Question de M. HUGUET Roland (Pas-de-Calais - SOC) publiée le 22/04/1993

M. Roland Huguet appelle l'attention de M. le ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice, sur les expulsions de locataires qui ne règlent aucun problème et relèvent de pratiques moyenâgeuses. Deux cas sont à examiner selon que les locataires sont solvables ou non : s'ils sont solvables, un prélèvement direct sur leurs revenus devrait permettre au propriétaire de recouvrer les loyers impayés sans avoir recours à la procédure d'expulsion et il conviendrait d'aménager les dispositions légales en ce sens. S'ils ne sont pas solvables, l'expulsion ne fait que déplacer le problème puisqu'il faudra les reloger ailleurs. Dans ce cas, les dispositifs sociaux existants et notamment le Fonds de solidarité pour le logement doivent être utilisés. En conséquence, il lui demande s'il envisage de prendre des mesures afin que la pratique de l'expulsion des locataires n'ait plus cours dans notre pays.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 08/07/1993

Le paiement des loyers est sans doute l'une des obligations principales pesant sur le locataire, mais n'est pas la seule dont la méconnaissance est susceptible d'entraîner la rupture du contrat le liant au bailleur et l'expulsion qui en est la conséquence. La législation actuelle tend à assurer au bailleur le recouvrement des loyers impayés tout en évitant la rupture du lien contractuel, et, lorsque celle-ci est inévitable, en favorisant le relogement de la personne expulsée ou menacée de l'être. S'agissant des garanties de paiement du loyer, si, sauf en matière de paiement direct de pensions alimentaires, le prélèvement direct sur les revenus d'un débiteur n'est possible qu'avec l'accord de celui-ci, dans un souci de protection du locataire une telle clause ne peut être insérée dans un contrat de bail où elle serait " réputée non écrite " (article 4-c de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs). Mais avant comme après la réforme des procédures civiles d'exécution entrée en vigueur le 1er janvier 1993, un bailleur peut faire saisir les rémunérations dues à son locataire pour obtenir le recouvrement des loyers impayés par lui suivant une procédure qui est obligatoirement précédée d'une tentative de conciliation (articles L. 145-1 et suivants et R. 145-1 et suivants du code du travail). Par ailleurs, l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 précitée prévoit l'aménagement des conditions de mise en oeuvre d'une clause résolutoire qui permet au locataire qui en fait la demande d'obtenir un aménagement de paiement de l'arriéré de loyer qui, s'il est respecté, évite la rupture du contrat. De plus le locataire peut saisir le fonds de solidarité pour le logement institué par la loi du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement, faculté qui lui est rappelée, à peine de nullité, dans le commandement de payer délivré par l'huissier en application de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989. Enfin en cas d'insolvabilité réelle ou organisée du locataire notamment, le bailleur peut poursuivre l'expulsion de celui-ci. Mais si l'exécution d'une telle mesure est accordée, cette exécution peut être assortie de délais dont la durée ne peut excéder trois ans, durant lesquels le préfet, auquel la décision doit être notifiée, doit procéder au relogement du locataire expulsé dans le cadre du plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées prévu par la loi du 31 mai 1990 précitée. Les principes généraux du droit des contrats interdisent d'aller au-delà de ces mesures pour mettre fin aux expulsions.

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