Question de M. VIGOUROUX Robert-Paul (Bouches-du-Rhône - RDSE) publiée le 20/12/1996

Question posée en séance publique le 19/12/1996

M. le président. La parole est à M. Vigouroux.
M. Robert-Paul Vigouroux. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, je désire attirer votre attention
sur un problème économique particulièrement grave qui concerne la région de l'étang de Berre et, plus largement, l'avenir
de l'industrie du raffinage en France.
Depuis 1978, treize raffineries françaises ont été fermées. Il en reste onze en activité, dont quatre dans le département des
Bouches-du-Rhône, où le secteur pétrolier représente 30 000 emplois et 400 millions de francs de retombées fiscales
pour les collectivités locales, dont bénéficient les trois quarts des communes du département par le biais du fonds de
péréquation de la taxe professionnelle.
Le groupe pétrolier Shell a prévu la suppression de 274 postes sur sa raffinerie de l'étang de Berre. Mais, plus grave
encore, les groupes pétroliers envisagent de supprimer 1 500 postes sur les sites français, soit 10 % de l'effectif total et la
fermeture d'une des raffineries de l'étang de Berre : une catastrophe économique de plus en prévision pour notre
département, déjà si lourdement affecté par le chômage !
Les compagnies pétrolières réalisent des bénéfices importants à l'étranger, mais les filiales françaises semblent connaître, a
contrario, des difficultés, alors même que notre parc automobile s'est accru de plus de 3 millions de véhicules en dix ans.
Comment expliquer ce paradoxe ?
On nous parle de surcapacité de raffinage dans l'Union européenne. En France, tous produits pétroliers traités confondus,
nous en avons consommé en 1995 plus que nous n'en avons produit : 81 millions de tonnes contre 75 millions de tonnes.
Qu'on ne se cache pas derrière l'excuse de la pollution : les moyens de lutte existent et les problèmes se situent surtout
ailleurs.
Qu'on n'invoque pas non plus les accords européens, car l'Europe ne peut se construire que dans une justice
socio-économique.
Monsieur le ministre, je vous demande donc, au nom d'élus locaux de la région de l'étang de Berre et de très nombreux
salariés des raffineries, ce que vous comptez faire afin d'éviter la fermeture d'une des raffineries de l'étang de Berre et,
plus largement, quelles mesures vous envisagez de prendre pour apporter des solutions aux problèmes que rencontre
cette industrie en France. (Applaudissements sur les travées socialistes.)

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Réponse du ministère : Industrie publiée le 20/12/1996

Réponse apportée en séance publique le 19/12/1996

M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Franck Borotra, ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications. Monsieur le sénateur, votre
question a trait, d'une part, à l'économie générale de l'industrie du raffinage en France et en Europe et, d'autre part, aux
raffineries situées autour de l'étang de Berre.
Il est clair que, dans le domaine du raffinage comme dans bien d'autres, on ne peut plus isoler l'espace français de l'espace
européen.
Les capacités de raffinage en Europe sont de 650 millions de tonnes, ce qui représente probablement plus de 10 % de
surcapacité. Cela signifie que, dans les années qui viennent, au moins dix raffineries vont devoir fermer en Europe.
Bien sûr, il ne faut pas que ce soit la France qui supporte l'essentiel de ce nécessaire effort de restructuration.
Vous me demandez, monsieur le sénateur, pourquoi le raffinage français est plus mal placé que le raffinage européen. En
fait, même s'il y a une surcapacité de raffinage en France, il existe surtout une distorsion de consommation ente le gazole
et les autres produits : on consomme en France plus de gazole qu'on n'en produit ; nous sommes donc contraints d'en
importer. Cela s'explique essentiellement par la diéselisation de notre parc automobile. De l'autre côté, nos raffineries
cherchent à exporter du carburant dont personne ne veut.
Ce hiatus entre la consommation et l'appareil de production de produits pétroliers fait que l'outil de raffinage français
travaille à perte. Il nous faut donc chercher des solutions dans la restructuration de cet outil afin de permettre à nos
raffineries de retrouver un équilibre technique et, par là même, financier.
Par ailleurs, dans le bassin du Sud-Est, nous avons 28 millions de tonnes de capacités de raffinage. Une étude menée par
les raffineurs fait apparaître une surcapacité concernant l'essence de 1,5 million de tonnes ce qui représente environ 4
millions de tonnes de surcapacité de distillation.
Les entreprises doivent se réunir, dialoguer pour essayer de trouver les modalités d'une restructuration afin que soit
maintenue et développée l'industrie pétrochimique, plutôt que pétrolière, de l'étang de Berre. Cette discussion est en
cours, et les pouvoirs publics ne sont pas absents du dialogue. (Applaudissements sur les travées du RPR, des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)

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