Question de M. FISCHER Guy (Rhône - CRC) publiée le 23/10/1997
M. Guy Fischer appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la situation des Caisses d'épargne, du fait du projet de réforme de leurs status juridiques que les présidents du conseil d'orientation et de surveillance et du directoire ont adopté le 7 juillet dernier. Cette réforme vise à leur transformation en des sociétés anonymes coopératives, dont les capitaux pourraient être détenus par des actionnaires privés. Le prédécesseur de M. le ministre de l'économie avait clairement affirmé que les Caisses d'épargne devaient devenir des entreprises bancaires comparables aux autres établissements, pour des raisons de concurrence et de rentabilité. Il reconnaissait en outre que leur transformation conduirait à la cession progressive de leur capital (réponse parue le 10 avril 1997). La tentation, pour l'Etat, d'opérer à l'époque une ponction sur des fonds propres s'élevant à 64 milliards, était sous-jacente dans ce propos. Par ailleurs, la candidature du groupe au rachat du CIC (Crédit industriel et commercial, confirme la volonté de ses dirigeants de transformer l'objet social des Caisses d'épargne, de banaliser le livret A, aboutissant à coup sûr à la suppression de plusieurs milliers d'emplois. Au moment où la marche vers la monnaie unique, s'accompagnant d'une concentration sans précédent au sein du secteur bancaire européen, fragilise incontestablement les établissements français, n'y aurait-il pas lieu, au contraire, de s'appuyer sur les Caisses d'épargne, leur savoir-faire irremplaçable, leur enracinement sur la totalité du territoire, pour améliorer les modes de financement du logement social et les conditions d'épargne des ménages modestes ? C'est précisément ce que proposent les syndicats du personnel, estimant que leur expérience pourrait servir de moteur à l'ensemble du système bancaire à vocation sociale pour s'investir plus avant dans des domaines où les besoins sont criants, tels que l'emploi, la formation, l'insertion, l'aménagement du territoire, etc. Il lui demande instamment une intervention vigoureuse du Gouvernement en vue de préserver la spécifité des Caisses d'épargne. Pour des raisons de transparence et de respect de la démocratie, il lui demande en outre de ne pas autoriser la prorogation du mandat des conseils d'orientation et de surveillance dont le renouvellement, qui devait avoir lieu fin 1997 ou début 1998 selon les caisses, est mis en cause par le groupe avec, semble-t-il, l'aval de M. le ministre de l'économie lui-même.
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Réponse du ministère : Économie publiée le 04/02/1999
Réponse. - Les caisses d'épargne occupent une place originale et précieuse dans le paysage bancaire français. Elles constituent un grand réseau de l'économie sociale, enraciné dans la nation et cher aux Français qui sont près de trente millions à être devenus leurs clients. Fortes de leur histoire, les caisses d'épargne ont su se développer et jouer un rôle essentiel dans la protection de l'épargne populaire et le financement du logement social, au service de l'intérêt général. Elles se trouvent aujourd'hui à un tournant de leur histoire. L'enjeu, c'est de leur permettre de jouer tout leur rôle dans un secteur bancaire en pleine évolution. Dans ce cadre, les caisses d'épargne possèdent d'ores et déjà de nombreux atouts (dynamisme commercial, capacité de distribution, densité du réseau, etc.). Pour tirer pleinement parti des évolutions à venir, elles doivent néanmoins s'adapter et clarifier leur statut. Les handicaps auxquels elles se trouvent confrontés, et notamment leur isolement statutaire, entravent en effet leur développement et les empêchent de remplir pleinement leur rôle d'intérêt général. C'est pourquoi le conseil des ministres a adopté le 2 décembre dernier un projet de loi de modernisation des caisses d'épargne. Ce projet a fait l'objet d'une très large concertation : mission de six mois menée par M. Raymond Douyère, député de la Sarthe, de novembre 1997 à avril 1998 (près de trois cents personnes de tous horizons rencontrés : salariés et dirigeants des caisses d'épargne, organisations syndicales, élus locaux, personnalités qualifiées, etc.) ; concertation avec l'ensemble des acteurs du réseau de mai à novembre 1998. Ce projet de loi reconnaît et définit, pour la première fois de leur histoire, les missions d'intérêt général des caisses d'épargne : le Gouvernement se refuse à toute banalisation du livret A ; une partie de leur résultat sera affectée à des dépenses d'intérêt local et social ; le produit de cession du capital social sera affecté au fonds de réserve pour les retraites qui, par la constitution d'une réserve financière, participe à l'équilibre à long terme et à la sauvegarde des régimes de retraite par répartition. Il dote les caisses d'épargne d'un statut coopératif, porteur des valeurs de solidarité et de participation, qui permet de concilier responsabilité individuelle et solidarité collective et qui leur permet de préserver leur spécificité. Il garantit leur solidité financière, qui restera très largement supérieure à celle des autres banques françaises : le ratio de solvabilité du groupe sera, à l'issue de la réforme, supérieur d'environ 50 % à celui de la moyenne des banques françaises. Il ne comporte enfin aucune disposition sur leur système de retraite, dont l'évolution relève de la négociation entre les partenaires sociaux. Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie veillera toutefois à ce que la négociation en cours assure le respect des droits des salariés. Au total, ce projet de loi permet de donner aux caisses d'épargne une légitimité nouvelle fondée sur un vaste sociétariat, de réaffirmer leur vocation d'établissement de proximité et de trouver un nouvel élan au bénéfice de la solidarité.
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