Question de M. MOULY Georges (Corrèze - RDSE) publiée le 24/09/1997
M. Georges Mouly attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au budget sur le problème régulièrement posé de la réglementation des débits de boissons en milieu rural. Compte tenu des nombreuses contraintes actuellement en vigueur, ce transfert se révèle toujours difficile alors que dans les villages, le café demeure souvent de nos jours le dernier lieu de vie. Il lui demande donc s'il entend réformer cette réglementation ou tout au moins l'assouplir, ce qui permettrait d'aller au-delà des lois de 1987 et 1995.
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Réponse du ministère : Défense publiée le 15/10/1997
Réponse apportée en séance publique le 14/10/1997
M. Georges Mouly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'assouplissement des modalités
de transfert des licences IV est régulièrement sollicité par les élus locaux, soit en vue de l'animation des quartiers urbains,
soit - et c'est sous cet angle que je veux essentiellement aborder le problème - au nom de la vie dans les communes
rurales.
La préservation - sans excès, bien sûr - des débits de boissons contribue, fût-ce modestement, me semble-t-il, au
maintien de la vie en zone rurale. Or, en matière de transfert de la dernière licence IV d'une commune, même si les lois de
1987 et 1995 constituent une réelle amélioration du dispositif, la réglementation, encore trop contraignante, conduit
souvent à la disparition des licences IV.
L'article L. 41 du code des débits de boissons interdit en effet le transfert hors du territoire communal de la dernière
licence IV attribuée dans une commune.
Cette mesure semble certes favorable à l'aménagement du territoire et à la protection des communes rurales. Cependant,
son application concrète et systématique induit des effets pervers et a des conséquences pénalisantes soit pour le dernier
exploitant contraint de cesser son activité, qui ne peut ni revendre sa licence ni bénéficier d'une indemnisation, soit pour la
commune propriétaire d'une licence, qui ne trouve pas matière à l'exploiter avant la date de péremption.
Le transfert d'une telle licence ne doit plus être envisagé exclusivement au regard de l'activité touristique, seul critère utilisé
à l'heure actuelle. Il convient de reconnaître le caractère commercial de l'exploitation de cette licence et de considérer le
problème du transfert d'un point de vue socio-économique. Cela m'amène à me demander, au passage, si l'examen du
transfert de licence ne pourrait pas être confié à d'autres services que ceux des douanes.
La procédure devrait être assouplie. Devraient également être introduites les notions d'automaticité d'attribution lorsqu'il y
a création d'entreprise en milieu rural et d'indemnisation en cas de disparition de la licence.
Dans le cadre de l'aménagement du territoire et de la lutte contre la désertification, ne serait-il pas possible d'autoriser,
voire d'encourager le transfert d'une licence IV, même lorsqu'il s'agit de la dernière sur le territoire d'une commune, avec,
évidemment, l'accord du conseil municipal ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le président, monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir
excuser mon collègue M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget, qui a préparé la réponse à votre question mais qui
ne pouvait assister à cette séance.
Vous souhaiteriez que la réglementation sur les débits de boissons ne fasse pas obstacle au maintien des cafés en milieu
rural. Je voudrais vous faire part des préoccupations convergentes du Gouvernement sur ce point.
En effet, le souci que vous exprimez a déjà conduit à assouplir la réglementation, dont, ne l'oublions pas, l'objet
fondamental est de prévenir la prolifération des débits de boissons.
Tout d'abord, et cette règle est ancienne, la dernière licence à consommer sur place de quatrième catégorie ne peut quitter
la commune dans laquelle elle se trouve.
Cette disposition, qui figure à l'article L. 41 du code des débits de boissons et des mesures de lutte contre l'alcoolisme, a
pour finalité de ne pas priver les villages de la possibilité d'ouvrir un débit de boissons. La dernière licence IV est
maintenue, et il n'existe aucune dérogation.
Les règles antérieures prévoyaient qu'une licence non utilisée pendant un an était perdue et ne pouvait plus être réutilisée.
Le Parlement a corrigé la rigueur de cette mesure par la loi du 4 février 1995 en portant le délai de péremption de la
dernière licence à trois ans.
Autrement dit, le titulaire de la dernière licence d'une commune peut désormais transférer celle-ci à un éventuel acquéreur
pendant encore trois ans après qu'il a lui-même cessé de l'utiliser.
Par ailleurs, l'article L. 36 du code des débits de boissons, dans le même souci de permettre aux villages de rouvrir un
débit de boissons, donne la possibilité à une commune dépourvue de toute licence à consommer sur place de troisième et
quatrième catégorie de bénéficier du transfert d'une licence équivalente disponible dans un rayon de cinquante kilomètres.
Enfin, il existe une facilité supplémentaire pour les sites touristiques, qui sont heureusement de plus en plus nombreux dans
notre pays. Une licence existante mais inutilisée peut être transférée dans un rayon de cent kilomètres, après avis de la
commission départementale des transferts touristiques, qui est présidée par un magistrat.
Comme vous pouvez le constater, la réglementation a donc déjà fait l'objet d'assouplissements notables. Faut-il aller plus
loin ? Faut-il, en particulier, faire évoluer l'article L. 41, qui interdit le transfert de la dernière licence d'une commune ?
Il y a là un arbitrage à trouver entre, d'une part, le souci d'aménagement du territoire et, d'autre part, la défense des droits
légitimes du titulaire. L'aménagement de l'espace rural tend à donner à une commune une sorte de droit rigide de
conserver la dernière licence, alors que l'intérêt du titulaire de la dernière licence, qui souhaite pouvoir la vendre là où il
existe des perspectives commerciales meilleures, pousse à une certaine mobilité.
Cependant, il est possible que même le souci de l'aménagement du territoire se conjugue avec une certaine mobilité : en
fonction de l'évolution des flux de circulation, de l'implantation d'un autre commerce à l'intérieur même d'un canton à faible
densité, il peut être judicieux que la dernière licence inutilisée dans un village puisse, de manière profitable pour la
collectivité, être transférée.
Le comité interministériel qui a pour mission de définir et d'animer la politique du Gouvernement dans le domaine de la
lutte contre l'alcoolisme a constitué un groupe de travail pour examiner les possibilités d'évolution de la réglementation en
la matière.
Le Gouvernement attend que ce groupe de travail lui fasse très rapidement des propositions. Vous conviendrez
certainement, monsieur le sénateur, que cette instance saura dégager des mesures équilibrées.
S'agissant de dispositions législatives, de telles mesures seront nécessairement soumises au Parlement, et je suis persuadé
que le débat qui s'ouvrira alors permettra de parvenir à une solution tenant compte des intérêts privés légitimes en même
temps que des aspirations d'aménagement du territoire.
M. Georges Mouly. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Mouly.
M. Georges Mouly. Je vous remercie, monsieur le ministre, de la réponse que vous m'avez apportée.
J'ai bien noté que le Gouvernement partageait le souci que j'ai exprimé.
J'ai également noté qu'un groupe de travail était mis en place. Mon souhait est évidemment que ce groupe de travail, sur le
point précis que j'ai cru devoir soulever - même si, j'en suis bien conscient, il ne revêt pas une importance majeure -
avance dans un sens conforme aux préoccupations dont je me suis fait l'écho et qui sont également celles du
Gouvernement.
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