Question de M. MARQUÈS René (Pyrénées-Orientales - UC) publiée le 11/06/1996
M. René Marquès attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les conséquences des modalités d'application de la dotation générale de décentralisation. Il lui rappelle que les départements, pour lesquels le calcul de cette dotation laisse apparaître un solde négatif, sont soumis à un prélèvement de la somme correspondante sur le produit de leur taxe différentielle sur les véhicules à moteur. Il lui indique, en effet, que le principe de ce prélèvement présente - outre son esprit contraire aux règles de la comptabilité publique qui interdit toute contraction entre dépenses et recettes - de nombreux inconvénients : il complique l'élaboration des prévisions budgétaires en faisant peser une incertitude sur le montant des recettes attendues ; il introduit une opacité dans la lecture des comptes ainsi que des distorsions dans les ratios de gestion des collectivités concernées, faussant en conséquence les comparaisons interdépartementales. Il lui demande, en conséquence, s'il ne serait pas possible de revoir les modalités d'application de la DGD en cas de solde négatif, en particulier par l'inscription d'une ligne budgétaire spécifique.
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Transmise au ministère : Fonction publique
Réponse du ministère : Transports publiée le 26/06/1996
Réponse apportée en séance publique le 25/06/1996
M. René Marquès. Je tiens à attirer l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation sur les conséquences des modalités d'application de la dotation générale de décentralisation.
Les départements, pour lesquels le calcul de cette dotation laisse apparaître un solde négatif, sont soumis à un
prélèvement de la somme correspondante sur le produit de leur taxe différentielle sur les véhicules à moteur, c'est-à-dire
la vignette.
Le principe de ce prélèvement présente, outre son esprit contraire aux règles de la comptabilité publique qui interdit toute
contraction entre dépenses et recettes, de nombreux inconvénients : d'une part, il complique l'élaboration des prévisions
budgétaires en faisant peser une incertitude sur le montant des recettes attendues et, d'autre part, il introduit une opacité
dans la lecture des comptes ainsi que des distorsions dans les ratios de gestion des collectivités concernées, faussant en
conséquence les comparaisons interdépartementales.
En conséquence, ne serait-il pas possible de revoir les modalités d'application de la dotation générale de décentralisation
en cas de solde négatif, en particulier par l'inscription d'une ligne budgétaire spécifique ?
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'Etat aux transports. Etant dans l'obligation d'assister à une réunion importante,
M. Perben m'a chargée de vous communiquer les éléments de réponse les plus complets possible à la question assez
complexe que vous lui avez posée.
Cette question comporte en fait deux aspects. Il s'agit, d'une part, de l'incertitude que feraient peser sur les budgets locaux
les modalités de calcul de la dotation générale de décentralisation et, d'autre part, de l'inscription comptable de cette
dotation ou du prélèvement fiscal qui en tient lieu.
S'agissant des modalités de calcul, il est utile de rappeler que la dotation générale de décentralisation n'est pas une
dotation comme une autre. Elle a vocation à assurer une neutralité financière des partages de compétences entre l'Etat et
les collectivités locales.
En effet, le financement des accroissements de charges, ou « droit à compensation », résultant des transferts de
compétences est assuré, pour partie, par des ressources fiscales transférées aux collectivités et, pour le solde, par
transfert de ressources budgétaires, la dotation générale de décentralisation.
Si le produit des impôts transférés, apprécié à la date du transfert, est inférieur au montant du droit à compensation, la
dotation générale de décentralisation couvre la différence. Dans l'hypothèse inverse, il est procédé à un prélèvement sur le
produit de l'impôt transféré, de telle sorte que la compensation financière n'excède pas les accroissements de charges
résultant du transfert.
Pour la première année de sa mise en oeuvre, la dotation générale de décentralisation est donc un solde, positif ou négatif,
sur lequel viennent ensuite s'imputer, année après année, soit les nouveaux transferts de fiscalité ou de compétences, soit
les partages financiers des services.
Ce solde est ensuite indexé chaque année sur le taux de croissance de la dotation globale de fonctionnement.
On ne peut donc pas soutenir que les modalités de calcul de la dotation générale de décentralisation ou du prélèvement
sur le produit de la fiscalité transférée diminuent la prévisibilité des budgets locaux. Bien au contraire, la dotation générale
de décentralisation, positive ou négative, est la seule dotation, avec la dotation forfaitaire de la dotation globale de
fonctionnement, qui évolue ainsi de manière automatique sans qu'intervienne un élément physique ou financier.
Il est vrai que la dotation générale de décentralisation, positive ou négative, résulte de l'addition de deux éléments. Le
premier a pour objet de compenser les transferts de compétences intervenus depuis le 1er janvier 1984. Il est stable, ainsi
que nous venons de le voir.
Le second élément retrace le solde des mouvements financiers résultant de la mise en oeuvre du partage des services tel
qu'il a été prévu par la loi n° 85-1098 du 11 octobre 1985. Il est généralement évolutif d'une année sur l'autre en raison
des mécanismes de régularisation des mouvements de personnel et se traduit le plus souvent par un prélèvement sur la
dotation générale de décentralisation.
Il faut toutefois souligner qu'à cet élément de perturbation et de diminution du niveau de la dotation générale de
décentralisation correspond, en fait, une baisse équivalente des charges transférées puisque les dépenses de personnel
sont alors transférées à l'Etat.
Au total, M. Perben estime qu'il n'existe aucune incertitude, à l'occasion de l'élaboration du budget, sur l'évolution de la
dotation générale de décentralisation, positive ou négative, nette des mouvements de personnels qui sont budgétairement
neutres pour les départements.
S'agissant du traitement comptable des départements dits « surfiscalisés », je tiens là aussi à vous apporter des précisions
complètes.
Le montant des crédits inscrits sur les lignes budgétaires réservées aux impôts transférés, notamment les droits de
mutation et la taxe sur les véhicules à moteur, correspond à ceux qui sont effectivement perçus par la collectivité. Ce
procédé ne transgresse en rien le principe de la comptabilité publique de non-contraction entre les dépenses et les
recettes. En effet, le prélèvement sur la fiscalité, effectué à la source, est non pas une charge supportée par la collectivité,
mais un ajustement permettant de ne fournir à celle-ci que son juste dû. Inscrire en recette le montant total de la fiscalité
levée sur le territoire de la collectivité et en dépense le montant du prélèvement opéré reviendrait, en réalité, à majorer
fictivement le niveau général du budget.
Cette dernière méthode aurait des incidences néfastes sur les ratios de gestion. Elle ne permettrait plus la comparaison
entre les départements à dotation générale de décentralisation négative - les « surfiscalisés » - et ceux à dotation générale
de décentralisation positive. L'inscription du prélèvement sur une ligne budgétaire, sauf, le cas échéant, pour information,
est donc à proscrire.
Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments que M. Perben souhaitait vous apporter à titre de clarification.
M. René Marquès. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Marquès.
M. René Marquès. Madame le sécrétaire d'Etat, je vous remercie de ce brillant exposé de comptabilité publique, mais
sachez qu'il ne répond malheureusement pas tout à fait à la question que j'ai posée. En effet, mon département, beaucoup
plus que d'autres, connaît de sérieuses difficultés au niveau des charges sociales. D'ailleurs, vous le savez bien pour être
déjà venue dans les Pyrénées-Orientales. Nous comptons donc beaucoup sur le produit de la taxe sur les véhicules à
moteur.
La part de l'Etat dans l'équilibre, que vous avez si bien démontré, de la dotation générale de décentralisation positive ou
négative conduit, dans ce cas précis, à des soustractions. Nous aurions souhaité que cette imputation soit opérée à un
autre niveau et pas sur le montant relatif du produit de la taxe sur les véhicules à moteur. Pourquoi ? Parce que nous
connaissons un autre problème, à savoir que la rentabilité, si l'on peut dire, de cette taxe diminue de plus en plus dans les
Pyrénées-Orientales. En effet, nous sommes un département frontalier et de nombreux automobilistes vont acheter de
grosses cylindrées à moteur Diesel en Espagne. Il est tout de même anormal que des propriétaires d'engins qui coûtent
des centaines de milliers de francs paient une taxe comparable à celle qu'acquittent les propriétaires de plus petits
véhicules à essence.
C'est la raison pour laquelle nous nous sommes émus de cette situation.
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