Question de M. BILLARD Claude (Val-de-Marne - CRC) publiée le 07/02/1997
M. Claude Billard demande à M. le ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme quelles seront les conséquences de l'extension du statut du personnel de la compagnie Air France au personnel de la compagnie nationale Air France Europe.
- page 798
Réponse du ministère : Transports publiée le 26/02/1997
Réponse apportée en séance publique le 25/02/1997
M. Claude Billard. Au cours des quinze derniers jours, les salariés d'Air France Europe, personnels navigants et au sol,
ont à plusieurs reprises cessé le travail. Ils s'inquiètent légitimement des conditions dans lesquelles s'opérera la fusion de
leur compagnie avec Air France, et notamment des conséquences négatives pouvant en résulter pour leur salaire, leur
emploi et leurs conditions de travail.
En effet, M. Blanc, le président du groupe, pour mettre en oeuvre cette fusion, a annoncé, sans aucune concertation
préalable avec les représentants du personnel, que, dès le 1er avril, Air France Europe serait placée en « location-gérance
», formule qui consiste à louer la flotte et les salariés à Air France.
En l'absence de toute possibilité de concertation réelle avec la direction de leur entreprise, les organisations syndicales du
personnel ont fait la comparaison entre la situation actuelle et celle qui résulterait du passage sous statut de la compagnie
nationale Air France, comparaison qui leur apparaît grandement défavorable.
C'est ainsi que la durée du temps de travail passerait de trente-huit heures à trente-neuf heures alors que, sur le plan
salarial, l'application du statut d'Air France contribuerait à un recul du pouvoir d'achat. Les pilotes estiment qu'ils
perdraient 20 % de leur salaire tout en voyant leur charge de travail augmenter de 30 %. La mensualisation du
quatorzième mois se traduirait, certes, par le maintien du pouvoir d'achat des salariés actuellement présents, mais ce
quatorzième mois ne serait pas versé aux futurs embauchés.
Autres sujets de mécontentement, le barème des indemnités pour le déplacement domicile-trajet est moins favorable et les
majorations pour le travail du dimanche sont inférieures de 50 % aux majorations pratiquées à Air France Europe.
Enfin, un problème majeur demeure pour le personnel d'Air France Europe, celui de l'emploi.
La fusion laissera en effet de nombreux salariés, en particulier à Orly, sans affectation après le 1er avril 1997. Or, à ce
jour, aucunes modalités décentes de reclassement n'ont été soumises aux organisations syndicales, aucune prospective sur
l'emploi d'ici à la fin de 1997 et pour les années suivantes présentée aux élus du comité d'entreprise.
Au total, les salariés de la compagnie intérieure ont donc la désagréable impression qu'ils sont fermement invités à s'aligner
sur les conditions de travail de leurs collègues d'Air France, qui viennent de subir - chacun le sait - une restructuration
drastique.
Toutes ces craintes sont-elles justifiées, madame le secrétaire d'Etat ?
En tout état de cause, il est impératif, pour les apaiser, de mener à son terme un processus de négociations réelles et
sérieuses avec l'ensemble des organisations syndicales représentatives de toutes les catégories de personnel.
Pouvez-vous apporter des éclaircissements sur les conditions dans lesquelles s'effectuera la fusion avec Air France et
prendre en particulier l'engagement qu'elle se réalisera en assurant la continuité intégrale des postes de travail, le maintien
durable de tous les éléments des contrats de travail et une mobilité reposant sur le strict volontariat ?
En définitive, pouvez-vous nous assurer que le passage sous statut Air France des personnels d'Air France Europe
s'effectuera sans aucun recul des conditions sociales et de la représentativité des personnels ?
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'Etat aux transports. Monsieur le sénateur, je rappellerai d'abord quel est
l'enjeu de la fusion entre Air France Europe et Air France : donner une impulsion nouvelle au groupe national - auquel
nous sommes tous très attachés - impulsion qui doit bénéficier à l'ensemble de ses salariés et, à terme, favoriser l'emploi
dans le groupe dont nul n'ignore qu'il est aujourd'hui confronté à une concurrence très rude et à la nécessité vitale
d'améliorer sa compétitivité.
Pour en venir à votre question, je vous indique que la prise en location-gérance de la compagnie Air France Europe par la
compagnie Air France et la fusion des deux compagnies auront pour effet de placer les salariés d'Air France Europe
transférés à Air France sous le statut du personnel de cette dernière.
Pour ce qui est des relations individuelles, le contrat de travail des salariés d'Air France Europe se poursuivra à Air
France en application des dispositions prévues par le code du travail.
S'agissant des relations collectives, et en application des dispositions du code du travail relatives aux entreprises
publiques, les règles de la compagnie Air France s'appliqueront.
Toutefois, dès l'entrée en application de la location-gérance, des négociations s'ouvriront pour adapter certaines
dispositions en vigueur à Air France Europe. Les points à résoudre sont divers, mais, d'ores et déjà, on peut constater
qu'il n'y a pas d'écart significatif pour les catégories du personnel au sol et du personnel navigant commercial.
En outre, il a été garanti aux personnels au sol d'Air France Europe qu'en 1997 et 1998 il n'y aurait ni baisse des
rémunérations brutes, ni moindre évolution salariale par rapport aux agents d'Air France du fait de la location-gérance ou,
ultérieurement, de la fusion.
Les accords collectifs concernant le personnel navigant technique d'Air France Europe, c'est-à-dire les pilotes, viennent à
échéance le 9 mai 1997. Les règles applicables à Air France s'imposeront à ce personnel à cette date, en particulier celles
qui traitent des mesures salariales.
Nous faisons confiance aussi bien aux dirigeants d'Air France qu'à l'esprit de responsabilité et à la modération des cadres
et du personnel pour poursuivre dans cette phase délicate le redressement définitif du groupe.
M. Claude Billard. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Billard.
M. Claude Billard. Je remercie, certes, Mme le secrétaire d'Etat, des réponses qu'elle a apportées, mais je doute que
celles-ci lèvent les inquiétudes des personnels d'Air France Europe.
Je suis pour ma part persuadé que la solution aux problèmes sociaux que connaissent Air France et Air France Europe ne
peut passer par une politique du fait accompli et de l'injonction ; elle ne peut résider que dans une négociation réelle,
sérieuse, et dans une prise en compte des revendications et des préoccupations des personnels, qui, comme vous le
savez, madame le secrétaire d'Etat, sont nombreuses.
C'est pourquoi je vous saurais gré de veiller à faire prévaloir cette démarche de négociation et de concertation.
- page 1013
Page mise à jour le