Question de M. FOY Alfred (Nord - NI) publiée le 02/10/1996
M. Alfred Foy attire l'attention de M. le Premier ministre sur l'avenir des élèves de l'Ecole nationale des chartes (ENC). Depuis 175 ans, l'ENC a pour mission de recruter et de former les futurs conservateurs d'archives et de bibliothèques. Elle est complétée en cela depuis 1991 par les deux écoles d'application que sont l'Ecole nationale du patrimoine (ENP) et l'Ecole nationale supérieure des sciences de l'information et des bibliothèques (ENSSIB), l'une dépendant du ministère de la culture, l'autre du ministère de l'éducation nationale. Or, déjà, en novembre 1995, le nombre de postes ouverts aux concours de ces deux écoles d'application fut de 31 pour 37 chartistes. Six fonctionnaires stagiaires ne peuvent donc aujourd'hui exercer leurs fonctions, malgré d'éminentes qualités que chacun s'accorde à leur reconnaître, et cela par le seul fait d'une situation dont ils sont maintenant les premières victimes. Par ailleurs, qui peut affirmer avec certitude que la patrimoine de notre pays n'en sera pas demain la seconde ? De plus, cette année, les craintes sont encore plus fortes en raison du nombre élevé de chartistes (entre 46 et 57) qui présenteront en novembre 1996 ces mêmes concours. En effet, certaines prévisions font état de 19 postes à l'ENSSIB et de 4 seulement à l'ENP ; c'est donc plus de la moitié de la promotion sortante de l'ENC qui est menacée. Or, il n'est ni souhaitable ni normal que des fonctionnaires stagiaires, recrutés par un concours ardu, formés et payés par l'Etat pour faire d'eux les conservateurs du patrimoine national, se voient contraints de renoncer à cette mission pourtant indispensable. Par conséquent, il souhaiterait connaître ses intentions sur ce sujet, et plus particulièrement savoir quelles mesures il compte prendre, d'une part pour régler la situation des élèves actuels de l'Ecole nationale des chartes, et de l'autre pour éviter qu'à l'avenir de tels problèmes se reproduisent.
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Transmise au ministère : Culture
Réponse du ministère : Culture publiée le 16/10/1996
Réponse apportée en séance publique le 15/10/1996
M. Alfred Foy. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, ma question porte sur l'avenir des élèves de
l'Ecole nationale des chartes.
Depuis cent soixante-quinze ans, l'ENC a pour mission de recruter et de former les futurs conservateurs d'archives et de
bibliothèques. Elle est complétée en cela depuis 1991 par les deux écoles d'application que sont l'Ecole nationale du
patrimoine - ENP - et l'Ecole nationale supérieure des sciences de l'information et des bibliothèques - ENSSIB -, l'une
dépendant du ministère de la culture, l'autre du ministère de l'éducation nationale.
Or, déjà en novembre 1995, le nombre de postes ouverts aux concours de ces deux écoles d'application fut de trente et
un pour trente-sept chartistes. Six fonctionnaires stagiaires ne peuvent donc aujourd'hui exercer leurs fonctions, malgré
d'éminentes qualités que chacun s'accorde à leur reconnaître, et ce par le seul fait d'une situation dont ils sont maintenant
les premières victimes. Par ailleurs, qui peut affirmer avec certitude que le patrimoine de notre pays n'en sera pas demain
la seconde victime ?
De plus, cette année, les craintes sont encore plus fortes, en raison du nombre élevé de chartistes - quarante
probablement - qui présenteront en novembre 1996 ces mêmes concours. En effet, les dernières prévisions font état de
dix-neuf postes à l'ENSSIB et de cinq seulement en filière « archives » à l'ENP ; c'est donc près de la moitié de la
promotion sortante de l'Ecole nationale des chartes qui est menacée.
Or, il n'est ni souhaitable ni normal que des fonctionnaires stagiaires recrutés par un concours ardu, formés et payés par
l'Etat pour devenir les conservateurs du patrimoine national se voient contraints de renoncer à cette mission pourtant
indispensable.
Hier lundi, les élèves de l'Ecole nationale des chartes, soutenus par ceux de l'Ecole nationale du patrimoine, ont fait grève
et sont même venus manifester sous les fenêtres du ministère de la culture, afin d'attirer l'attention du Gouvernement sur les
grandes incertitudes qui pèsent sur leur avenir.
Par conséquent, je vous serais reconnaissant, monsieur le ministre, de bien vouloir me faire part de vos intentions sur ce
sujet, et plus particulièrement des mesures que vous comptez prendre, d'une part, pour régler la situation des élèves
actuels de l'Ecole nationale des chartes et, d'autre part, pour éviter que, à l'avenir, de tels problèmes ne se reproduisent.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la culture. La qualité scientifique et professionnelle des jeunes filles et des
jeunes gens qui, après une sélection rigoureuse, suivent la scolarité de l'Ecole nationale des chartes est connue de tous, et
vous avez eu raison, monsieur le sénateur, de la souligner. C'est en effet parmi eux - il faut le souligner avec force - que se
recrutent, pour la quasi-totalité, les conservateurs d'archives et, pour une large part, les conservateurs de bibliothèques.
La croissance constatée dans les effectifs de ces corps, notamment en raison de la création de la Bibliothèque nationale
de France, avait permis d'envisager des recrutements importants, qui furent à la source de l'accroissement, pendant
quelques années, du nombre d'élèves admis à suivre les enseignements dispensés à l'Ecole nationale des chartes, et
rémunérés pendant leur scolarité.
Or, monsieur le sénateur, la situation budgétaire, d'une exceptionnelle gravité, à laquelle a dû faire face cette année le
Gouvernement a imposé un effort de rigueur dont n'a été exempté aucun département ministériel, pas plus le ministère de
la culture que les autres.
De ce fait, cinq postes seulement ont pu être ouverts pour le concours externe d'entrée à l'Ecole nationale du patrimoine
réservé, pour la spécialité « archives », aux élèves sortant de l'Ecole nationale des chartes.
Il n'est pourtant pas question de se priver de compétences aussi spécialisées que celles qu'ont pu acquérir les élèves
sortant de l'Ecole nationale des chartes. Si ceux-ci n'ont pas de droits acquis à être recrutés dans les corps de
fonctionnaires de l'Etat, il est évident que l'Etat et les collectivités publiques se doivent de leur faciliter l'accès à la fonction
publique.
Je me félicite, à cet égard, de constater que le ministre chargé de l'enseignement supérieur ait pu, conformément à une
demande ancienne de mon département ministériel, augmenter sensiblement la proportion de postes réservés, à l'entrée du
concours de conservateurs de bibliothèques, aux élèves issus de l'Ecole nationale des chartes. Le ministère de la culture
est, en effet, essentiellement dans les départements spécialisés de la Bibliothèque nationale de France, le premier
employeur de ces chartistes dont il apprécie la rigueur scientifique comme la compétence intellectuelle et professionnelle.
Mais on doit aussi se réjouir de constater l'effort de diversification réalisé par l'Ecole nationale des chartes, avec l'appui
des ministères intéressés. En témoigne le taux élevé de réussite aux concours d'agrégation d'élèves sortant de cette école.
Des capacités d'emploi existent également auprès des collectivités locales, qu'il convient d'inciter à faire davantage appel
aux capacités scientifiques des chartistes, notamment lorsqu'elles possèdent des fonds d'archives conséquents et précieux.
Je me suis battu - je viens d'ailleurs d'obtenir satisfaction de la part du Premier ministre - pour que la liste des fonctions
susceptibles d'être occupées, au sein des collectivités locales, par des conservateurs du patrimoine de la spécialité «
archives » soit sensiblement allongée et soit surtout adaptée à la réalité des demandes des élus. Cette liste, qui sera bientôt
publiée, comptera vingt-deux postes dans cette spécialité.
J'espère vivement que villes et départements sauront, demain, apprécier les qualités des élèves sortant de l'Ecole des
chartes, comme l'Etat le fait depuis plus d'un siècle et demi.
M. Alfred Foy. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Foy.
M. Alfred Foy. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Je souhaite que, dans un avenir quelque peu
meilleur, ces gens de haut niveau, extrêmement spécialisés, puissent enfin obtenir satisfaction. Je sais que nous pouvons
compter sur vous et sur le Gouvernement tout entier.
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