Question de M. ROCCA SERRA Jacques (Bouches-du-Rhône - R.D.E.) publiée le 27/07/1995
M. Jacques Rocca Serra appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation sur les critiques dont l'Office national des forêts fait l'objet dans la gestion de certains domaines forestiers. Il prend à cet effet l'exemple de la forêt domaniale de Tronçais (10 600 hectares), de renommée internationale et plus grande chênaie d'Europe, pour laquelle de nombreuses associations scientifiques et de protection de la nature ont lancé un appel considérant que l'ONF pratique une gestion à court terme qui menace gravement la pérennité de la diversité de la faune et de la flore. Pour des considérations techniques et financières, il semble que l'ONF surexploite ce patrimoine forestier, les vieilles futaies, autrefois diversifiées en essences végétales rares, s'effaçant peu à peu devant une monoculture d'arbres plus jeunes à faible densité. Les plantations succèdent aux régénérateurs naturelles. L'enrésinement de vastes surfaces s'accentue. Les maisons forestières sont détruites. Un certain nombre d'espèces animales sont menacées de disparition (aigle botté, circaète jean-le-blanc, ...) et on semble vouloir réduire le cerf a une simple présence symbolique. Fort de cet exemple, il souhaiterait savoir si l'ONF ne faillit pas parfois à sa mission qui est de préserver la richesse du patrimoine sylvicole de notre pays lequel nous est le plus souvent légué par les siècles.
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Réponse du ministère : Agriculture publiée le 07/11/1995
Réponse. - La forêt de Tronçais est l'une des plus grandes et des plus prestigieuses chênaies d'Europe. Elle est depuis des siècles l'objet d'une gestion continue et particulièrement attentive de la part de l'Administration des eaux et forêts, puis de l'Office national des forêts, ce qui explique la qualité de son état actuel. L'objectif poursuivi est le maintien de la qualité et de l'équilibre de la forêt de Tronçais. Il convient de rappeler que les actions sylvicoles engagées dans ce massif, comme dans les autres forêts domaniales, sont réalisées en application d'un document d'aménagement soumis à l'approbation du ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation, rédigé pour une durée de quinze à vingt ans et régulièrement révisé lorsque sa période d'application expire. Cette révision vient d'intervenir pour la forêt de Tronçais, et les objectifs fixés pour la gestion sont très explicites. Le nouvel aménagement forestier donne une place prééminente à l'objectif de maintien de la biodiversité en forêt, tout en y intégrant les contraintes liées à la haute valeur historique et symbolique des vieilles futaies créées par Colbert, responsable du département des bois en 1661. En particulier, au niveau des analyses préalables à l'aménagement, des investigations écologiques poussées ont été réalisées sur l'avifaune, les mammifères, la flore et la typologie des stations forestières afin de maintenir la biodiversité et les écotypes. Ces différentes analyses ont permis de dégager les grands axes de gestion suivants : création de plusieurs séries de gestion feuillue à dominante chêne, dont une à la rotation de 250 ans avec certains peuplements maintenus jusqu'à 300 ans, afin d'assurer le maintien et le renouvellement des futaies de chêne qui ont fait la renommée de Tronçais ; création d'une réserve intégrale de 100 hectares, afin de favoriser les connaissances et l'observation scientifique sur l'évolution des écosystèmes concernés ; prise en compte forte de contraintes paysagères dans les très vieilles futaies ; préservation et mesures de gestion des espèces animales les plus remarquables, en particulier de onze espèces de chiroptères. Les règles de gestion appliquées à Tronçais ne relèvent en aucun cas d'une gestion à court terme mais, tout au contraire, d'un ensemble de dispositions sur le très long terme, qui permettront d'assurer la pérennité de la forêt et de ses potentialités biologiques, avec des mesures particulières de protection des espèces les plus fragiles.
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