Question de M. CHARZAT Michel (Paris - SOC) publiée le 28/11/1996
M. Michel Charzat attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les critères d'affectation des policiers dans les différents arrondissements de Paris. Apparemment, tous les secteurs de la capitale ne sont pas traités de manière équitable en matière d'effectifs de police. Il lui demande, en conséquence, des explications sur cette situation, et sur les mesures qui seront prises pour y remédier.
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Réponse du ministère : Action humanitaire d'urgence publiée le 15/01/1997
Réponse apportée en séance publique le 14/01/1997
M. Michel Charzat. Ma question, qui s'adressait à M. le ministre de l'intérieur, concerne donc les critères d'affectation
des policiers sur les différents secteurs de la capitale.
Un grand quotidien du matin, qu'on ne peut soupçonner de malveillance à l'égard du Gouvernement, a publié récemment
une carte apportant la démonstration de ce que ressentent nos concitoyens parisiens, à savoir que tous les
arrondissements de la capitale ne sont pas traités de manière équitable en matière d'effectifs de police.
En effet, que dire aux habitants des quartiers les plus populaires, notamment le XXe arrondissement, où on dénombre 1,2
policier pour 1 000 habitants, contre 6,4 dans le IVe, 9,2 dans le VIIIe et 16,3 dans le Ier ?
Faut-il croire que certains méritent d'être mieux protégés que d'autres ? Faut-il comprendre que tous les citoyens et tous
les contribuables ne sont pas égaux devant le service public de la sécurité ?
Faut-il rappeler ici que la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose, dans son article II, qu'un des
premiers droits de l'homme est le droit à la sûreté et, dans son article XII, que « la force publique est instituée pour
l'avantage de tous et non pour l'utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée » ?
Certes, je le sais, dans certains secteurs, l'implantation des bâtiments de l'Etat et de représentations étrangères nécessite la
présence constante de forces de police. Mais cela ne peut justifier de tels écarts, particulièrement quand on connaît la
réalité sociale des secteurs de l'est parisien. On ne peut accepter du Gouvernement des discours sur la sécurité quand,
dans le même temps, il laisse perdurer une telle inégalité devant le service public.
Je suis concret : dans le XXe arrondissement, il y a 310 policiers. Avec les contraintes de services, les roulements
d'effectifs vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ce sont à peu près quarante policiers qui sont présents pour assurer la
sécurité de 190 000 habitants.
Ajoutez à cela que l'on retrouve affectés aux postes les plus difficiles nombre de jeunes policiers immergés dans des
situations sociales inextricables, et vous aurez l'explication d'une partie de ce que l'on appelle le « malaise de la police ».
Cette situation ne peut durer. Le Gouvernement doit aux élus parisiens, au Sénat et à la population des explications et des
indications sur les mesures qu'il compte prendre pour y remédier.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence. Monsieur le sénateur, la répartition des
policiers par arrondissement tient compte de nombreux critères, qui ne sont pas uniquement liés à la population résidente.
Ainsi, traditionnellement, la Préfecture de police prend en considération, outre bien sûr la population résidente, la
population dite « de passage », constituée par les personnes travaillant la journée dans la capitale ou par les touristes, qui
vient accroître le nombre des personnes présentes dans les arrondissements centraux de Paris.
Elle tient également compte des points sensibles que sont le siège des institutions républicaines ou des représentations
étrangères, les zones de concentration commerciale ou d'activité économique, les lieux de loisirs, de spectacles ou sportifs
et les quartiers où l'animation nocturne est permanente.
En outre, le poids inégalement réparti à Paris des sujétions inhérentes à l'organisation des services d'ordre et des
dispositifs de maintien de l'ordre est lui aussi pris en considération, ainsi que la superficie de l'arrondissement et la longueur
de la voirie, qui ont une influence sur les délais d'intervention et sont susceptibles d'accroître les difficultés de surveillance.
Enfin, les servitudes liées à la présence d'établissements hospitaliers, dans lesquels doit être assurée la garde de détenus,
ou à l'existence de postes de police importants dans les gares jouent également, de même que le niveau de la délinquance
locale, ainsi que ses particularités.
Chacun de ces critères fournit donc des indications utiles et importantes, mais parcellaires. Le croisement de ces différents
critères est en effet nécessaire pour proportionner les effectifs des commissariats d'arrondissement à la réalité des
multiples charges qui leur incombent.
J'ajoute que les policiers affectés en permanence dans les arrondissements sont soutenus, selon les moments et en fonction
des besoins, par des fonctionnaires appartenant à des unités centrales.
Ainsi, s'agissant de la direction de la sécurité publique, les personnels locaux, dans les arrondissements où une présence
supplétive s'avère nécessaire, sont renforcés par les policiers de la sous-direction de la circulation et de la police de
proximité, des compagnies d'intervention, de la brigade anti-criminalité de nuit et de la toute récente brigade
anti-criminalité de jour.
Il faut aussi noter le travail considérable effectué par le service de protection et de sécurité du métropolitain, ainsi que le
rôle important joué par les 684 policiers auxiliaires qui exercent leurs fonctions sur la voie publique.
De même, les fonctionnaires de la direction régionale de la police judiciaire affectés au sein des commissariats de quartier
bénéficient de l'appui des brigades centrales spécialisées, parmi lesquelles figurent la brigade criminelle, la brigade de
répression du proxénétisme, la brigade de recherche et d'intervention, la brigade de protection des mineurs et la brigade
de répression du banditisme, qui opèrent sur l'ensemble du territoire de la capitale.
Enfin, les personnels des forces mobiles des compagnies républicaines de sécurité ou les gendarmes mobiles mis à la
disposition du préfet de police, qui ne figurent pas dans les tableaux d'effectifs, contribuent également à renforcer l'action
policière dans les arrondissements.
M. Michel Charzat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Charzat.
M. Michel Charzat. Je remercie M. le secrétaire d'Etat des éléments d'information qu'il m'a transmis, mais sa réponse
ne me satisfait pas du tout.
En effet, il s'agit d'arguments traditionnels que rappelle régulièrement le préfet de police, mais je considère pour ma part
que la lutte contre l'extension de l'économie parallèlle de la drogue et les incivilités qui caractérisent certaines cités,
notamment dans le nord-est parisien, passe par le développement de l'îlotage et de la police de proximité.
Or le préfet de police m'a confirmé que des effectifs supplémentaires ne pouvaient être dégagés à Paris au profit des
quartiers les plus difficiles, alors qu'il conviendrait pourtant de permettre une meilleure adéquation entre les problèmes
rencontrés par les habitants de ces quartiers et les effectifs de police.
Je souhaite donc que M. le ministre de l'intérieur entende le cri de détresse poussé par certains de ces habitants et que, à
défaut d'augmenter les effectifs, il procède au nécessaire redéploiement de ceux-ci en faveur de l'îlotage, car cette action
constitue la réponse la plus adaptée aux problèmes que nous connaissons.
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