Question de M. RICHERT Philippe (Bas-Rhin - UC) publiée le 23/10/1996
M. Philippe Richert appelle l'attention de M. le ministre du travail et des affaires sociales sur les problèmes transfrontaliers pouvant apparaître dans le domaine sanitaire et social. Les législations et modalités en matière de reconnaissance sont en effet encore très différentes d'un pays à l'autre. Cela n'est pas sans poser certaines difficultés aux travailleurs frontaliers qui dépendent de deux systèmes de couverture sociale, celui du pays dans lequel ils exercent une activité professionnelle et celui du pays dans lequel ils résident de manière permanente. Ces disparités concernent de nombreux domaines, qu'il s'agisse de l'incapacité de travail, du handicap, de l'assurance-dépendance, du remboursement des prestations ou encore de l'achat de médicaments. Il souhaiterait connaître la position de M. le ministre face aux difficultés pouvant résulter d'une telle situation et les suites qu'il entend y réserver.
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Réponse du ministère : Emploi publiée le 13/11/1996
Réponse apportée en séance publique le 12/11/1996
M. Philippe Richert. Madame le ministre, je souhaite une nouvelle fois appeler l'attention du Gouvernement non
seulement sur la situation des travailleurs frontaliers, mais également sur les problèmes des aménagements des dispositifs
sociaux qui méritent, à mon sens, d'être pris.
Les législations et les modalités en matière de reconnaissance sont en effet encore très différentes d'un pays à l'autre.
Cette situation n'est pas sans poser certaines difficultés aux travailleurs frontaliers qui dépendent de deux systèmes de
couverture sociale, celui du pays dans lequel ils exercent une activité professionnelle et celui du pays dans lequel ils
résident de manière permanente.
Ces disparités concernent de nombreux domaines, qu'il s'agisse de l'incapacité de travail, du handicap, de
l'assurance-dépendance, du remboursement des prestations ou encore de l'achat de médicaments.
J'ai déjà eu l'occasion, à plusieurs reprises, d'insister sur ces éléments. Je souhaiterais, notamment dans le domaine du
mode de reconnaissance de l'incapacité de travail et dans celui de la cotisation de l'assurance dépendance, que nous
puissions progresser.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué pour l'emploi. Monsieur le sénateur, comme vous l'avez rappelé à
l'instant, les travailleurs frontaliers relèvent, par nature, de deux législations nationales. Il en résulte de nombreux
avantages, mais également des difficultés du fait des différences entre ces législations.
La coordination des législations nationales de sécurité sociale constitue l'un des axes de mise en oeuvre de la libre
circulation des travailleurs.
Elle se trouve réalisée par les règlements communautaires n° 1408/71 et 574/72, qui déterminent la législation applicable à
titre unique dans chaque cas, assurent l'égalité de traitement entre les travailleurs assurés sociaux sans référence à leur
nationalité ou à leur résidence et coordonnent, enfin, les conditions d'ouverture des droits et le service des prestations.
C'est dans ce cadre qu'il convient d'aborder les difficultés qui peuvent subsister et que vous situez, notamment, dans le
domaine des prestations en nature et des prestations d'invalidité.
Comme vous le savez, monsieur le sénateur, le Gouvernement suit avec attention la situation sociale des travailleurs
frontaliers, tant au Conseil qu'au sein de la commission administrative pour la sécurité sociale des travailleurs migrants.
Cette instance communautaire spécifique, composée des représentants des Etats membres, est chargée de traiter, à la
demande des Etats membres ou de la Commission européenne, de toute question d'interprétation ou d'application des
règlements préalablement cités. Elle donne son avis sur des propositions d'amélioration de ces règlements.
Depuis leur adoption, ceux-ci ont été constamment adaptés, élargis et améliorés, avec l'appui du Gouvernement français
ou grâce à ses initiatives, en dernier lieu par les règlements du 22 décembre 1995.
Bien évidemment, il s'agit d'un travail permanent, puisque cette commission est constamment saisie de nouveaux
problèmes. Nous pourrons ainsi nous assurer que ces nouveaux problèmes feront l'objet d'un traitement identique aux
précédents.
M. Philippe Richert. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert. Je vous remercie, madame le ministre, d'avoir pris l'assurance, au nom du Gouvernement, de
poursuivre sur la voie de la mise à plat de l'ensemble de ces difficultés. Afin de vous permettre de bien apprécier les
problèmes que rencontrent certains travailleurs frontaliers, je vous donnerai trois exemples.
Le premier concerne les divergences dans le mode de reconnaissance qui peuvent apparaître au niveau de l'incapacité de
travail. Il en va de même s'agissant de l'invalidité ou du handicap.
Les cas de figure les plus classiques concernent les personnes dont une incapacité de travail a été reconnue par les
services médicaux du pays dans lequel ils travaillent, mais ne l'est pas automatiquement par les services sociaux du pays
de résidence.
Ces personnes n'ont plus le droit de travailler alors que, dans leur pays de résidence, elle sont considérées comme aptes
au travail. Cette situation relève d'un vide juridique qu'il faudrait, à mon sens, combler rapidement.
Le deuxième exemple concerne les cotisations pour l'assurance dépendance.
La loi prévoit qu'en cas de travail frontalier les cotisations sociales sont versées dans le pays au sein duquel est exercée
l'activité salariale. Ainsi, depuis quelques années, les frontaliers français sont assujettis à une cotisation de 1 % du salaire
brut mensuel au titre de l'assurance dépendance, comme les travailleurs qui résident en Allemagne. Cependant, l'assurance
dépendance obéit à un principe de territorialité qui est fonction du lieu de résidence de l'assuré. Seuls peuvent donc en
bénéficier les salariés qui vivent sur le territoire allemand.
En conséquence, les travailleurs frontaliers français n'ont pas le droit de bénéficier d'une prestation pour laquelle ils ont
pourtant cotisé.
Le dernier exemple que je souhaite brièvement mettre en lumière concerne le remboursement des prestations médicales :
actuellement, les patients ne disposent pas de la liberté de pouvoir consulter le médecin ou l'hôpital de leur choix, les
caisses ne remboursant pas les soins courants délivrés à l'étranger.
Il paraîtrait souhaitable à cet égard, que le remboursement des soins des patients allemands en France, et vice versa,
puisse être réalisé sur la base d'un accord entre les diverses institutions. Un tel accord permettrait de généraliser aux
domaines de coopération mentionnés ci-dessus la réglementation relative aux prestations ambulatoires et hospitalières, qui
est à l'heure actuelle limitée aux frontaliers et aux touristes.
Il pourrait également s'appliquer s'agissant de l'achat de médicaments. Il arrive, en effet, qu'un médicament achété en
France par un résident allemand ne soit pas pris en compte par la caisse allemande, qui ne reconnaît pas encore les
médicaments conditionnés en France, même si ce type de produit existe également en Allemagne.
Je vous remercie, madame le ministre, de prendre en compte ces différentes situations dans les discussions que vous
menez à Bruxelles de façon que nous puissions progresser dans ces domaines.
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