Question de M. SOUVET Louis (Doubs - RPR) publiée le 09/03/1989
M. Louis Souvet attire l'attention de Mme le secrétaire d'Etat auprès du ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale, chargé de la famille, sur la généralité excessive des textes régissant les abandons et les adoptions d'enfants. Les termes de la loi sont très vagues : la procédure de consentement à l'adoption est envisagée si les parents n'entretiennent plus avec l'enfant les relations nécessaires au maintien des liens affectifs. Qu'on ne se trompe pas sur le but de cette question écrite, il n'est en aucun cas question de séparer des enfants de parents qui pour des raisons économiques ou sociales, par exemple, connaîtraient des difficultés temporaires (même pour une longue période). Mais il est patent que de très nombreux enfants ne seront jamais repris par leurs parents ; dans ces cas et dans ces cas seulement ne pas engager la procédure et ne pas transmettre le dossier de l'enfant au tribunal de grande instance, c'est maintenir pour une très longue période l'enfant dans une institution. C'est ensuite réduire à moyen terme ses chances d'être adopté, les familles adoptantes hésitant pour des problèmes psychologiques (tout à fait compréhensibles) à adopter un adolescent. La disproportion des chiffres est là pour confirmer qu'il y a en la matière un véritable problème : l'aide sociale à l'enfance se voit confier chaque année 108 000 enfants. 1 500 seront adoptés, alors que dans le même temps 20 000 familles demandent à adopter un enfant. Si les liens du sang sont un paramètre essentiel qu'il ne faut pas négliger, il convient également de ne pas faire perdurer certaines situations. La rigidité du système d'adoption qui conduit les parents vers des solutions et des pis-aller tous plus extravagants et plus onéreux les uns que les autres doit être réduite. Le lien du sang ne doit pas être élevé au rang de dogme politique au détriment d'un pragmatisme prenant mieux en compte les réalités quotidiennes. Il demande s'il ne serait pas possible de généraliser les transferts de dossiers vers les tribunaux lorsque les parents " n'entretiennent plus les relations nécessaires au maintien des liens affectifs ", il demande aussi si un texte ne pourrait pas définir plus précisément ces relations nécessaires, ce qui permettrait aux services de l'aide sociale à l'enfance d'avoir des textes précis à leur disposition.
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Réponse du ministère : Famille publiée le 06/07/1989
Réponse. - Aux termes de l'article 350 du code civil : " L'enfant recueilli par un particulier, une oeuvre privée ou un service de l'aide sociale à l'enfance, dont les parents se sont manifestement désintéressés pendant l'année qui précède l'introduction de la demande en déclaration d'abandon, peut être déclaré abandonné par le tribunal de grande instance. Sont considérés comme s'étant manifestement désintéréssés de leur enfant les parents qui n'ont pas entretenu avec lui les relations nécessaires au maintien de liens affectifs ". Concernant, en amont, la saisine de l'autorité judiciaire pour la mise en oeuvre de ces dispositions, il n'existe effectivement pas de transfert systématique des dossiers ; cependant, un ensemble de mesures juridiques permet au service d'aide sociale à l'enfance ayant la charge de l'enfant d'apprécier, à partir d'éléments précis d'information sur la qualité des relations existant entre l'enfant et les parents, l'opportunité de cette saisine. Les articles 55-1 à 59 du code de la famille et de l'aide sociale, complétés par le décret n° 85-936 du 23 août 1985, ont mis en place une reconnaissance des droits des familles tout en répondant au souci de les responsabiliser. Le service doit désormais informer complètement les familles qui s'adressent à lui sur les prestations qu'il offre et sur les droits et obligations qui en résultent pour l'enfant et son représentant légal (cf. art. 55 précité). En cas de placement de l'enfant dans le service à la demande des parents, l'organisation doit en être fixée en accord avec ceux-ci et doit notamment prévoir l'indication précise du lieu et de la durée du placement, ainsi que les modalités suivant lesquelles sera assuré le maintien des liens entre l'enfant et les parents (et notamment les conditions dans lesquelles ils exerceront leurs droits de visite et d'hébergement) ; toute modification du lieu et du mode de placement doit se faire en accord avec la famille, qui est ainsi associée aux mesures essentielles concernant l'enfant (cf. art. 56 du code et art. 5 du décret précités). Lorsque l'enfant est remis au service par décision judiciaire, l'avis du représentant légal du mineur est recueilli préalablement au choix du mode et du lieu de placement, et à toute modification apportée à cette décision (cf. art. 57 précité). Enfin, conformément à l'article 59, sauf dans les cas où un enfant est confié au service par décision judiciaire, aucune mesure ne peut être prise pour une durée supérieure à un an, ce qui impose une révision annuelle de tous les dossiers. Les services disposent donc d'éléments objectifs d'information leur permettant d'apprécier le maintien des relations entre l'enfant et ses parents. Il serait toutefois difficile de définir des indications précises pour l'évaluation de la qualité des liens affectifs existant dans la famille ; cette évaluation ne peut se faire que cas par cas, au terme d'investigations techniques et par référence aux données théoriques en vigueur en matière de psychologie de l'enfance.
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