Question de M. DELEVOYE Jean-Paul (Pas-de-Calais - RPR) publiée le 20/06/1997
M. Jean-Paul Delevoye appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur le devenir des écoles privées sous contrat d'ingénieurs en agriculture. Ces établissements dispensent un enseignement reconnu et de haut niveau et forment des spécialistes indispensables à une agriculture moderne et compétitive. A ce titre, et depuis 1984, ils sont détenteurs d'une mission de service public dans le cadre de l'enseignement supérieur. Le coût moyen annuel de formation d'un étudiant s'élève à 43 000 francs, soit la moitié du coût constaté dans les établissements publics. Ce montant a d'ailleurs été reconnu par le ministère de l'agriculture comme un besoin incompressible de ces écoles au titre de leur fonctionnement. Malgré des négociations ininterrompues, la période du second contrat quinquennal (1993-1997) n'a pas permis le déblocage du dossier du financement des écoles privées d'ingénieurs en agriculture, à tel point que leur avenir n'est plus assuré. Pourtant, l'effort demandé à l'Etat est de l'ordre de 50 millions de francs, alors même que la formation des élèves dans les écoles publiques coûterait 200 millions de francs. Pire, un reliquat de crédits dus à ces établissements de 7,4 millions de francs, qui pourrait utilement être versé en 1997, reste bloqué. L'année 1998 sera la première du nouveau contrat quinquennal (1998-2002) et il est indispensable qu'une solution pérenne soit trouvée avant cette échéance pluriannuelle. Il souhaite que M. le ministre puisse s'engager sur cette base et lui indiquer l'état actuel d'évolution du dossier.
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Réponse du ministère : Agriculture publiée le 08/04/1998
Réponse apportée en séance publique le 07/04/1998
M. Jean-Paul Delevoye. Monsieur le ministre, je sais le souci que vous avez du développement de l'agriculture
française. Or, l'une des clés de ce développement réside dans la formation des cadres des industries agroalimentaires et
des fermes agricoles. La question du développement des écoles privées, notamment pour la formation des ingénieurs en
agriculture, est donc primordiale pour l'avenir de notre agriculture.
Par la loi du 31 décembre 1984 a été reconnue aux établissements privés sous contrat de l'enseignement supérieur
agricole la mission de service public de l'enseignement supérieur. Puis, par deux décrets successifs, en date du 31 octobre
1986 et du 28 mars 1993, l'Etat a reconnu l'insuffisance du soutien public et, au cours d'une négociation sur la préparation
des futurs contrats quinquennaux, le financement de 43 000 francs par étudiant et par an, qui correspond à la moitié du
coût de la formation des ingénieurs dans les écoles publiques, a été reconnu comme un besoin incompressible des écoles
par le ministère de l'agriculture. Je relève d'ailleurs que ce besoin a été reconnu en 1991 comme en 1996, c'est-à-dire
sous des gouvernements différents.
Aujourd'hui, monsieur le ministre, il semble important de faire le point : y a-t-il un reliquat qu'il serait nécessaire de
débloquer au titre de l'année 1997 ? En outre, dans la préparation du nouveau contrat quinquennal 1998-2002, il apparaît
primordial, pour la pérennité de cet enseignement et pour éviter que celui-ci ne se dégrade, qu'un protocole puisse être
conclu.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, ainsi que le sait fort bien M. Delevoye, si le ministère de l'agriculture et de la pêche est particulièrement attentif,
depuis de nombreuses années, aux formations dispensées par les écoles privées d'enseignement supérieur agricole, il l'est
aussi à leur place dans le développement du secteur agronomique et agroalimentaire.
Ainsi, la loi du 31 décembre 1984, que M. Delevoye a évoquée, leur permet de recevoir des concours publics du fait
qu'elles participent à la mission de service public d'éducation et de formation. Ces concours financiers sont fixés par des
contrats quinquennaux. Ainsi qu'il le disait, les derniers contrats couvraient la période 1993-1997.
Les prochains doivent couvrir la période 1998-2002. A l'occasion de ce renouvellement, les écoles concernées ont émis,
ce qui est légitime, des revendications qui tendent à augmenter le montant de leurs subventions de plus de 60 millions de
francs, soit de près de 60 % par rapport au montant des crédits inscrits en loi de finances.
Les négociations engagées s'inscrivent toutefois dans le cadre de la contrainte d'une croissance maîtrisée du budget dont
j'ai la responsabilité.
Dans ce contexte, je veux d'abord rassurer M. Delevoye : il n'est aucunement question de bouleverser le dispositif
d'ensemble de notre enseignement supérieur privé, qui a fait ses preuves et dont tous les partenaires peuvent se féliciter,
comme je l'ai dit dernièrement devant le congrès annuel de l'enseignement agricole privé.
Ainsi, les nouveaux contrats étant en cours de négociation, les dispositions des précédents ont été reconduites afin de ne
pas provoquer une rupture dans le versement de l'aide publique apportée à ces écoles.
Je peux également indiquer que les discussions techniques qui viennent de s'engager sont extrêmement ouvertes.
En outre, je tiens à rappeler que ce dispositif législatif et réglementaire est unique dans le système d'enseignement
supérieur français.
Si les moyens financiers qui sont attribués aux écoles privées d'ingénieurs en agriculture peuvent paraître limités au regard
des charges auxquelles ces écoles doivent faire face, il n'en demeure pas moins que l'effort réalisé reste très sensiblement
supérieur à ceux que reflètent les autres dispositifs nationaux de financement des établissements d'enseignement supérieur
privés.
L'Etat a déjà amélioré, lors de chaque renouvellement des contrats quinquennaux, en 1986 puis en 1993, sa participation
au financement de ces établissements. Les crédits annuels consacrés aux écoles privées d'enseignement supérieur agricole
sont ainsi passés de 42,6 millions de francs en 1986 à 97,6 millions de francs en 1997.
Enfin, en ce qui concerne le reliquat de crédits auquel a fait référence M. Delevoye, je dois préciser qu'il n'est pas « dû »
aux écoles privées. M. Delevoye ne l'a d'ailleurs pas dit. Ce reliquat est le résultat de la différence cumulée, d'année en
année, entre le montant, légèrement surévalué, des crédits inscrits en loi de finances et la simple application des
dispositions réglementaires de calcul des subventions prévues par les décrets d'application de la loi.
En conclusion, j'ai soigneusement noté les propos qu'à tenus M. Delevoye. Je puis l'assurer que, dans les discussions qui
sont en cours, j'entends non seulement respecter entièrement l'esprit de la loi de 1984, mais également, dans toute la
mesure possible, compte tenu des contraintes budgétaires, faire écho aux demandes formulées.
M. Jean-Paul Delevoye. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Delevoye.
M. Jean-Paul Delevoye. J'ai pris bonne note, monsieur le ministre, de votre souci de préserver la qualité de
l'enseignement supérieur. Je partage tout à fait votre analyse : dans la compétition à laquelle est aujourd'hui confrontée
notre économie, il est évident qu'une des clés de la réussite passera par le niveau intellectuel de celles et de ceux qui
seront à sa tête.
Le second aspect de la question qui peut donner lieu à débat est la maîtrise des dépenses publiques. Chacun admet qu'il
convient, aujourd'hui, de limiter les prélèvements obligatoires. Mais, à l'intérieur des dépenses publiques, il y en a qui
peuvent être considérées comme actives, qui garantissent un meilleur devenir - c'est l'investissement dans la recherche,
dans la formation, dans l'enseignement supérieur - et d'autres qui sont plutôt passives - ce sont, bien évidemment, les
dépenses de retraite et le règlement du redoutable problème de la dette.
Au vu de votre réponse, j'espère, monsieur le ministre, que vous ferez en sorte que l'enseignement supérieur agricole, qui,
par son histoire, est en majorité privé, puisse garder toute son efficacité, sa pertinence et sa qualité, afin que l'agriculture
française reste l'une des plus performantes au monde et que, dans le contrat quinquennal 1998-2002, les moyens lui
soient donnés de cette ambition.
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