Question de M. MADRELLE Philippe (Gironde - SOC) publiée le 25/10/1996
M. Philippe Madrelle appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur le caractère injuste et absurde de la méthode de sélection mise en place par le département du sport de l'université de Bordeaux-II. Devant le très grand nombre d'étudiants souhaitant s'inscrire en première année de STAPS (sciences techniques et activités physiques et sportives), l'université a procédé au recrutement par minitel. Ce n'est pas le meilleur test d'aptitude à la filière sportive . 235 étudiants bacheliers ont été inscrits l'an dernier à Bordeaux-II : 350 viennent d'être accueillis dans le hall de l'université faute de locaux. Face au succès de cette filière sportive et au non-sens du système de sélection choisi, il lui demande de bien vouloir lui préciser les mesures qu'il compte prendre afin d'assurer une formation correcte et des débouchés professionnels aux étudiants concernés.
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Réponse du ministère : Recherche publiée le 13/11/1996
Réponse apportée en séance publique le 12/11/1996
M. Philippe Madrelle. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, vous me permettrez de
me faire, ce matin, le porte-parole des trop nombreux étudiants bacheliers qui n'ont pu s'inscrire lors de la dernière
rentrée, en première année de sciences, techniques et activités physiques et sportives de l'université Bordeaux-II.
La dernière rentrée universitaire a été caractérisée, en effet, par un vif engouement des étudiants pour cette filière sportive,
engouement qui ne fait d'ailleurs que traduire l'attrait qu'exerce le sport dans notre société.
Il se trouve qu'on a imaginé et mis en place une méthode de sélection que l'on pourrait qualifier d'ubuesque : la sélection
par minitel, qui a consisté à enregistrer les candidatures par ordre d'arrivée de minitel jusqu'à la 150e, des centaines
d'autres n'étant pas prises en compte, sans considération de motivation ni d'aptitudes sportives. De trop nombreux
candidats ont été recalés faute de pouvoir se connecter à temps. Opérationnel un lundi matin à neuf heures, à neuf heures
cinq, le système était bloqué !
Une telle inégalité de traitement ne peut que déboucher sur des situations injustes, arbitraires et pénalisantes, brisant
l'espoir et les motivations de nombreux jeunes aspirant à embrasser une carrière d'enseignant !
M. le ministre de l'éducation nationale a lui-même qualifié cette procédure d'« absurde », de « scandaleuse », estimant
qu'elle « porte atteinte aux valeurs universitaires ».
Cette méthode d'inscription est à l'origine de très nombreux recours individuels déposés par des étudiants déçus. C'est
ainsi que le tribunal administratif de Bordeaux a annulé trente-deux refus d'inscription à la faculté de sport de Bordeaux-II.
Au-delà du choix de cette méthode de sélection, se posent plusieurs problèmes : manque de locaux, capacités d'accueil
insuffisantes de cette filière et faiblesse des débouchés, limités à l'enseignement. A Bordeaux, cette année, sur les 1 200
bacheliers, environ, qui avaient opté pour cette filière, 370 ont été accueillis dans un hall, faute d'amphithéâtre adapté.
Depuis, c'est une salle de spectacle, à Léognan, qui accueille les étudiants.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous conviendrez que se pose un véritable problème de conditions d'études et de
débouchés.
A Bordeaux, faute de locaux, les cours ne peuvent être assurés. Les enseignants sont à la recherche de terrains et de
salles. Les cours ne pouvant pas être correctement dispensés, on peut s'interroger sur la valeur du diplôme.
Que compte faire M. le ministre de l'éducation nationale pour répondre à l'attente légitime de tous ces étudiants
malchanceux ? Il y va du devoir de l'Etat !
Certes, l'augmentation des capacités d'accueil constitue une amorce de réponse, mais elle ne règle en rien la question des
débouchés de cette filière sportive. On pourrait imaginer de nouvelles formations liées à l'animation physique et sportive.
En tant que responsable d'une collectivité locale, je sais que nous devons faire face à une forte demande dans ce secteur
de l'animation.
Pourriez-vous nous indiquer quels moyens M. le ministre de l'éducation nationale compte mettre en oeuvre pour que tous
ces jeunes motivés par la mission d'enseigner ne soient plus sacrifiés ?
Sans trahir l'esprit de la réforme de 1984, il paraît opportun d'envisager un aménagement du recrutement dans ces unités
de formation et de recherche, afin d'imaginer des critères de sélection qui éviteraient qu'on ne retombe dans les graves
dysfonctionnements dont viennent d'être victimes de nombreux étudiants.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François d'Aubert, secrétaire d'Etat à la recherche. Monsieur le sénateur, le système absurde que vous dénoncez
a été imposé par la jurisprudence administrative. En effet, les procédures d'inscription par minitel ont été imposées aux
universités par les jugements rendus par les tribunaux administratifs, qui obligent à ne retenir que l'ordre chronologique des
inscriptions.
François Bayrou tient à le réaffirmer par mon intermédiaire devant la représentation nationale : ce système est aussi
absurde qu'injuste, et il est déterminé à ne pas laisser cette situation perdurer.
Le Gouvernement a rappelé son opposition à l'instauration d'une sélection à l'entrée de l'université. Il n'est pas possible de
priver un bachelier du droit de tenter sa chance dans l'enseignement supérieur.
Le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a donc pris un certain nombre de
mesures immédiates pour accueillir les étudiants dans les filières STAPS : le nombre de places offertes a triplé en deux
ans.
De nouvelles sections ont été ouvertes pour accueillir un plus grand nombre d'étudiants. Ainsi, plus de 10 000 étudiants
ont pu être inscrits en première année en 1996 contre 7 000 l'an dernier, grâce à la mise en place de moyens, à savoir 93
enseignants, 12 IATOS - ingénieurs, administratifs, techniciens, ouvriers de service - et 7 400 000 francs de crédits.
Dans l'académie de Bordeaux, les capacités d'accueil sont passées de 150 à 334 places avec la création, à Tarbes, de
capacités d'accueil de 84 étudiants.
Au-delà de ces mesures immédiates qui ont permis d'accueillir toutes les candidatures, François Bayrou a engagé la
réforme universitaire pour répondre notamment à ce défi.
La réorganisation des études universitaires qui sera mise en place, dès la rentrée 1997, dans le cadre de la réforme de
l'université, permettra d'améliorer substantiellement le dispositif, grâce, notamment, au renforcement de l'information
précoce dans les lycées, à l'instauration d'un semestre initial d'orientation pour tous les étudiants et à un développement
des passerelles entre les filières.
De nouveaux systèmes pourront être mis en place, et les procédures absurdes d'inscription vont donc disparaître.
M. François Bayrou est, en outre, déterminé à se rapprocher du ministre délégué à la jeunesse et aux sports pour réfléchir
aux débouchés qui pourraient être offerts aux étudiants des filières STAPS. Il existe en effet une forte demande sociale
dans ce domaine, et l'avenir verra sans doute, comme vous l'avez indiqué, monsieur le sénateur, naître de nouveaux
métiers.
M. Philippe Madrelle. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Madrelle.
M. Philippe Madrelle. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'Etat. Nous pouvons nous donner
rendez-vous dans un an. Il faut, et vous l'avez souligné, que les formations mènent à des débouchés, ce qui est loin d'être
le cas aujourd'hui. Pourtant, les élus locaux que nous sommes sont conscients de la nécessité de recruter des animateurs
sportifs. Mais, hélas ! Les crédits nous manquent, et c'est là que l'Etat doit jouer son rôle.
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