Question de M. HAMEL Emmanuel (Rhône - RPR) publiée le 22/02/1996

M. Emmanuel Hamel signale à l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, que la consommation des drogues dites douces est en nette augmentation. Il lui rappelle que, selon un sondage de la SOFRES, 15 p. 100 des hommes et 7 p. 100 des femmes déclarent avoir goûté au moins une fois au cannabis et chez les dix-huit - vingt-quatre ans 34 p. 100 chez les garçons et 13 p. 100 chez les filles. Selon les estimations à 4, 5 p. 100 des fumeurs de drogues douce passent aux drogues dures (source : Le Monde du 31 janvier 1996, page 21). Il lui demande s'il a pris contact avec le secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale pour un bilan objectif des effets médicaux de la consommation de cannabis et si, compte tenu des enquêtes qu'il va susciter, la législation des stupéfiants va être modifiée et, s'il s'avérait que cette modification intervienne, dans quel sens le sera-t-elle.

- page 380


Réponse du ministère : Justice publiée le 18/04/1996

Réponse. - Le garde des sceaux a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire que le gouvernement, particulièrement conscient du développement de la toxicomanie et de la nécessié d'y apporter une réponse pluri-disciplinaire, a notamment souhaité un renforcement des procédures permettant d'offrir une alternative sanitaire aux usagers interpellés. Le 28 avril 1995, une circulaire élaborée conjointement par les ministères de la justice, des affaires sociales et de la santé a relancé ces mesures. Ainsi, le procureur de la République peut renoncer à l'exercice des poursuites à l'encontre d'un usager après lui avoir adressé un avertissement permettant un rappel solennel à la loi et invitant par ailleurs l'intéressé à prendre contact avec une institution ou une association spécialisée dans la prise en charge des toxicomanes. Cet avertissement peut être assorti d'un signalement à la direction départementale des affaires sanitaires et sociales. Ce type de mesure s'adresse généralement au consommateur occasionnel. La procédure de l'injonction thérapeutique, dont le nombre a progressé de 6 149 en 1993 à 7 675 en 1994, permet au procureur de la République d'enjoindre à l'usager de se soumettre à des soins aux fins de désintoxication. Le suivi thérapeutique de la mesure est assuré par un médecin agréé par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales. Si l'intéressé respecte cette obligation, il n'est pas poursuivi. S'agisssant des usagers de cannabis, cette mesure s'adresse plus particulièrement à ceux qui en font une consommation massive, répétée et associée à d'autre produits (alcool, médicaments...). Il faut rappeler que pour 59 p.100 des usagers faisant l'objet de cette mesure, il s'agit de l'occasion d'un premier contact avec les institutions sanitaires et sociales. L'obligation de se soumettre à des soins peut être ordonnée à tous les stades de la procédure judiciaire, au titre d'alternative à l'incarcération. Le juge d'instruction peut la prononcer dans le cadre du placement sous contrôle judiciaire. La juridiction de jugement peut assortir une condamnation d'une mise à l'épreuve comportant une obligation de soins. Il en est de même à l'occasion de l'aménagement des peines, sous la forme de la libération conditionnelle. Le gouvernement a également souhaité renforcer le dispositif de prise en charge sanitaire et sociale des toxicomanes relevant de la justice. Cette orientation s'est traduite par la conclusion de conventions d'objectifs dans les départements prioritaires pour la politique de la ville entre les représentants de l'autorité judiciaire et ceux de l'administration des affaires sanitaires et sociales. Ces efforts se sont poursuivis depuis par l'augmentation constante des crédits alloués aux conventions par la délégation générale à la lutte contre la drogue et la toxicomanie (environ 5 millions de francs en 1993, 10 millions de francs en 1994 et 15 millions de francs en 1995). Les textes actuellement en vigueur permettent donc une double approche de la lutte contre la toxicomanie. L'interdit pénal que constitue l'incrimination de l'usage exerce un effet dissuasif à l'égard de la population, et notamment des plus jeunes. Par ailleurs, une réponse alliant les aspects judiciaires, sanitaires et sociaux est apportée à la consommation de produits stupéfiants, et notamment de cannabis. C'est pourquoi, il n'est pas envisagé en l'état de modification de la législation sur cette question.

- page 952

Page mise à jour le