Question de M. GUYOMARD Bernard (Paris - UC) publiée le 18/11/1993
M. Bernard Guyomard expose à M. le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, qu'un climat conflictuel s'est instauré en certaines régions, au sein du milieu professionnel des taxis à propos de la prise en charge des clients à la sortie des gares ferroviaires. Les exploitants, qui sont dûment habilités à exercer dans les communes sur le territoire desquelles existent des gares, soutiennent que les autorisations de stationner qui leur sont délivrées leur donnent une exclusivité pour attendre les clients sur les emplacements matérialisés à cet effet dans les cours des gares. Ils fondent leur point de vue non seulement sur les termes des arrêtés municipaux qui réglementent leurs activités selon l'article 3 du décret no 73-225 du 2 mars 1973 et délimitent, en particulier, les zones de prise en charge mais aussi sur la signalisation dont font l'objet les emplacements en question. Leurs collègues qui exploitent des taxis dans des communes voisines dépourvues de gares estiment être en droit de venir les concurrencer en stationnant dans les cours des gares pour y attendre la clientèle, considérant que les arrêtés municipaux sus-évoqués sont illégaux parce que méconnaissant le principe d'égalité qui, selon eux, régit l'ensemble des professionnels des taxis pour le stationnement dans les cours des gares, que celles-ci soient propriétés de la SNCF ou des communes. Ils s'appuient, pour justifier leur manière de voir sur le décret no 730 du 22 mars 1942 relatif à la police, la sûreté et l'exploitation des voies ferrées ainsi que sur la jurisprudence suscitée par l'application de l'article 6 de ce texte. Sans douter de la permanence de la validité juridique de ce règlement d'administration publique émanant de l'autorité de fait se disant " gouvernement de l'Etat français " mais dont la nullité n'a pas été constatée en vertu de l'ordonnance du 9 août 1944 tendant au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental, il observe que les arrêtés préfectoraux pris pour l'exécution de ces dispositions et conformes au modèle annexé à la circulaire no 77-94 du 29 juin 1977 du secrétariat d'Etat aux transports stipulent que le " stationnement dans les cours des gares n'est autorisé que sur les emplacements et aux conditions prévus à cet effet " et ajoute que " partout où il sera jugé nécessaire, des emplacements seront attribués, notamment aux taxis ". Il remarque, par ailleurs, que la circulaire d'application en date du 11 mai 1973 du décret déjà cité du 2 mars 1973 spécifie, pour sa part, que " la prise en charge d'un client sur le territoire d'une commune ne peut être effectué que par un taxi de cette commune ", cette disposition comportant cependant certaines exceptions en particulier lorsque le taxi a été commandé préalablement par le client ou qu'il vient chercher un client qu'il avait déjà transporté, clauses qui ne sont contestées par aucune des parties en présence dans cette affaire. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui faire connaître les mesures qu'il compte prendre pour que soit réaffirmé ou clarifié le droit qui s'impose en la matière et donne lieu actuellement, nonobstant les procès-verbaux de contravention que des municipalités dressent à l'encontre des exploitants de taxis qui enfreignent les arrêtés leur interdisant de stationner dans les cours des gares extérieures aux communes dans lesquelles ils sont autorisés à exercer leur métier, à de graves divergences d'interprétation auxquelles les autorités municipales et préfectorales semblent hors d'état de mettre ; fin et dont la persistance risquerait d'engendrer dans la profession des risques d'affrontement que l'ordre et la tranquilité publics commandent de conjurer au plus vite.
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Réponse du ministère : Intérieur publiée le 30/12/1993
Réponse. - Les nombreux conflits entre taxis dans les gares SNCF, dont la question posée par l'honorable parlementaire fait état, résultent souvent d'une méconnaissance des principes énoncés par le décret du 22 mars 1942 et le décret du 2 mars 1973. Le décret du 22 mars 1942, qui confie dans son article 6 au préfet le soin de prendre les mesures de police destinées à assurer le bon ordre dans les parties des gares et leurs dépendances accessibles au public, ne réglemente pas la délivrance des autorisations de stationnement sur la voie publique. C'est pourquoi, en application de ce décret, tous les taxis des communes avoisinant une gare peuvent venir y stationner sans qu'il y ait de priorité de stationnement au profit des taxis de la commune où se situe la gare. La Cour de cassation a tiré de ce texte la conclusion que les arrêtés municipaux concernant les conditions d'exercice dans la commune de la profession de chauffeur de taxi sont inapplicables dans les cours de gares (crim. 9 janvier 1958, 4 arrêts). Elle a également jugé que les dispositions du décret de 1942 ne confèrent pas au préfet le pouvoir d'établir des distinctions entre les voitures assurant un service analogue (crim. 26 juillet 1957). En ce qui concerne, en revanche, le décret du 2 mars 1973 relatif à l'exploitation des taxis, il détermine, dans ses articles 3 et 4, l'autorité compétente pour la délivrance des autorisations de stationnement. La circulaire d'application de ce décret du 11 mai 1973 précise ce point en indiquant que la prise en charge d'un client sur le territoire d'une commune par un chauffeur de taxi ne peut être effectuée que par un taxi de cette commune. Elle mentionne également les dérogations à cette règle : lorsqu'un taxi a été commandé préalablement par un client ou qu'il vient chercher un client qu'il avait déjà transporté. Toutefois, ces dispositions ne font pas obstacle à l'application de celles résultant du décret de 1942 précité. La modification du décret de 1942, qui tendrait à réserver au profit des seuls taxis de la commune où se situe la gare le droit d'y stationner, est difficilement envisageable compte tenu de la vocation d'intérêt général de ces équipements publics ferroviaires.
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