Question de M. LACOUR Pierre (Charente - UC) publiée le 11/06/1987
M.Pierre Lacour attire l'attention de M. le ministre des affaires sociales et de l'emploi sur l'admission à l'aide sociale des étrangers en situation irrégulière en France. L'article 124 du code de la famille et de l'aide sociale dispose que " toute personne résidant en France, bénéficie, si elle remplit les conditions légales d'attribution des formes de l'aide sociale telles qu'elles sont définies par le présent code ". La commission centrale d'aide sociale a pour sa part jugé à plusieurs reprises (n° 2-84, Indre-et-Loire, 4e section, 27 mars 1985 ; n° 24-84, Haut-Rhin, 4e section, 27 mars 1985) qu'un séjour provisoire en France effectué dans des conditions régulières ne permettait pas à un étranger d'acquérir la qualité de résident. La combinaison des dispositions légales et des décisions jurisprudentielles semble de nature à justifier le rejet de toute demande d'admission à l'aide sociale émanant d'un étranger en situation irrégulière au regard de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France. Il s'agit en effet de personnes qui ne disposent ni de la carte de séjour temporaire ni de la carte de résident instituées par ce texte, modifié par les lois du n° 84-622 du 17 juillet 1984 et n° 86-1025 du 9 septembre 1986. Or, il vient d'être porté à sa connaissance, lors de l'examen du règlement départemental d'aide sociale de la Charente, que la commission centrale d'aide sociale avait jugé récemment que le fait de ne pas disposer de titre de séjour régulier n'est pas légalement de nature à priver un étranger du bénéfice de l'aide sociale (n° 7-86, Oise). Cette décision apparaît en contradiction avec les textes rappelés ci-dessus. Il lui demande de bien vouloir lui préciser quelles sont les dispositions légales qui peuvent être invoquées pour soutenir une telle position. Dans l'affirmative, il lui paraît indispensable de savoir à quelle collectivité publique incombe : d'une part l'instruction d'une demande d'aide sociale présentée dans ces conditions ; d'autre part, la prise en charge financière des prestations qui viendraient à être accordées au bénéficiaire.
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Réponse du ministère : Affaires sociales publiée le 17/09/1987
Réponse. -Ainsi que le rappelle l'honorable parlementaire, l'article 124 du code de la famille et de l'aide sociale dispose que " toute personne résidant en France bénéficie, si elle remplit les conditions légales d'attribution, des formes de l'aide sociale définies par le présent code ". Cette condition de résidence est en règle générale considérée comme satisfaite lorsque la personne de nationalité étrangère demeure en France de manière habituelle, et y a son principal établissement. Il appartient aux commissions d'admission d'aide sociale et par la voie d'appel aux juridictions spécialisées, la commission départementale et la commission centrale d'aide sociale, d'apprécier, dans chaque cas, la situation de ces personnes en fonction de critères de fait, et notamment des motifs pour lesquels l'intéressé est venu en France, des conditions de son installation, des liens d'ordre personnel ou professionnel qu'il peut avoir dans notre pays, des intentions qu'il manifeste quant à la durée de son séjour. En revanche, il ne peut être exigé, en l'état de la législation, que l'intéressé séjourne en France dans des conditions régulières, et notamment soit titulaire d'une carte de séjour ou d'un titre équivalent. Ces dispositions doivent être combinées avec l'article 186 du code de la famille et de l'aide sociale relative aux étrangers ressortissants de pays n'ayant pas conclu avec la France une convention d'assistance sociale et médicale. Cet article s'il réserve le bénéfice de certaines prestations d'aide sociale, parmi lesquelles l'aide sociale à domicile et l'allocation compensatrice, aux seuls étrangers justifiant d'une certaine durée de résidence, ne fixe par contre aucune durée particulière de résidence aux étrangers pour la prise en charge de leur frais de séjour au titre de l'aide hospitalière à caractère social ou médical. La commission centrale d'aide sociale a été à maintes occasions conduite à rappeler ces principeset notamment dans la décision citée par l'honorable parlementaire (n° 7-86, Oise). Cette jurisprudence est constante. Elle n'est pas, en particulier, en contradiction avec les décisions de la 4e section de cette juridiction du 27 mars 1985 également visées par l'honorable parlementaire, qui concernaient des personnes étrangères de passage sur notre territoire ou y séjournant temporairement en qualité de touriste. Par ailleurs, les dispositions légales ne prévoient pas de dispositions particulières pour l'établissement et l'instruction des dossiers d'aide sociale déposés par des personnes dans cette situation ainsi que pour la prise en charge des prestations qui leurs sont éventuellement attribuées. Les demandes d'aide sociale sont, en vertu de l'article 125 du code de la famille et de l'aide sociale, déposées auprès du centre communal d'action sociale de la résidence du demandeur. Cette condition de résidence, qui doit être également appréciée en fonction de critères de fait, n'est pas assortie par la loi d'une condition de durée de résidence ou de régularité de séjour. L'établissement du dossier d'aide sociale et sa transmission au service du département chargé de l'aide sociale constitue une obligation à laquelle est soumis le centre communal d'action sociale. Il appartient aux services compétents du département d'instruire le dossier et de le présenter à la commission d'admission à l'aide sociale accompagné de son avis. La situation de ces personnes étrangères désidant en France au sens de la législation d'aide sociale est également sans incidence sur les conditions d'acquisition ou de perte du domicile de secours prévues par les articles 142 à 144 du code de la famille et de l'aide sociale. Ces dispositions n'interfèrent pas avec les conditions d'attribution des prestations d'aide sociale, et ne peuvent pas en particulier être interprétées comme dérogeant à la condition de résidence posée par l'article 124. Elles constituent seulement une règle d'imputation des dépenses engagées au titre de l'aide sociale légale. L'Etat n'intervient ainsi pour la prise en charge des prestations d'aide sociale attribuées en faveur de ces personnes que dans l'hypothèse où elles se trouvent dans l'une des deux situations prévues au 5e alinéa de l'article 194 (réfugiés ou " personnes pour lesquelles aucun domicile fixe ne peut être déterminé "), sur décision de la commission d'admission siégeant en formation plénière. ; ou de perte du domicile de secours prévues par les articles 142 à 144 du code de la famille et de l'aide sociale. Ces dispositions n'interfèrent pas avec les conditions d'attribution des prestations d'aide sociale, et ne peuvent pas en particulier être interprétées comme dérogeant à la condition de résidence posée par l'article 124. Elles constituent seulement une règle d'imputation des dépenses engagées au titre de l'aide sociale légale. L'Etat n'intervient ainsi pour la prise en charge des prestations d'aide sociale attribuées en faveur de ces personnes que dans l'hypothèse où elles se trouvent dans l'une des deux situations prévues au 5e alinéa de l'article 194 (réfugiés ou " personnes pour lesquelles aucun domicile fixe ne peut être déterminé "), sur décision de la commission d'admission siégeant en formation plénière.
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