Question de M. BERCHET Georges (Haute-Marne - RDSE) publiée le 03/07/1997

M. Georges Berchet attire l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conséquences, en matière de baux ruraux, de l'article 432-12 du nouveau code pénal relatif au délit de prise illégale d'intérêts ou d'ingérence. L'application de cet article fait défense aux élus locaux de conclure de tels baux avec leur collectivité. En milieu rural, bon nombre d'agriculteurs siègent au sein des conseils municipaux et cette interdiction soulève des problèmes importants, voire même dramatiques, pour le développement des exploitations agricoles. Il rappelle que des réponses ministérielles ont déjà été apportées, réaffirmant l'interprétation stricte des interdictions légales posées par l'article 432-12 du code pénal sans prendre en considération la spécificité des communes rurales. Or il conviendrait sans doute d'introduire des assouplissements à ces dispositions afin de tenir compte des caractéristiques de ces communes, notamment leur démographie et la composition socioprofessionnelle de leur population. Il semblerait particulièrement souhaitable d'accorder aux maires agriculteurs, au moins, le renouvellement des baux existants. Les limitations rigoureuses imposées actuellement découragent bon nombre d'exploitants agricoles de s'engager dans la vie publique étant donné qu'ils se trouvent contraints de choisir entre l'exercice de leur profession et la gestion municipale. Une proposition de loi d'initiative sénatoriale, numéro 239, a été élaborée " tendant à autoriser les élus des communes comptant 3 500 habitants au plus à conclure avec leur collectivité des baux ruraux ". Il souligne l'urgence d'adapter la législation en ce domaine et souhaite que cette proposition de loi soit très rapidement soumise au Parlement. Il lui demande en conséquence de bien vouloir lui préciser ses intentions à ce sujet.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 27/11/1997

Réponse. - Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que les dispositions de l'article 432-12 du code pénal n'interdisent pas de manière générale et absolue à des élus locaux de conclure des baux ruraux avec leur collectivité. Ce texte incrimine en effet le fait de prendre, recevoir ou conserver un intérêt dans une affaire sur laquelle la personne en cause exerce un contrôle au moment de l'acte. Une appréciation stricte de la loi pénale permet de considérer que le délit n'est pas caractérisé dans de multiples hypothèses. L'élu concerné, s'il n'est pas le maire, peut ne pas avoir la surveillance de l'opération ; il peut en toute hypothèse, s'il entend louer des terres communales, ne pas accepter de délégation dans le domaine de la gestion du patrimoine communal. Par ailleurs, l'élu a pu devenir maire après avoir conclu le bail rural avec la commune ; dans ce cas le délit n'est pas constitué puisque le bail a été conclu dans des conditions régulières. Enfin, l'élu titulaire d'un bail très ancien peut ne pas se voir appliquer le délit de conservation d'un intérêt, même acquis illégalement mais à une époque prescrite. En définitive, il s'avère que la loi pénale ne paraît s'appliquer qu'à des situations très spécifiques, c'est-à-dire, à titre principal, à des maires qui, postérieurement à leur élection, voudraient louer des terres communales ou renouveler leur bail avec des modifications significatives dans ses conditions. Sur un plan plus général, il convient de rappeler que le délit de prise illégale d'intérêts a pour finalité essentielle d'éviter tout conflit entre intérêt privé et intérêt général. Sans méconnaître la spécificité des communes rurales, il ne paraît pas opportun d'affaiblir ce principe d'impartialité de la puissance publique en accordant une dérogation au profit d'une catégorie d'élus, aussi estimable soit-elle.

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