Question de M. SOUVET Louis (Doubs - RPR) publiée le 22/12/1988

M. Louis Souvet attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la forêt sur les répercussions dramatiques, pour les agriculteurs français, d'une libéralisation immédiate et totale du commerce international des produits agricoles. Un seul pays, en l'occurence, les Etat-Unis, ne saurait imposer à la communauté internationale une déréglementation sauvage des échanges agricoles, en refusant catégoriquement d'engager un programme de mesures à court terme (gel ou réduction), tant qu'un accord de principe n'aura pas été conclu quant à l'élimination pure et simple de toutes les subventions agricoles au sens large. Cette solution américaine radicale contribuerait à placer les agriculteurs français et européens devant des handicaps insurmontables, étant donné le niveau de soutien élevé, accordé par l'administration américaine à ses fermiers, notamment l'E.E.P. (Export Enhancement Programme) lancé le 15 mai 1985 pour " redresser les exportations américaines " et " encourager les partenaires des Etats-Unis à entamer des négociations sérieuses sur les problèmes agricoles " ; en décembre 1985 un vote du congrès l'a rendu obligatoire à hauteur de 1,5 milliard de dollars. Les Etats-Unis instituent donc de nouveaux soutiens à l'agriculture pour démontrer aux autres pays les bienfaits du libéralisme. Il lui demande quelle serait l'attitude du Gouvernement français au sein de la C.E.E., en cas d'échec lors de la réunion de Montréal. Il le remercie de la réponse qu'il voudra lui réserver.

- page 1446


Réponse du ministère : Agriculture publiée le 19/07/1990

Réponse. - Suite à l'échec de la réunion de Montréal tenue en décembre 1998, les négociations d'Uruguay, lancées à Punta del Este en 1986, ont franchi une étape décisive après la réunion ministérielle à mi-parcours qui s'est achevée à Genève le 8 avril 1989. La fermeté du Gouvernement français et de la commission a permis d'aboutir à un accord final qui ménage les intérêts fondamentaux de l'agriculture communautaire. Cet accord n'a cependant été qu'une étape dans un processus de négociation qui doit normalement se terminer le 31 décembre 1990. Pour apprécier cet accord intermédiaire, il faut tout d'abord souligner le progrès qu'il constitue par rapport aux documents présentés antérieurement à Montréal ou préparés par le secrétariat du G.A.T.T. pour les discussions de Genève, ces textes impliquant à terme la condamnation par le G.A.T.T. de notre système de prélèvements restitutions. En revanche, le texte adopté finalement à Genève respecte bien le cadre de négociation défini à Punta del Este, et n'entraîne pas pour la Communauté d'efforts supplémentaires à ceux qu'elle s'est imposés lors du dernier conseil européen de février 1988. En effet, concernant le long terme, la position américaine (élimination des subventions agricoles sur une période de dix ans) a été balayée. L'accord final reprend en fait la position communautaire, c'est-à-dire une réduction globale, progressive et équilibrée de tous les soutiens agricoles, sans ciblage sur les seules restitutions à l'exportation. Pour le court terme, nos trois exigences fondamentales sont reprises : fixation d'une date butoir, afin d'assurer que nos partenaires au G.A.T.T. engagent rapidement les mêmes efforts que nous ; cette échéance a été fixée en fin 1990 ; comme pour le long terme, tous les soutiens sont concernés, et un crédit est reconnu à ceux qui ont déjà engagé l'effort ; comme pour le long terme encore, l'engagement de geler les niveaux de soutien actuels devra avoir un caractère global et réciproque. Au total donc l'accord de Genève représente un compromis équilibré et constitue une base acceptable pour la suite des négociations. Il est en effet conforme aux engagements de Punta del Este, il préserve l'essentiel des grands principes de la P.A.C. et surtout il n'hypothèque pas l'avenir par des concessions dangereuses. Cet accord et ceux conclus sur les trois autres points encore en litige (textile, protection des droits de la propriété intellectuelle et clauses de sauvegarde) a permis la mise en application des accords conclus à Montréal mais gelés dans l'attente d'un accord global. Plus largement, il a relancé l'Uruguay Round et constitué une victoire pour le multilatéralisme qui paraissait menacé après Montréal. En tout cas, il a évité une intensification de la course aux subventions agricoles auquel aurait inévitablement conduit l'échec des négociations. Par la suite, en décembre 1989, la Communauté a déposé au groupe de négociation agricole du cycle d'Uruguay une proposition globale pour une réduction équilibrée du soutien et de la protection agricole à travers le monde. Au Conseil agricole des 25 et 26 avril dernier, les douze ministres européens ont unanimement confirmé leur soutien aux thèses affichées par la Communauté depuis le début des négociations commerciales multilatérales à Punta del Este et telles qu'elles sont développées dans le document communautaire de décembre dernier. La proposition communautaire s'articule autour de quelques points clés : le principe du système de double prix n'est pas négociable à Genève ; la réduction doit porter sur toutes les formes de soutien et de protection ; les résultats des réformes de politiques agricoles, engagées par certains pays avant la fin de la négociation, devront être portés au crédit de ces pays ; la négociation, doit permettre un rééquilibrage du soutien et de la protection entre les différentes filières de production. Cette position, conforme au mandat donné par les Etats membres à la commission dès le début de la négociation, doit permettre à la Communauté de défendre les intérêts de l'agriculture européenne : elle est cohérente avec les aménagements apportés à la politique agricole commune. Depuis 1984, elle laisse suffisamment de souplesse pour, en fonction des efforts de nos partenaires au G.A.T.T., consolider ou non ces aménagements de la P.A.C. L'efficacité du négociateur communautaire au G.A.T.T. est tributaire du degré de cohésion des Etats membres autour de la position communautaire. C'est pourquoi, comme il le fait depuis le début du cycle d'Uruguay, le Gouvernement français s'attachera à oeuvrer pour que, juqu'au stade ultime de la négociation, le consensus communautaire qui existe aujourd'hui soit préservé. ; la réduction doit porter sur toutes les formes de soutien et de protection ; les résultats des réformes de politiques agricoles, engagées par certains pays avant la fin de la négociation, devront être portés au crédit de ces pays ; la négociation, doit permettre un rééquilibrage du soutien et de la protection entre les différentes filières de production. Cette position, conforme au mandat donné par les Etats membres à la commission dès le début de la négociation, doit permettre à la Communauté de défendre les intérêts de l'agriculture européenne : elle est cohérente avec les aménagements apportés à la politique agricole commune. Depuis 1984, elle laisse suffisamment de souplesse pour, en fonction des efforts de nos partenaires au G.A.T.T., consolider ou non ces aménagements de la P.A.C. L'efficacité du négociateur communautaire au G.A.T.T. est tributaire du degré de cohésion des Etats membres autour de la position communautaire. C'est pourquoi, comme il le fait depuis le début du cycle d'Uruguay, le Gouvernement français s'attachera à oeuvrer pour que, juqu'au stade ultime de la négociation, le consensus communautaire qui existe aujourd'hui soit préservé.

- page 1584

Page mise à jour le