Question de M. MOULY Georges (Corrèze - RDSE) publiée le 22/01/1998
M. Georges Mouly demande à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement de bien vouloir lui préciser d'une part quelles seront précisément les activités autorisées et les activités interdites dans les ZPS et ZSC du réseau Natura 2000 et d'autre part quelle autorité pourra, en cas de contentieux, dire comment il convient d'interpréter les textes. Les fédérations départementales de chasseurs, de même qu'un certain nombre d'agriculteurs étant aujourd'hui inquiets de ce manque de précisions, il lui paraît légitime de donner à ces catégories socio-professionnelles les précisions qu'elles sont en droit d'attendre.
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Réponse du ministère : Aménagement du territoire publiée le 25/06/1998
Réponse. - Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a pris connaissance, avec intérêt, de la question posée concernant l'application de la directive européenne sur la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvage, dite directive " Habitats ". Cette question des activités économiques et sociales dans les sites qui feront partie du réseau Natura 2000 a été clarifiée, à la demande du précédent gouvernement, par la commissaire européenne à l'environnement. Celle-ci a considéré que le réseau Natura 2000 n'a pas pour objet de faire des sites qui le composeront des " sanctuaires de nature " où toute activité humaine est à proscrire et elle a considéré notamment qu'il ne doit pas y avoir d'interdiction a priori et générale de la chasse dans les zones Natura 2000. L'un des principes contenus dans la directive est d'assurer la sauvegarde des éléments de la diversité biologique européenne les plus dignes d'intérêt grâce à la gestion d'espaces conciliant en leur sein les exigences écologiques des habitats naturels et des espèces avec les activités économiques, sociales et culturelles de la population. L'objectif n'est donc pas de concevoir les futures zones spéciales de conservation comme des " sanctuaires de la nature " où un règlement fixerait une fois pour toute des interdictions de faire. De nos jours, le maintien de la diversité biologique, spécialement dans l'espace rural et forestier, dépend souvent de la présence, voire de la réinstallation d'activités humaines qui lui sont bénéfiques. Il s'agit donc moins désormais dans les sites Natura 2000 d'établir des mesures de conservation strictement environnementales ou réglementaires, que de rechercher l'intégration de la conservation de la diversité biologique dans les différentes politiques et les différents secteurs d'activité (agriculture, forêt, transports, tourisme, etc.). Ces principes ont été repris et développés dans un mémorandum interprétatif de la directive établi entre le gouvernement français et la Commission. L'un des points de ce document précise que : 1º Ce sont les Etats membres (et non la Commission), en vertu du principe de subsidiarité, qui prennent les mesures appropriées pour conserver les habitats naturels et les habitats des espèces pour lesquels les sites seront désignés. 2º Ces mesures, sauf cas exceptionnels dûment justifiés par des exigences écologiques particulières aux types d'habitats naturels et aux espèces concernés par la directive, présents sur les sites désignés, ne conduisent pas les Etats membres à interdire les activités humaines préexistantes à la désignation des sites ni, de la même façon, à interdire des activités nouvelles qui ne remettent pas en cause l'état de conservation favorable des habitats et des espèces pour lesquels le site sera désigné. Il faut bien comprendre que le réseau Natura 2000 a d'abord pour objectif d'éviter la disparition physique et la dégradation qualitative des habitats naturels et des habitats d'espèces de la flore et de la faune d'intérêt communautaire. Pour les espèces, celles pour lesquelles les sites seront désignés et intégrés au réseau Natura 2000, la directive demande aux Etats membres de veiller à ce que les efforts déployés en leur faveur par la préservation de leur milieu de vie - leur habitat - ne soient pas amoindris par des perturbations éventuelles touchant ces espèces, imputables à certaines activités humaines. Les Etats membres doivent éviter de telles perturbations, pour autant qu'elles soient susceptibles d'avoir un effet significatif eu égard aux objectifs de conservation des espèces pour lesquelles les sites seront désignés. Appliquer un tel principe conduit à examiner la situation au cas par cas, en fonction des espèces en cause et des activités dans un site donné. L'élaboration des propositions de gestion Natura 2000, en concertation avec les interlocuteurs locaux, permettra d'apprécier ces situations au plus près du terrain avec les intéressés eux-mêmes. Pour que les inquiétudes des milieux cynégétiques soient totalement dissipées, la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a fait la proposition au Comité national de suivi Natura 2000 du 30 juillet 1997, qui l'a acceptée, de conduire une réflexion pour définir cette motion de " perturbation ". Ces travaux ont abouti à un document approuvé le 4 décembre dernier par le Comité national de suivi qui démontre que, pour l'ensemble des zones Natura 2000 éligibles au titre de la directive " Habitats ", la chasse n'a pas sur les espèces en cause, sauf pour éventuellement trois d'entre elles dans certaines conditions (l'ours, le phoque veau marin et la population de mouflons en Corse), d'effet significatif en termes de perturbation. L'Union nationale des fédérations départementales de chasseurs, qui a activement participé à cette réflexion et qui en a aussi approuvé les conclusions, s'en est fait l'écho en diffusant ces résultats à toutes les fédérations départementales de chasseurs. Pour éviter les risques de contentieux éventuels, le Gouvernement s'est engagé à faire accompagner la désignation par la France d'un site Natura 2000 à la Commission européenne d'un plan de gestion, appelé " documents d'objectifs ". Ces documents fixeront pour chaque site les orientations de gestion, le cas échéant les contraintes qui pourraient en résulter et les mesures de compensation d'un manque à gagner éventuel et la rémunération des prestations qui auront été définies avec les gestionnaires et propriétaires. Ils seront donc aussi le moyen de confirmer pour les propriétaires et les exploitants la poursuite normale de l'exploitation des fonds ruraux et forestiers et de la pratique de la chasse, notamment. Ils constitueront la base des engagements contractuels de gestion passés avec l'Etat pour la conservation des habitats naturels et des espèces pour lesquels le site sera désigné. Lorsque des outils de gestion existeront sur le site (contrat de rivière, schéma d'aménagement des eaux, plan simple de gestion d'un massif forestier, etc.), les orientations définies dans le document d'objectifs seront à intégrer dans ces outils. Un programme expérimental, soutenu financièrement par la commission au titre du fonds Life, est en cours sur trente-cinq sites. Ce programme permet d'examiner en concertation avec les acteurs locaux et en vraie grandeur les approches, les méthodes et le contenu des futurs documents d'objectifs. Ce programme s'achève au mois de juin 1998. Au-delà de la production du document d'objectifs propre à chacun des sites et d'un guide méthodologique, dont la rédaction s'achève, pour l'élaboration généraliste de ces documents dans les autres sites, l'opération fera l'objet d'une évaluation d'ensemble. C'est à la suite de cette évaluation que sera fixée par le Gouvernement la procédure définitive d'élaboration de tels documents et les modalités de leur application et qu'en même temps sera lancée la réalisation d'un second programme de documents d'objectifs sur certains des sites ayant été proposés à la Commission.
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