Question de M. OUDIN Jacques (Vendée - RPR) publiée le 29/10/1997
M. Jacques Oudin appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur les incertitudes qui pèsent actuellement sur l'ensemble de la politique autoroutière du Gouvernement et l'inquiétude des élus et des responsables professionnels. Compte tenu de sa situation géographique, la France se doit d'être la " plaque tournante " du réseau autoroutier européen. L'importance de la politique des grandes infrastructures a été confirmée par la loi d'aménagement du territoire no 95-115 du 4 février 1995. Les élus et les professionnels de toutes les régions attendent l'aménagement des nouvelles sections autoroutières avec d'autant plus d'impatience qu'aucune entreprise ne souhaite s'implanter ou se développer loin d'un échangeur autoroutier. Actuellement, plusieurs centaines de kilomètres d'autoroutes attendent leur inscription au schéma autoroutier national ou leur financement. Or certaines informations récentes sur les modifications éventuelles de la politique autoroutière sont profondément inquiétantes. Dans ces conditions, il lui demande de lui indiquer, tout d'abord, si le Gouvernement compte actualiser rapidement le schéma autoroutier national en y intégrant toutes les sections autoroutières en attente et, si oui, dans quel délai ; dans le cas où le Gouvernement entendrait définir une nouvelle politique autoroutière, s'il envisage d'engager un débat national devant le Parlement, tant il est vrai que les élus nationaux ont, à la quasi-unanimité, souhaité l'achèvement aussi rapide que possible du schéma autoroutier national ; enfin, de quelle manière le prochain comité des investissements économiques et sociaux affectera les crédits au réseau autoroutier pour la fin de 1997 et l'année 1998 ? A cet égard, l'assemblée générale de la route des estuaires, qui s'est tenue au Sénat le 7 octobre 1997, s'est particulièrement émue des retards constatés pour la réalisation des autoroutes A 28 entre Rouen et Alençon, A 831 entre La Rochelle-Rochefort et Fontenay-le-Comte, A 65 entre Bordeaux et Pau, et de l'aménagement de la RN 10 sur l'axe Bordeaux-Bayonne. Or il lui rappelle que cet axe a été jugé comme la première priorité d'aménagement du territoire lors du comité interministériel d'aménagement du territoire de Mende, le 12 juillet 1993.
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Réponse du ministère : Équipement publiée le 19/11/1997
Réponse apportée en séance publique le 18/11/1997
M. Jacques Oudin. Monsieur le ministre, j'attire votre attention sur les incertitudes qui entourent actuellement l'ensemble
de la politique autoroutière du Gouvernement et sur les inquiétudes des élus et des responsables professionnels à cet
égard.
Un certain nombre de critiques, que beaucoup jugent infondées, ont été émises à l'encontre de l'ensemble du dispositif
autoroutier.
Ainsi, les sociétés autoroutières seraient trop endettées ; mais comment ne le seraient-elles pas quand elles doivent
financer des investissements qui dureront des siècles grâce à des emprunts sur quinze ans ?
On dit aussi que le coût des autoroutes a trop fortement augmenté : le chiffre de 45 millions de francs par kilomètre a, en
effet, été atteint. Mais c'est nous qui l'avons voulu, avec la loi sur les paysages, la loi sur l'eau et la loi sur l'air.
On prétend encore que les autoroutes ne créent pas d'emplois. Nous y reviendrons, mais je crois que c'est totalement
inexact.
Depuis quarante ans, la France s'est progressivement dotée d'une politique autoroutière et d'un réseau dont l'objet est à la
fois de desservir nos frontières terrestres ainsi que notre littoral - les fameuses régions périphériques ou ultrapériphériques
chères à M. Raffarin - et de désenclaver toutes les régions de notre territoire ; Adrien Gouteyron vient de s'exprimer sur
ce sujet.
La réforme autoroutière de 1993-1994, qui a regroupé les sociétés d'autoroutes et amélioré la péréquation des péages
entre les sections excédentaires et les nouvelles sections, a permis au gouvernement de l'époque d'annoncer l'achèvement
possible du schéma autoroutier dans un délai de dix ans.
Compte tenu de sa situation géographique au coeur de l'Europe, la France est la plaque tournante du réseau autoroutier
européen entre tout le nord de l'Europe et l'Europe méditerranéenne.
L'importance de la politique des grandes infrastructures a été confirmée, après un débat national, par la loi d'orientation du
4 février 1995 pour l'aménagement et le développement du territoire.
Les élus et les professionnels de toutes les régions de France attendent l'aménagement des nouvelles sections
autoroutières avec d'autant plus d'impatience qu'aucune entreprise ne souhaite s'implanter ou se développer loin d'un
échangeur autoroutier.
Actuellement, plusieurs centaines de kilomètres d'autoroutes attendent leur inscription au schéma autoroutier national ou
leur financement. Or il semble que 500 kilomètres d'autoroutes inscrits à ce schéma soient gelés. Bien entendu, de telles
informations nous inquiétent particulièrement.
C'est pourquoi je vous demande, monsieur le ministre, de bien vouloir m'indiquer, tout d'abord, si le Gouvernement
compte actualiser rapidement le schéma autoroutier national en y intégrant toutes les sections autoroutières en attente et, si
oui, dans quel délai.
Dans le cas où le Gouvernement entendrait définir une nouvelle politique autoroutière, envisage-t-il d'engager un débat
national devant le Parlement, tant il est vrai que les élus nationaux ont, à la quasi-unanimité, souhaité l'achèvement aussi
rapide que possible du schéma autoroutier national ? Il n'est pas possible de changer de politique sans en débattre devant
la nation !
Enfin, je voudrais savoir de quelle manière le prochain comité des investissements économiques et sociaux affectera les
crédits au réseau autoroutier pour la fin de 1997 et l'année 1998.
A cet égard, l'assemblée générale de la Route des estuaires, qui s'est tenue au Sénat le 7 octobre 1997 et à laquelle, faute
d'avoir pu y participer, vous étiez représenté par le directeur des routes, s'est particulièrement émue des retards constatés
dans la réalisation des autoroutes A 28, entre Rouen et Alençon, A 831, entre La Rochelle - Rochefort et
Fontenay-le-Comte, A 65, entre Bordeaux et Pau, et de l'aménagement de la RN 10 sur l'axe Bordeaux-Bayonne.
Je rappelle que la Route des estuaires, cette autoroute qui doit relier entre elles toutes les régions ultrapériphériques de la
façade Atlantique, a été jugée comme la première priorité d'aménagement du territoire par le CIAT de Mende, le 12
juillet 1993, donc sous un précédent gouvernement. Vous comprendrez, monsieur le ministre, que nous y attachions
beaucoup d'importance.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, tout
d'abord, loin de moi l'idée de critiquer notre système autoroutier ; il a permis des réalisations dont tout le monde reconnaît
la qualité. Je puis même dire - je le vérifie dans mes rapports avec mes homologues étrangers - que certains pays nous
l'envient et envisagent de copier le système des concessions.
M. Jacques Oudin. C'est tout à fait exact !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Cela étant dit, je répondrai plus
précisément aux questions importantes et tout à fait pertinentes que vous avez posées.
En premier lieu, le schéma directeur routier national approuvé en 1992, qui prévoyait la concession de 2 600 kilomètres
d'autoroute, constitue évidemment notre référence. Il est donc hors de question de le faire passer à la trappe.
Cependant, la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire approuvée le 4 février 1995
prévoyait la réalisation d'un schéma national, ainsi que la révision ou l'élaboration de cinq schémas directeurs
d'infrastructures à l'horizon 2015.
Dans ce cadre, mes services ont engagé des études intermodales approfondies afin d'assurer la cohérence indispensable à
l'élaboration des schémas modaux.
Toutefois, le Gouvernement ayant décidé, sur la proposition de Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de
l'environnement, de réviser la loi du 4 février 1995, en particulier le dispositif de planification qu'elle prévoit, il convient
que des orientations aient été arrêtées en la matière pour pouvoir poursuivre l'élaboration des schémas de transports,
notamment, pour examiner l'opportunité d'y inscrire de nouvelles liaisons autoroutières.
En résumé, le schéma directeur approuvé en 1992 constitue la référence. La révision de la loi du 4 février 1995 sur
l'aménagement et le développement du territoire interviendra au cours des prochains mois. A partir de ces textes, nous
aurons la possibilité de poursuivre l'élaboration des schémas de transports.
Par ailleurs, j'ai déjà indiqué que les mécanismes actuels de financement du réseau routier national, qui ont permis à notre
pays de se doter d'un réseau autoroutier performant en quelques décennies, conduisent aujourd'hui à un réseau à deux
vitesses.
Premièrement, des autoroutes concédées remarquablement aménagées, avec des améliorations en matière
d'environnement, se développent dans des secteurs où le trafic est parfois trop faible pour que les péages permettent de
faire face aux investissements. C'est ce développement des parties concédées qui pose un problème d'endettement
lorsque le trafic est insuffisant.
Deuxièmement, des routes nationales nécessitant des travaux d'aménagement et de sécurité qui ont été trop souvent ou
trop longtemps repoussés. L'entretien et la réhabilitation du patrimoine ne me paraissent pas à la hauteur des besoins,
faute de crédits suffisants.
Face à ce constat, j'ai décidé de mettre à l'étude une réforme du financement des routes et autoroutes, qui permette de
mieux utiliser les moyens financiers globalement disponibles.
Devant l'importance que représente le réseau routier pour l'économie nationale et l'enjeu d'une telle réforme, le Parlement
aura naturellement à en connaître et à en débattre.
L'engagement de ces réflexions, tant sur les schémas que sur le financement, ne signifie évidemment pas que tout doit
s'arrêter. Ainsi, le programme d'investissement sur les autoroutes concédées que je proposerai pour 1998 au prochain
comité des investissements économiques et sociaux, présidé par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie,
s'élèvera à environ 17,6 milliards de francs, ce qui représente 80 % de plus que la moyenne annuelle sur la période
1988-1993.
Je peux donc aujourd'hui vous confirmer que le problème du financement du tronçon de l'A 28 entre Rouen et Alençon,
qui n'a pas de rentabilité propre mais dont le principe n'est pas remis en cause, sera examiné dans le cadre de cette
instance.
Vous avez également parlé de l'aménagement de la RN 10 sur l'axe Bordeaux-Bayonne. Je rappelle, à cet égard, que la
décision sur le mode de réalisation de la mise aux normes autoroutières sera prise dans les semaines à venir. D'ores et
déjà, un programme de sécurité de 50 millions de francs est mis en place, comme je m'y étais engagé après le grave
accident qui a eu lieu cet été.
Les autoroutes A 831 et A 65 ne sont pas inscrites à l'actuel schéma directeur routier national. Mme la ministre de
l'aménagement du territoire et de l'environnement déposera très prochainement le projet de loi auquel j'ai fait allusion tout
à l'heure. Dès l'approbation de ce texte par le Parlement seront déclenchées les procédures de mise en place des schémas
nationaux d'infrastructure.
Tel est le cadre dans lequel nous travaillons s'agissant des projets relatifs aux autoroutes A 831 et A 65.
M. Jacques Oudin. Je demande la parole.
M. le président. Mon cher collègue, je vous demanderai d'être bref car, tout à l'heure, vous avez largement dépassé le
temps de parole qui vous était imparti.
Cela dit, je vous donne la parole.
M. Jacques Oudin. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse. Je formulerai simplement deux remarques.
Tout d'abord, si la réforme du financement doit consister à affecter des recettes des autoroutes au réseau national, ce sera
une très mauvaise solution.
Ensuite, n'oublions pas que la route représente 85 % du trafic des voyageurs et 75 % du trafic des marchandises.
L'autoroute c'est la sécurité ! Les autoroutes assurent 50 % du trafic et moins de 5 % des accidents s'y produisent.
Monsieur le ministre, tout kilomètre d'autoroute en moins représente des morts en plus.
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