Question de Mme BORVO COHEN-SEAT Nicole (Paris - CRC) publiée le 23/10/1996

Mme Nicole Borvo attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la situation des maîtres auxiliaires. Alors que les classes sont surchargées, que l'enseignement va en se détériorant, on oblige les titulaires à faire des heures supplémentaires et on licencie sans préavis, avec toutes les conséquences économiques et humaines que l'on peut imaginer, des non-titulaires exploités pendant plusieurs années comme bouche-trous. Pour toutes ces raisons, elle lui demande ce qu'il compte faire pour transformer un tiers des 800 000 heures supplémentaires en emplois stables et qualifiés, garantissant ainsi le réemploi immédiat des maîtres auxiliaires et à terme leur titularisation, ainsi qu'une création de postes en nombre suffisant pour pourvoir les besoins croissants de l'éducation nationale.

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Réponse du ministère : Recherche publiée le 13/11/1996

Réponse apportée en séance publique le 12/11/1996

Mme Nicole Borvo. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, permettez-moi tout
d'abord de saluer le succès des « reçus-collés ». Après une action de plus de deux mois, les 800 candidats professeurs
reçus sur liste complémentaire au CAPES ont été rétablis dans leurs droits en obtenant une nomination dans les conditions
en vigueur les années précédentes.
Cette action, je le souligne au passage, a permis de mettre en échec une décision qui aurait constitué une première
application du plan gouvernemental de suppression de postes dans la fonction publique. Les maîtres auxiliaires sont
victimes de la même logique de suppression d'emplois.
Alors que ces enseignants ont exercé, pendant des années, dans des conditions difficiles, leur métier, 11 000 d'entre eux
se retrouvent aujourd'hui au chômage. Les conséquences économiques et psychologiques de cette situation pour ces
hommes et ces femmes sont catastrophiques.
Contrairement aux idées reçues, de nombreux maîtres auxiliaires exercent leurs fonctions depuis longtemps et sont
chargés de famille. L'un d'entre eux m'a confié qu'il n'osait pas sortir de chez lui de crainte de rencontrer ses élèves et qu'il
avait honte d'être au chômage.
Cette situation est d'autant plus insupportable que les classes sont surchargées, que les conditions d'enseignement se
détériorent et que de nombreux titulaires sont obligés d'effectuer des heures supplémentaires.
Lors de la discussion du projet de loi relatif à l'emploi dans la fonction publique et à diverses mesures d'ordre statutaire, le
groupe communiste républicain et citoyen avait présenté des propositions concernant les maîtres auxiliaires et d'autres
personnels précaires de la fonction publique que ni le Gouvernement ni la majorité n'ont voulu prendre en compte.
En dépit de quelques améliorations relatives à l'organisation des concours réservés, la question des moyens mis en oeuvre
en faveur d'une éducation nationale à la hauteur des besoins reste posée.
Allez-vous continuer, monsieur le secrétaire d'Etat, à imposer le temps partiel et à ne pas le comptabiliser comme un
temps complet au titre de l'ancienneté requise pour passer les concours internes et réservés ?
Continuerez-vous à obliger les titulaires à effectuer des heures supplémentaires et à empêcher ainsi la titularisation de
milliers d'auxiliaires qui ont déjà des années d'expérience professionnelle ?
Pour toutes ces raisons, je vous demande ce que vous comptez faire pour transformer au moins un tiers des 800 000
heures supplémentaires en emplois stables et qualifiés, garantissant le réemploi immédiat des maîtres auxiliaires et, à terme,
leur titularisation, ainsi qu'une création de postes en nombre suffisant pour pourvoir aux besoins croissant de l'éducation
nationale.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François d'Aubert, secrétaire d'Etat à la recherche. Madame le sénateur, je tiens tout d'abord à rappeler que M.
François Bayrou a été le premier des ministres de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche à
avoir engagé une politique de transformation des heures supplémentaires en emplois.
Ainsi, depuis 1994, 22 770 heures supplémentaires-année ont été transformées en 1 150 emplois dans le cadre des
différentes lois de finances. Cette politique, je tiens à le préciser, sera poursuivie.
Dès juillet 1993, M. François Bayrou a signé un protocole d'accord pour la résorption de l'auxiliariat. Des dispositions
ont été prises pour permettre aux maîtres auxiliaires de se présenter à des concours spécifiques. Chaque année, 4 000
d'entre eux sont titularisés grâce à ces derniers mais aussi par la voie des concours externes et internes. Ainsi, 24 500
maîtres auxiliaires ont été titularisés et plus de 4 500 ont été reçus aux concours l'an dernier et feront leur rentrée comme
titulaires.
Le Sénat a adopté, le 30 octobre dernier, le projet de loi relatif à l'emploi dans la fonction publique et à diverses mesures
d'ordre statutaire qui va ouvrir aux maîtres auxiliaires justifiant d'au moins quatre années d'activité des possibilités
nouvelles d'accès à des corps de titulaires par des concours qui leur seront réservés.
Le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a veillé à ce que la situation des
maîtres auxiliaires ayant exercé au cours de l'année scolaire 1996-997 soit examinée avec un soin tout particulier par les
recteurs d'académie et qu'ils soient, dans toute la mesure des moyens budgétaires, renommés soit pour occuper des
postes vacants, soit pour assurer des remplacements.
Il faut souligner que le nombre de maîtres auxiliaires non réemployés aujourd'hui est sensiblement plus faible que celui qui
était constaté l'année dernière à la même époque de l'année scolaire puisqu'il est de 8 570 au lieu de 9 240. Ils
bénéficient, selon des procédures que M. François Bayrou a voulu allégées et accélérées, d'une allocation pour perte
d'emploi. Mais nombre d'entre eux se verront offrir, au cours de la présente année scolaire, des suppléances.
On ne peut laisser dire que ces maîtres auxiliaires constituent des « bouche-trous ». Cette expression est dévalorisante,
alors que ces enseignants assurent leur service avec dévouement, compétence et conscience professionnelle, même si
leurs conditions d'exercice ne sont pas comparables à celles des personnels titulaires.
Pour conclure, je rappelle que le budget de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche est la
priorité du Gouvernement, progresse de 2 % et représentera 324 milliards de francs en 1997.
Mme Nicole Borvo. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le secrétaire d'Etat, nous n'avons pas adopté le projet de loi relatif à l'emploi dans la
fonction publique et à diverses mesures d'ordre statutaire, parce qu'il ne correspond pas, selon nous, aux besoins même
s'il permettra de régler un certain nombre de situations individuelles.
Il n'est pas malheureux, permettez-moi d'employer cette expression familière, que les maîtres auxiliaires puissent percevoir
une allocation pour perte d'emploi. Toutefois, vous le savez comme moi, celle-ci est prélevée sur les crédits de
remplacement ; en conséquence, son financement pose problème.
Pour remédier à cette situation, nous l'avons dit et répété, il serait nécessaire de transformer au moins un tiers des 800
000 heures supplémentaires en postes. Nous sommes loin du compte. Au rythme actuel, la résorption de la situation
risque de durer des dizaines d'années. Une telle décision traduirait une réelle volonté de titularisation des personnels
précaires.
D'autre part, et nous l'avions aussi proposé, il nous semble indispensable que, parallèlement à une augmentation
substantielle des moyens pour mettre en oeuvre un enseignement de qualité, les conditions d'accès aux concours internes
et réservés soient assouplies. Ces concours devraient, par ailleurs, mieux prendre en compte l'expérience professionnelle
de ces enseignants et faciliter ainsi une titularisation qui mettrait fin à leur statut précaire.
En outre, nous avions également proposé d'instaurer une obligation d'organiser les concours réservés. L'Etat serait ainsi
obligé de fournir les moyens nécessaires à la création des postes correspondants à ces concours.
Ne pas instaurer cette obligation - et c'est bien là que pèche la loi - revient à tenir un double langage et tendrait à
démontrer que le Gouvernement refuse de prendre date sur le financement de la résorption de l'emploi précaire.
N'en doutez pas, le groupe communiste républicain et citoyen continuera d'agir, lors de l'examen du projet de loi de
finances, pour obtenir un budget de l'éducation nationale permettant de dispenser un enseignement de qualité, à la hauteur
des besoins des collégiens et des lycéens et, par là même, du personnel enseignant.

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