Question de M. CARTIGNY Ernest (Seine-Saint-Denis - G.D.) publiée le 28/01/1988
M. Ernest Cartigny appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le problème des mariages de complaisance, ces unions qui n'ont pour seul but que de conférer au conjoint étranger la nationalité française. Il constate que, malgré les déclarations récentes (notamment devant la commission des sages, chargée de la réforme du code de la nationalité) faisant état d'abus, il n'existe aucune étude disponible permettant d'apprécier l'ampleur de ce phénomène. Il lui apparaît contradictoire qu'un étranger puisse se marier à un ressortissant français tout en étant en situation irrégulière au regard des lois relatives à l'entrée et au séjour des étrangers en France. En effet, bien que légalement marié, l'étranger peut, tout au long de la première année du mariage, être reconduit à la frontière pour entrée ou séjour irréguliers, ou expulsé pour motif d'ordre public puisque la garantie contre ces mesures (la délivrance de la carte de résident) ne prend effet, conformément à l'article 15 de la loi du 9 septembre 1986, qu'au bout d'un an de mariage et de vie commune. Ce dispositif, s'il ne freine pas les mariages de complaisance, entraîne en revanche des difficultés pour les couples de bonne foi dont le conjoint étranger se retrouve parfois pendant cette période en situation irrégulière, sans titre de séjour et sans travail légal possible. En conséquence, il lui demande s'il ne conviendrait pas d'aménager la législation en vigueur dans le sens d'un contrôle à priori de la situation juridique de l'étranger désirant contracter mariage avec un ressortissant français, plutôt que de laisser se développer des situations inextricables pour les couples mixtes.
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Réponse du ministère : Sécurité publiée le 31/03/1988
Afin de remédier aux risques de mariages de complaisance, constatés dans le passé, qui ont permis à des étrangers d'obtenir abusivement, dès leur arrivée en France, des autorisations de séjour et de travail, l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée par la loi du 9 septembre 1986 subordonne désormais la remise de la carte de résident, valant titre unique de séjour et de travail, d'une durée de dix ans et renouvelable automatiquement, au conjoint étranger d'un Français à la justification d'un an de mariage et d'une communauté de vie effective. L'introduction de cette double condition a été jugée préférable à une remise en vigueur de la procédure d'autorisation de mariage, abrogée par la loi du 19 octobre 1981, à laquelle étaient soumis les étrangers en séjour temporaire en France, procédure qui ne pourrait d'ailleurs faire obstacle à ce qu'un étranger, désireux de bénéficier des dispositions législatives applicables aux conjoints d'étrangers séjournant déjà régu
lièrement en France, contracte mariage hors du territoire national. La qualité de conjoint de Français ne saurait d'ailleurs entraîner ipso facto la régularisation de la situation administrative d'un étranger. En effet, il résulte de l'article 6 de l'ordonnance de 1945 précitée que l'étranger en séjour en France doit être en possession d'un titre de séjour au-delà d'un délai de trois mois depuis son entrée et qu'en conséquence il doit solliciter ce titre avant l'expiration dudit délai. A défaut, cet étranger pourrait faire l'objet d'un arrêté de reconduite pour séjour irrégulier. Cette règle a été confirmée par le Conseil d'Etat dans son arrêt G.I.S.T.I. du 26 septembre 1986 en ce qui concerne les étrangers qui sollicitent l'attribution de plein droit de la carte de résident en vertu de l'article 15 de l'ordonnance. S'il est vrai, par ailleurs, qu'aucune mesure administrative d'éloignement ne peut être prononcée à l'égard d'un étranger marié depuis plus d'unan avec un Français ou un étranger en séjour régulier en France, il reste que celui-ci peut faire l'objet de poursuites judiciaires en application de l'article 19 de l'ordonnance du 27 novembre 1945 modifiée pour séjour irrégulier. Cependant, comme l'indique l'honorable parlementaire, il convient d'éviter que des couples de bonne foi ne se trouvent placés dans des situations difficiles au regard des textes en vigueur sur le séjour en France des étrangers. C'est dans cet esprit qu'il a été demandé au garde des sceaux d'inviter les officiers d'état-civil à informer les intéressés, préalablement à la célébration du mariage, de leurs droits et obligations en la matière.
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