Question de M. CHARASSE Michel (Puy-de-Dôme - SOC) publiée le 12/06/1986

M. Michel Charasse appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les modalités d'application de l'article 15 de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 en vertu duquel les comptables des collectivités locales exercent le contrôle de légalité des actes des ordonnateurs en ce qui concerne les chapitres d'imputation des mandats de paiement. Il lui fait observer que cette disposition permet au comptable de s'opposer au paiement de certaines dépenses au motif que leur imputation n'est pas correcte, soit parce qu'il s'agit d'une dépense d'investissement payée sur un chapitre de fonctionnement ou inversement, soit parce que l'imputation n'est pas correcte à l'intérieur d'une même section. Lorsqu'un conflit survient avec un ordonnateur pour une imputation erronée sur une section alors qu'elle devrait s'effectuer sur l'autre, ou sur un budget annexe alors qu'il devrait s'effectuer sur un budget principal ou inversement, le problème se règle généralement très facilement car la situation est claire. Il en va de même lorsqu'une imputation est contestée à l'intérieur d'une section dont les crédits comportent une individualisation insuffissante, comme c'est le cas notamment pour la section de fonctionnement ainsi que pour les crédits globaux inscrits à la section d'investissement. Mais tel n'est pas le cas lorsque la contestation porte sur une imputation afférente à un crédit spécifiquement individualisé, inscrit par exemple à la section d'investissement, pour des travaux précis, nominativement cités, ou pour une acquisition de matériels nominativement cités. Dans ce cas, en effet, l'ordonnateur exécute le budget voté et qui n'a pas été contesté dans le cadre du contrôle de légalité budgétaire qui, comme toutes les délibérations, incombe au représentant de l'Etat et à lui seul. Or lorsque le comptable, se fondant sur l'article 15 précité (ou sur les dispositions analogues de la loi modifiée du 2 mars 1982 applicables au département et à la région), conteste une imputation sur un chapitre budgétaire lui-même précis et individualisé correspondant exactement à la dépense ordonnancée, on se trouve en présence d'un contrôle de légalité surbondant qui s'ajoute à celui déjà exercé par le représentant de l'Etat et qui ne peut donc trouver son fondement juridique dans les attributions légalement conférées au comptable en matière de contrôle de légalité de la dépense. Des incidents risquant maintenant de survenir du fait, en particulier, des nouvelles règles de fonctionnement du fonds de compensation de la T.V.A. et du contrôle plus minutieux auquel elles donnent lieu, il lui demande de bien vouloir lui confirmer que le contrôle de la légalité des ordonnances de dépense ne relève du comptable que pour autant qu'il ne vise pas des chapitres budgétaires où la dépense est individualisée dans le budget, inscrite avec précision dans le document budgétaire et donc soumise, à ce titre, au contrôle de légalité supérieur exercé par le représentant de l'Etat et par lui seul. Faute de partager cette manière de voir, il faudrait en conclure que le contrôle de légalité peut s'exercer plusieurs fois sur les mêmes actes budgétaires, ce qui serait contraire aux principes de liberté qui fondent les lois de décentralisation et notamment celle modifiée du 2 mars 1982.

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Réponse du ministère : Intérieur publiée le 23/10/1986

Réponse. -En matière d'imputation budgétaire, il existe trois stades dans le contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales par rapport à leur conformité à la nomenclature budgétaire et comptable, liés au degré d'exécution de l'opération. Le premier stade est celui de la prévision. Le contrôle vise à s'assurer que la délibération budgétaire est présentée conformément à la nomenclature budgétaire et comptable applicable. Il est effectué par le préfet, commissaire de la République, et résulte de la combinaison de l'article 4 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, des articles 3 et 46 de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions et de l'article 7-V de la loi n° 72-619 du 5 juillet 1972 portant création et organisation des régions. La loi du 2 mars 1982 a modifié le caractère de ce contrôle en indiquant que l'acte est exécutoire avant l'exercice de ce contrôle et que seule une décision du tribunal administratif peut suspendre le caractère exécutoire de l'acte ou l'annuler. Le deuxième stade est celui de l'exécution. Lors de la prise en charge de la dépense, le comptable s'assure que, compte tenu de la nature et l'objet de celle-ci, son imputation comptable est conforme à la nomenclature budgétaire et comptable. Ce contrôle de l'imputation comptable de la dépense a été prévu par les articles 15 et 55 de la loi du 2 mars 1982 précitée et l'article 21-3-II de la loi du 5 juillet 1972 précitée. Ces dispositions ne font que confirmer celles de l'article 12 du décret du 29 décembre 1962 précité et de l'article 60-I de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963. Le comptable engage sa responsabilité personnelle et pécuniaire à l'occasion de ce contrôle puisque, conformément à la loi du 2 mars 1982, l'erreur d'imputation budgétaire est un motif de suspension de paiement et de refus de déférer à une éventuelle réquisition. Le troisième stade est celui du jugement des comptes. En effet, le juge des comptes statue par voie de jugement sur le compte de gestion qui comprend le budget et les opérations de dépenses et de recettes. Ces trois stades du contrôle de légalité des imputations budgétaires et comptables des actes financiers des collectivités locales existaient avant la loi du 2 mars 1982 précitée qui les a repris en excluant expressément tout contrôle d'opportunité du comptable. Du strict point de vue du contrôle de la conformité de la présentation du budget à la nomenclature budgétaire et comptable applicable et de l'imputation d'une dépense ou d'une recette à cette même nomenclature, la loi du 2 mars 1982 n'a pas modifié les règles antérieures. De plus, si la loi du 2 mars 1982 a bien posé les principes de liberté des communes, des départements et des régions, elle en a aussi précisé les limites notamment celle de l'exacte imputat
ion comptable des dépenses et des recettes. Enfin, dans le cas où une collectivité territoriale attaquerait une décision du comptable afférente à un refus de paiement pour mauvaise imputation de la dépense, le tribunal administratif devrait définir l'imputation de la dépense au chapitre concerné selon sa nature ou son objet (article 12-B du décret du 29 décembre 1962) en fonction de la nomenclature comptable du fait que le chapitre et l'article budgétaires se définissent par rapport à la nomenclature comptable et non par rapport à la présentation du budget adoptée par la collectivité territoriale. Le chapitre et l'article budgétaires ont été définis par arrêté interministériel du 30 janvier 1986 publié au Journal officiel du 2 mars 1986. En tout état de cause, les incidents que craint l'honorable parlementaire ne pourraient résulter que d'une interprétation divergente par les représentants de l'Etat et les comptables publics des règles d'imputation budgétaire et comptable des dépenses des collectivités locales. Afin de prévenir toute divergence d'interprétation en la matière, ces règles feront l'objet d'un rappel en concertation avec le ministre délégué chargé du budget. ; été définis par arrêté interministériel du 30 janvier 1986 publié au Journal officiel du 2 mars 1986. En tout état de cause, les incidents que craint l'honorable parlementaire ne pourraient résulter que d'une interprétation divergente par les représentants de l'Etat et les comptables publics des règles d'imputation budgétaire et comptable des dépenses des collectivités locales. Afin de prévenir toute divergence d'interprétation en la matière, ces règles feront l'objet d'un rappel en concertation avec le ministre délégué chargé du budget.

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