Question de M. MÉLENCHON Jean-Luc (Essonne - SOC) publiée le 28/03/1996
M. Jean-Luc Mélenchon attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la politique de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) en matière d'octroi du statut de réfugié. Alors que près de 26 000 demandes d'asile avaient été enregistrées en 1994, seuls 19 000 candidats se sont présentés au cours des onze premiers mois de l'année 1995. Or, tandis qu'en 1994 7 025 cartes avaient été délivrées, l'OFPRA n'en a accordé que 2 825 en 1995, résultat sans équivalent depuis 1974. Si l'on rapporte ce chiffre aux 24 421 décisions rendues, le taux de réponses positives n'est donc que de 11,56 p. 100 contre 23,65 p, 100 en 1994. Il semble que ce taux exceptionnellement bas s'explique en partie par une interprétation extrêmement restrictive de la Convention de Genève. Or le Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) a émis les plus vigoureuses réserves sur cette interprétation, y décelant même " une menace sur le droit d'asile ". L'OFPRA ne reconnaît de droit à l'asile que lorsque " l'agent de persécution " est un Etat, sa police ou son armée, ou un groupe dont les agissements sont encouragés ou autorisés par le pouvoir. Mais, dans de nombreux pays, l'Etat se contente de rester inactif. La France faillirait à son devoir et aux principes républicains si elle refusait d'accueillir les victimes de persécutions émanant de l'opposition comme en Algérie ou les ressortissants d'un pays dont l'autorité centrale a complètement disparue comme c'est le cas en Somalie ou au Libéria par exemple. Il s'inquiète de ces remises en cause de fait du droit d'asile, alors que celui-ci est un principe essentiel, et souhaite connaître l'avis de M. le ministre sur cette question.
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Transmise au ministère : Affaires étrangères
Réponse du ministère : Intérieur publiée le 02/05/1996
Réponse. - Les informations dont dispose l'honorable parlementaire peuvent être ainsi complétées pour couvrir la totalité de l'année 1995 : 1o20 415 premières demandes ont été déposées à l'OFPRA en 1995, qui a accordé 4 742 certificats de réfugiés pour 29 096 décisions rendues, soit un taux d'accord de 16,23 p. 100. Le pourcentage a déjà été inférieur dans le passé. Il n'est besoin que de remonter en 1990 où il avait été de 15,44 p. 100 ; 2oL'évolution de ce taux s'explique par une modification des courants migratoires et non par une interprétation restrictive dans l'application de la Convention de Genève par l'OFPRA, qui applique cette convention internationale sous le contrôle de la juridiction administrative, sans avoir infléchi sa doctrine ou interprété d'une manière particulière la jurisprudence. L'application de la Convention de Genève par la France, notamment en ce qui concerne " l'agent de persécution ", résulte d'une jurisprudence constante et ancienne du Conseil d'Etat (arrêt Dankha du 27 mai 1983) qui n'a pas varié depuis lors. En ce qui concerne la position du haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés, l'honorable parlementaire notera que cet organisme est présent dans le conseil d'administration de l'office, nomme l'un des juges de la commission des recours des réfugiés et aurait donc tous les moyens de faire connaître son sentiment s'il différait de celui des pouvoirs publics français ; 3o La France ne faillit donc pas à son devoir d'accueil des victimes de persécution. Elle est le pays le plus ouvert de l'Union européenne à cet égard. Notre taux de reconnaissance (16,23 p. 100) peut aisément se comparer à ceux de l'Allemagne (11,7 p. 100), du Royaume-Uni (4,8 p. 100), de la Belgique (10 p. 100), des Pays-Bas (11,4 p. 100) et du Danemark (11,9 p. 100), par exemple.
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