Question de M. MARINI Philippe (Oise - RPR) publiée le 07/07/1994

M. Philippe Marini appelle l'attention de M. le ministre de l'économie sur le décret no 94-376 du 14 mai 1994, qui modifie le code des assurances quant à ses dispositions relatives à l'assurance pour le compte de l'Etat des risques liés aux échanges internationaux. En son article R. 332-7-1, il stipule que : " La garantie délivrée pour le compte de l'Etat ne porte en aucun cas sur les risques qui, en application de la législation en vigueur et compte tenu des usages courants du marché de l'assurance, peuvent être couverts par des sociétés, groupements ou organismes quelconques habilités à pratiquer en France l'assurance contre les risques ordinaires ou de guerre. " Or, depuis 1986, dans le cadre de ce qui s'est d'abord appelé le pool PARIS, devenu au 1er janvier 1994 la compagnie d'assurances Unistrat Assurances, a été entamé un développement de l'assurance de marché pour les risques politiques liés aux échanges internationaux. La Compagnie française d'assurances pour le commerce extérieur (COFACE) détient 25,5 p. 100 du capital de cette nouvelle compagnie. Ce faisant, le marché français de l'assurance ne faisait que rattraper le retard pris vis-à-vis de ses concurrents des marchés anglais ou américains, qui pratiquent ce type de couverture depuis vingt ans. Cet essor ne vise nullement à nuire aux organismes publics existant dans l'ensemble des pays européens depuis l'après-guerre, mais à prendre en compte les évolutions du commerce international (multilatéralisation, stratégies multinationales) qui limitent de facto le champ d'intervention des acteurs publics. On pouvait espérer, compte tenu de cette ouverture, que l'Etat accepte d'éliminer progressivement les distorsions de concurrence résultant du simple fait que dès lors qu'un exportateur a le choix entre une couverture COFACE et une couverture de marché, il a tendance à préférer la première, qui lui paraît plus attractive, non seulement de par la sécurité de la signature, mais également par les conditions tarifaires, souvent très favorables, qui lui sont consenties. Pour ce faire, il eût fallu que le décret instaurât la préférence de marché, imposant à l'Etat de n'intervenir qu'en cas de refus par le marché. Rien de tel ne ressort du nouveau texte. De ce fait, nombre de réassureurs internationaux refusent de participer aux risques concernés, ce qui limite le développement potentiel du marché, et le cantonne à un rôle marginal de marché de dernière chance. Face à cette situation, les assureurs de marché, et notamment Unistrat, avaient, dès avril 1993, proposé à différentes autorités financières, qu'il s'agisse du directeur du Trésor ou de différents membres du cabinet du ministère de l'économie et des finances, que soit organisé un groupe de travail réunissant représentants de l'Etat (Trésor, Direction des relations économiques extérieures (DREE)), des assureurs publics (COFACE), des assureurs et réassureurs de marché (Unistrat, Société commerciale de réassurance (SCOR)...), afin de déterminer dans quelles conditions pourrait s'organiser le partage de certains risques, de façon à favoriser l'ouverture du marché sans accroître le fardeau budgétaire de l'Etat. Une des voies à explorer consisterait à mettre en place une réassurance sélective permettant à l'Etat d'assumer certains grands risques catastrophiques qui ne peuvent être absorbés par le marché, tout en laissant à la charge de ce dernier la masse des risques courants. Telle n'a pas été la voie suivie par le décret précité. Il paraît dommage pour notre pays de ne pas profiter de la circonstance favorable que représente la ; privatisation des entreprises d'assurances pour remettre à plat le système d'assurance-crédit à l'exportation et le faire évoluer dans un sens conforme à l'intérêt général, puisqu'il est admis que l'intervention du marché ne s'effectuerait pas au détriment de l'Etat mais, au contraire, à l'avantage de l'exportation en général. Enfin, on peut s'interroger sur la cohérence des choix effectués : si la volonté exprimée de l'Etat est de maintenir une forme déguisée de monopole sur l'assurance-crédit à l'exportation, on est surpris de constater que, dans le même temps, la COFACE a investi dans une société de marché, Unistrat Assurances, avec la bénédiction de l'autorité de tutelle. C'est pourquoi il lui est demandé de bien vouloir expliciter la politique suivie par les pouvoirs publics en la matière, et les objectifs recherchés.

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Réponse du ministère : Économie publiée le 06/10/1994

Réponse. - Il n'entre pas dans l'objet du décret du 14 mai 1994 de modifier la définition des risques couverts par la COFACE pour le compte de l'Etat, mais simplement d'adapter les dispositions du code des assurances relatives à la COFACE à son nouveau statut d'entreprise privée. Dans le cadre, toujours en vigueur, de l'article 16 de la loi no 49-874 du 5 juillet 1949 qui autorise l'Etat à accorder sa garantie à la COFACE, cette société continue d'assurer, pour le compte de l'Etat, contre des risques définis par décret en Conseil d'Etat. Le passage de la COFACE au secteur privé n'induit nullement que la définition de ces risques soit modifiée. Ainsi, les nouveaux articles R. 442-8-1 à R. 442-10-5 qui définissent les risques couverts avec la garantie de l'Etat se contentent de reprendre à l'identique les dispositions des articles R. 432-24 à R. 432-45 de l'ancien code des assurances, moyennant la clarification de quelques dispositions vieillies. L'article R. 442-7-1 du code des assurances auquel il est fait référence n'a pas été substantiellement modifié par le décret du 14 mai 1994 qui reprend, à une modification de pure forme près, la rédaction de l'ancien article R. 432-22. Les très anciennes dispositions de cet article (elles remontent au décret no 48-719 du 16 avril 1948) témoignent de ce que l'Etat, en acceptant de prendre à sa charge la couverture de certains risques liés aux échanges internationaux, n'a pas voulu nuire à la liberté du commerce et de l'industrie. Ainsi, des assureurs-crédits demeurent libres de proposer à leurs clients des produits de marché les assurant contre les risques définis par les articles R. 442-8-1 à R. 442-10-5 dudit code. S'agissant des risques politiques auxquels se rapporte l'activité d'UNISTRAT Assurances, le régime de leur couverture par la COFACE, pour le compte de l'Etat a été modifiée, dans la période récente, par le décret du 22 mars 1991 ; ce décret faisait suite à la décision du min istre de l'économie, des finances et du budget du 15 novembre 1989 d'adapter l'activité de la COFACE à la directive européenne relative à la libre prestation de services, entrée en vigueur le 1er juillet 1990 : moyennant une modification de son objet social, la COFACE a été ainsi autorisée à assurer, pour son propre compte, contre le risque politique sur les pays de la CEE. Les produits qu'elle offre à ses clients dans ce domaine sont des produits de marché ; la garantie de l'Etat sur d'autres catégories de risques n'entraîne à ce titre aucune distorsion de concurrence puisque toutes les opérations y afférent sont retracées dans un compte distinct de la comptabilité de la COFACE. Il n'y a actuellement aucune raison de modifier la définition des risques couverts par la COFACE pour le compte de l'Etat : les capacité limitées du marché de la réassurance ne permettraient pas à des assureurs-crédits privés de couvrir les risque actuellement garantis par l'Etat. La crise que le marché de la réassurance a traversé en 1993 a montré ces limites, notamment dans le domaine des risques politiques. Ainsi, la garantie de l'Etat octroyée via la COFACE se substitue au marché, pour les catégories de risques pour lesquels l'offre de réassurance est faible ou inexistante ; l'honorable parlementaire suggère que le code des assurances autorise l'Etat à n'intervenir pour couvrir un risque qu'en cas de refus du marché ; l'application d'un tel principe reviendrait à ne faire porter par l'Etat que les plus mauvais risques, parmi ceux qu'il couvre de sa garantie ; il risquerait d'en résulter un accroissement du besoin de financement budgétaire de l'assurance-crédit, alors que ce besoin s'est considérablement réduit au cours des dernières années ; le processus d'harmonisation européenne des systèmes d'assurance-crédit à moyen terme conduira sans doute à une définition des risques que le marché peut prendre en charge, définition commune à tous les Etats membres de l'Union européenne. Dans l'attente du dénouement de ce processus, il serait peu opportun de modifier le dispositif français ; s'agissant de la participation de la COFACE dans la société UNISTRAT, ses motifs ont été définis dans le cadre d'une stratégie d'ensemble qui, avant la privatisation, avait reçu l'entière approbation de la tutelle : il s'agissait notamment, dans la continuité de la participation au pool PARIS, de faire accéder la COFACE au marché européen de l'assurance-crédit et d'améliorer son expertise dans le domaine du risque politique ; cette stratégie est aujourd'hui conduite sous la responsabilité des actionnaires de la COFACE. ; garantie ; il risquerait d'en résulter un accroissement du besoin de financement budgétaire de l'assurance-crédit, alors que ce besoin s'est considérablement réduit au cours des dernières années ; le processus d'harmonisation européenne des systèmes d'assurance-crédit à moyen terme conduira sans doute à une définition des risques que le marché peut prendre en charge, définition commune à tous les Etats membres de l'Union européenne. Dans l'attente du dénouement de ce processus, il serait peu opportun de modifier le dispositif français ; s'agissant de la participation de la COFACE dans la société UNISTRAT, ses motifs ont été définis dans le cadre d'une stratégie d'ensemble qui, avant la privatisation, avait reçu l'entière approbation de la tutelle : il s'agissait notamment, dans la continuité de la participation au pool PARIS, de faire accéder la COFACE au marché européen de l'assurance-crédit et d'améliorer son expertise dans le domaine du risque politique ; cette stratégie est aujourd'hui conduite sous la responsabilité des actionnaires de la COFACE.

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