Question de M. LE JEUNE Edouard (Finistère - UC) publiée le 23/02/1995
M. Edouard Le Jeune attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la francophonie sur l'étonnement et la vive émotion qu'a suscités la nomination au grade de chevalier de la Légion d'honneur d'un éditeur producteur qui fait actuellement l'objet de poursuites judiciaires à la suite de l'édition de l'ouvrage " Suicide mode d'emploi ", et ce, en violation de la loi no 87-1133 du 31 décembre 1987 tendant à réprimer la provocation au suicide. L'ouvrage édité par l'intéressé a conduit un nombre considérable de personnes, jeunes pour la plupart, à se donner la mort. Il serait souhaitable que l'image de la Légion d'honneur ne soit pas ternie par des nominations très légèrement accordées, sans réelle justification, à des personnes n'ayant pas rendu de services incontestables ou même ayant failli aux vertus républicaines. C'est pourquoi et afin de lever toute ambigüité sur la nature même de cette distinction, il lui demande de bien vouloir lui préciser quels critères ont permis à cet éditeur d'être promu au grade de chevalier de la Légion d'honneur.
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Réponse du ministère : Culture publiée le 23/03/1995
Réponse. - Le parcours de M. Alain Moreau dans l'édition française ne se limite pas à la publication du livre incriminé, " Suicide mode d'emploi ", publié en 1982. Au moment où la proposition de nomination de M. Moreau au grade de Chevalier dans l'ordre national de la Légion d'honneur a été établie, l'intéressé qui n'est plus éditeur bénéficiait d'un casier judiciaire vierge et il ne pouvait lui être indéfiniment reproché d'avoir, publié jadis un livre que d'aucuns jugèrent contestable. En outre, la carrière de M. Moreau dans la production audiovisuelle était de nature à justifier une reconnaissance pour le travail qu'il avait effectué à la tête de " Caméra continentale " en faveur de la création de fiction, à un moment où la production française et européenne se voyait sévèrement minée par la concurrence américaine. Cependant, un élément nouveau, postérieur aux décisions prises apparaît : l'éditeur et les auteurs comparaissent devant la 16e chambre correctionnelle dans le cadre d'une poursuite engagée après une réédition de ce livre en 1989. Si les valeurs républicaines déterminent en France une totale liberté en matière de presse et d'édition dans le cadre des lois existantes, contrevenir aux dispositions légales, en matière d'initiation au suicide, en violation de la loi du 31 décembre 1987, expose auteurs et éditeurs aux sanctions pénales prévues par la loi. De ce fait, le ministre de la culture et de la francophonie a donc demandé au grand chevalier de la Légion d'honneur l'application de l'article 49 du code de la Légion d'honneur, prévoyant une nouvelle vérification des qualifications du bénéficiaire dans l'intérêt de l'ordre notamment dans l'attente du jugement qui sera rendu au mois d'avril.
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