Question de M. de VILLEPIN Xavier (Français établis hors de France - UC) publiée le 09/10/1997
M. Xavier de Villepin attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur le problème de la drogue aux Pays-Bas. Le ministre de la santé néerlandais a obtenu l'autorisation du Parlement pour commencer en 1998 une expérience de distribution d'héroïne à un groupe de toxicomanes en état de déchéance extrême. L'expérience viserait la réinsertion sociale des toxicomanes. Cette distribution d'héroïne est-elle contraire aux conventions internationales sur les stupéfiants, et plus généralement aux obligations internationales des Pays-Bas membres de l'Union européenne.
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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 20/11/1997
Réponse. - L'honorable parlementaire a bien voulu attirer l'attention du Gouvernement français sur le problème de la drogue aux Pays-bas, et en particulier sur le projet du ministère de la santé néerlandais de procéder à une distribution d'héroïne à un groupe de toxicomanes gravement atteints. D'une façon générale, la politique néerlandaise en matière de drogue a évolué sur plusieurs points sensibles (diminution du nombre de koffee-shops et de la quantité tolérée de cannabis à la vente), de façon à se rapprocher des politiques de ses voisins européens, conformément à l'action commune sur le rapprochement des législations, adoptée au Conseil européen de Dublin. Une seconde action commune adoptée au Conseil européen d'Amsterdam a permis la mise au point au niveau européen d'un " système d'alerte rapide " destiné à lutter contre la menace des nouvelles drogues de synthèse. Sur le plan bilatéral, le groupe de travail franco-néerlandais, mis en place à la fin de 1995 après la rencontre entre le Président de la République française et le Premier ministre néerlandais, a débouché sur un renforcement que nous jugeons positif de la collaboration entre forces répressives, policières, douanières et judiciaires. L'expérience projetée par le ministère de la santé néerlandais de distribution d'héroïne à un groupe de toxicomanes en état de déchéance extrême s'inscrit dans un programme de réduction des risques. La légalité de cette action de " maintenance " à l'héroïne - comme celle des programmes de substitution à la méthadone - peut s'apprécier à la lumière des articles 4 et 33 de la Convention de 1961. L'article 4 oblige les Etats à limiter exclusivement aux fins médicales et scientifiques la production, la distribution et l'emploi des stupéfiants. Il en résulte qu'il appartient aux Etats d'interpréter le sens de l'expression " fins médicales " et d'apprécier si la prescription d'héroïne au titre de la " maintenance " correspond bien à de telles fins. L'article 33 exige des Etats qu'ils ne permettent pas la possession de stupéfiants sans autorisation légale. L'Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS), créé par la convention de 1961, est chargé de l'évaluation des besoins licites de stupéfiants des Etats. Il appartient aux Etats de demander à cet organe l'autorisation de détenir les quantités de stupéfiants requises pour les expériences de distribution d'héroïne. Une expérience similaire, dans le cadre de la réduction des risques, a été effectuée en Suisse en 1994. Une évaluation menée par l'Office fédéral de la santé publique suisse fait état d'amélioration dans l'état de santé des patients, de même que dans leur façon de vivre, et de réduction des coûts liés à la répression et au traitement des maladies infectieuses, mais conclut que ce traitement ne peut être dispensé que de manière restrictive, pour un groupe de toxicomanes présentant un tableau clinique précis, et dans des conditions strictes. Toutefois, l'évaluation définitive de ce programme qui a été demandée par l'OICS à l'Organisation mondiale de la santé (OMS) n'est pas à ce jour achevée.
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