Question de M. BELCOUR Henri (Corrèze - RPR) publiée le 03/04/1986
M. Henri Belcour expose à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, que la loi n° 80 335 du 12 mai 1980 relative aux effets des clauses de réserve de propriété dans les contrats de vente permet au vendeur de se prémunir contre le défaut de paiement de son acheteur en stipulant une clause de réserve de propriété selon laquelle le transfert de propriété de la marchandise vendue sera retardé jusqu'au complet paiement du prix. Cette loi modifiait les articles 59 et 65 de la loi n° 67-563 du 13 juillet 1967 et ses dispositions sont reprises aux articles 115 à 122 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, relative au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises. Par ailleurs, la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981 facilitant le crédit aux entreprises, modifiée par la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984, dite loi bancaire, permet la cession de créances profesionnelles à titre de garantie à des établissements de crédit, en vue de faciliter l'octroi de crédit aux entreprises. Il lui demande de bien vouloir lui indiquer s'il peut être inféré du rapprochement de ces deux textes que la cession de créances professionnelles relatives à des ventes avec réserve de propriété transfère à l'établissement de crédit cessionnaire le bénéfice de cette réserve de propriété.
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Réponse du ministère : Justice publiée le 03/07/1986
Réponse. -Comme il a été indiqué dans les réponses faites aux questions écrites posées par Messieurs les députés G. Mesmin et J.-P. Pierre-Bloch (J.O. Assemblée nationale du 23 mars 1981, page 1280 et du 27 avril 1981, page 1841), la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981 facilitant le crédit aux entreprises et modifiée par la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 a notamment eu pour objet d'instituer une technique simplifiée de cession des créances professionnelles par la seule remise à un établissement de crédit d'un bordereau, à la condition que ce dernier comporte les énonciations mentionnées à l'article 1er de la loi. Dans ces conditions, les dispositions de l'article 1er ne sauraient (comme le confirment les travaux parlementaires) déroger aux dispositions de portée générale de l'article 1692 du code civil aux termes desquelles " la cession d'une créance comprend les accessoires de la créance, tels que caution, privilège et hypothèque ". Cette application du principe selon lequel l'accessoire suit le principal est commune aux autres moyens utilisés pour la transmission des créances, qu'il s'agisse de l'endossement d'une lettre de change (art. 118 du code du commerce) ou de la subrogation conventionnelle (art. 1250-1° du code civil). Les dispositions de l'article 1692 peuvent donc être éclairées par celles de l'article 1250 précité selon lesquelles " le créancier recevant son paiement d'une tierce personne la subroge dans ses droits, actions, privilèges ou hypothèques contre le débiteur ". A ce titre, la subrogation entraîne le transfert, au profit du subrogé, de l'action en résolution et de la clause résolutoire. Une certaine jurisprudence, approuvée par une partie de la doctrine, en a déduit qu'il fallait reconnaître également au subrogé le droit de se prévaloir d'une éventuelle clause de réserve de propriété (arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 15 mars 1985). Il peut donc être soutenu qu'au nombre des accessoires d'une créance cédée figure aussi ce même droit. Un amendement déposé par le Gouvernement lors de l'examen par l'Assemblée nationale de la proposition de loi, devenue la loi du 2 janvier 1981 précitée, explicitait cette analyse à propos des énonciations à faire figurer au bordereau. Le fait que cet amendement n'a pas été adopté et que le bordereau doit se borner à indiquer " toutes les sûretés conventionnelles garantissant éventuellement chaque créance " cédée, laisse intact l'état de la question qui ne peut être tranchée que par les tribunaux. En effet, les sûretés conventionnelles ainsi visées ne constituent pas tous les accessoires d'une créance, au sens large, de l'article 1692 du code civil.
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