du développement des brigades de prévention de la délinquance juvénile créées par la gendarmerie et de l'amélioration de la formation des personnels de la police nationale et de la gendarmerie sur les problèmes posés par la délinquance des mineurs.

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