Le résumé
L'agriculture est une activité économique différente des autres : elle produit des biens certes marchands mais d'importance vitale. C'est pourquoi le marché agricole mérite une régulation spécifique appropriée, y compris dans le cadre du marché unique européen, pour garantir un revenu convenable aux producteurs et assurer ainsi l'autonomie alimentaire de l'Europe.
Tel n'est pourtant pas le cas, car en Europe, contrairement aux États-Unis, le primat donné au droit de la concurrence l'emporte encore très nettement sur les objectifs de la Politique agricole commune (PAC). Le traité de Rome de 1957 posait certes le principe inverse, mais ce dernier a été rapidement vidé de sa substance. En dépit d'améliorations récentes, l'économie générale du règlement 1308/2013 dit « OCM » et portant Organisation commune des marchés agricoles, « clé de voûte » de la mise en oeuvre des traités européens en ce qui concerne la PAC, demeure restrictive et asymétrique, ne protégeant pas suffisamment nos agriculteurs du pouvoir de marché exorbitant des distributeurs de produits alimentaires.
Depuis de nombreuses années, la commission des affaires européennes du Sénat s'intéresse à ces questions abordées dans trois rapports d'information depuis 2012. Elle est amenée aujourd'hui à y revenir, non seulement en raison de l'actualité de la crise économique et du projet de réforme de la PAC 2021/2027, mais également des difficultés structurelles spécifiques de la filière viande bovine française.
Les agriculteurs français et européens pâtissent de la lenteur avec laquelle les institutions européennes s'engagent dans la voie d'une meilleure régulation. C'est cette voie que le présent rapport d'information se propose d'explorer. La commission des Affaires européenne y plaide, en particulier, en faveur d'une modification des dispositions du règlement « OCM » s'inspirant du Capper-Volstead Act américain du 18 février 1922.
Il ne deviendra possible de « redonner aux agriculteurs français un pouvoir de marché », que si l'on consacre, à l'avenir, un principe favorable aux associations agricoles et si l'on autorise la fixation de prix communs de cession par les vendeurs.