PROJET DE LOI

adopté

le 22 février 1996

N° 84

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

PROJET DE LOI

relatif au supplément de loyer de solidarité.

(Texte définitif.)

Le Sénat a adopté, dans les conditions prévues à l'article 45 (alinéas 2 et 3) de la Constitution, le projet de loi dont la teneur suit :

_______________________

Voir les numéros :

Assemblée nationale (10e législ.) : Première lecture : 2319, 2382 et T.A. 440.

Deuxième lecture : 2506, 2511 et T.A. 461.

2579 et C.M.P. : 2581 et T.A. 486.

Sénat : Première lecture : 151, 167, 168 et T.A. 65 (1995-1996).

Deuxième lecture : 207, 213 et T.A. 80 (1995-1996).

C.M.P. : 241 (1995-1996).

Article premier.

I. - Le chapitre premier du titre IV du livre IV du code de la construction et de l'habitation est intitulé : «Conditions d'attribution des logements et plafonds de ressources. - Supplément de loyer de solidarité. »

II. - Il est créé, dans ce chapitre, une section 1 comportant les articles L. 441-1 à L. 441-2 et intitulée : « Conditions d'attribution des logements et plafonds de ressources. »

III. - Dans ce chapitre, l'article L. 441-3 est remplacé par une section 2 ainsi rédigée :

« Section 2 « Supplément de loyer de solidarité.

«Art. L. 441-3. - Les organismes d'habitations à loyer modéré peuvent exiger des locataires des logements visés au premier alinéa de l'article L. 441-1 le paiement d'un supplément de loyer de solidarité en sus du loyer principal et des charges locatives dès lors qu'au cours du bail les ressources de l'ensemble des personnes vivant au foyer excèdent d'au moins 10 % les plafonds de ressources en vigueur pour l'attribution de ces logements. Ils doivent exiger le paiement d'un tel supplément dès lors qu'au cours du bail le dépassement du plafond de ressources est d'au moins 40 %.

« Les ressources sont appréciées selon les modalités applicables en matière d'attribution des logements. Toutefois, les dernières ressources connues de l'ensemble des personnes vivant au foyer sont prises en compte sur demande du locataire qui justifie que ces ressources sont inférieures d'au moins 10 % à celles de l'année de référence. En outre, il est tenu compte de l'évolution de la composition familiale intervenue dans l'année en cours à la condition qu'elle soit dûment justifiée.

« Les plafonds pris en compte sont ceux qui sont applicables à la date à laquelle le supplément de loyer est exigé.

- Chaque organisme d'habitations à loyer modéré détermine selon les conditions fixées ci-après, les modalités de calcul du montant du supplément de loyer de solidarité.

« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables dans les zones de revitalisation rurale telles que définies par la loi n° 95115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, les grands ensembles et les quartiers d'habitat dégradé mentionnés au I de l'article 1466 A du code général des impôts.

«Art. L. 441-4. - Le montant du supplément de loyer de solidarité est obtenu en appliquant le coefficient de dépassement du plafond de ressources au supplément de loyer de référence du logement.

« Ce montant est plafonné lorsque, cumulé avec le montant du loyer principal, il excède 25 % des ressources de l'ensemble des personnes vivant au foyer.

« Art. L. 441-5. -L'organisme d'habitations à loyer modéré fixe par département les valeurs du coefficient de dépassement du plafond de ressources en fonction de l'importance de ce dépassement. Il peut également tenir compte dans la fixation de ce coefficient du nombre et de l'âge des personnes vivant au foyer.

« Les valeurs de ce coefficient sont au moins égales à celles du coefficient prévu à l'article L. 441-8.

« L'organisme fixe un seuil de dépassement du plafond de ressources en deçà duquel le supplément de loyer n'est pas exigible. Ce seuil ne peut ni être inférieur à 10 % ni excéder 40 %.

« Art. L. 441-6. -L'organisme d'habitations à loyer modéré fixe le montant par mètre carré habitable du supplément de loyer de référence en tenant compte de la qualité et de la situation géographique de l'immeuble ou du groupe d'immeubles.

« Le montant moyen par mètre carré habitable des suppléments de loyer de référence est au moins égal à celui prévu à l'article L. 441-8. Ce montant minimal s'impose à chaque organisme d'habitations à loyer modéré pour ses logements situés dans une même zone et dans un même département.

«Art. L. 441-7. - L'organisme d'habitations à loyer modéré communique la délibération relative au mode de calcul du supplément de loyer au représentant de l'État dans le département du siège de l'organisme et à celui du lieu de situation des logements. À cette délibération, sont annexés les éléments permettant le calcul du montant moyen par mètre carré des suppléments de loyer de référence.

«Cette délibération devient exécutoire à l'expiration du délai d'un mois à compter de sa communication si, dans ce délai, le représentant de l'État dans le département du lieu de situation du logement concerné n'a pas demandé une seconde délibération, notamment eu égard au montant des loyers pratiqués dans le voisinage pour des immeubles ou groupes d'immeubles équivalents et dont les loyers sont fixés en application de l'article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.

« La demande de seconde délibération est motivée. Elle est communiquée aux membres de l'organe délibérant de l'organisme d'habitations à loyer modéré préalablement à la seconde délibération. La seconde délibération est exécutoire dès que le représentant de l'État en a reçu communication.

«Art. L. 441-8. -En l'absence de délibération exécutoire, le supplément de loyer appliqué par l'organisme d'habitations à loyer modéré est calculé par lui en fonction :

« - des valeurs du coefficient de dépassement du plafond de ressources déterminées par décret en Conseil d'État ; le seuil de dépassement du plafond de ressources prévu par ledit décret en deçà duquel le supplément de loyer n'est pas exigible est de 40 % ;

« - du montant par mètre carré habitable du supplément de loyer de référence fixé par décret en Conseil d'État selon les zones géographiques tenant compte notamment de la population des agglomérations.

«Art. L. 441-9. -L'organisme d'habitations à loyer modéré demande annuellement à chaque locataire communication des avis d'imposition ou de non-imposition à l'impôt sur le revenu et des renseignements concernant l'ensemble des personnes vivant au foyer permettant de calculer l'importance du dépassement éventuel du plafond de ressources et de déterminer si le locataire est redevable du supplément de loyer. Le locataire est tenu de répondre à cette demande dans un délai d'un mois. L'organisme d'habitations à loyer modéré n'est pas tenu de présenter cette demande aux locataires bénéficiant de l'aide personnalisée au logement mentionnée à l'article L. 351-1.

« À défaut et après mise en demeure restée infructueuse pendant quinze jours, l'organisme d'habitations à loyer modéré liquide provisoirement le supplément de loyer. Pour cette liquidation, il est fait application d'un coefficient de dépassement du plafond de ressources égal au coefficient maximal adopté par l'organisme ou, à défaut, égal à la valeur maximale prévue par le décret mentionné à l'article L. 441-8. L'organisme d'habitations à loyer modéré perçoit en outre une indemnité pour frais de dossier dont le montant maximum est fixé par décret en Conseil d' État.

« Lorsque le locataire a communiqué les renseignements et avis mentionnés au premier alinéa, le supplément de loyer afférent à la période de retard est liquidé définitivement. Le trop-perçu de supplément de loyer est reversé au locataire dans les deux mois.

« La mise en demeure comporte la reproduction du présent article.

«Art. L. 441-10. -Les organismes d'habitations à loyer modéré communiquent au représentant de l'État dans le département du lieu de situation des logements les renseignements statistiques et financiers permettant l'établissement d'un rapport annuel sur l'application du supplément de loyer dans le département. Ce rapport est soumis pour avis au conseil départemental de l'habitat.

« Le Gouvernement dépose tous les deux ans, sur le bureau des assemblées, un rapport sur l'application du supplément de loyer de solidarité.

«Art. L. 441-11. -L'organisme d'habitations à loyer modéré qui n'a pas exigé le paiement du supplément de loyer ou qui n'a pas procédé aux diligences lui incombant pour son recouvrement, à l'exclusion de celles relevant de la responsabilité propre d'un comptable public, est passible d'une pénalité dont le montant est égal à 50 % des sommes exigibles et non mises en recouvrement.

« La sanction est prononcée par le représentant de l'État dans le département de situation du logement après que l'organisme d'habitations à loyer modéré a été appelé à présenter ses observations.

« Le montant de la pénalité est recouvré au profit de l'État comme les créances de l'État étrangères à l'impôt et au domaine.

«Art. L. 441-12. -Les dispositions de la présente section sont applicables de plein droit nonobstant toute convention contraire.

«Art. L. 441-13. -Les dispositions de la présente section sont applicables aux personnes morales autres que les organismes d'habitations à loyer modéré et les sociétés d'économie mixte, pour les logements à usage locatif leur appartenant et ouvrant droit à l'aide personnalisée au logement en application des 2° et 3° de l'article L. 351-2.

«Art. L. 441-14. -Par dérogation aux articles L. 441-3, L. 44113, L. 472-1-2 et L. 481-3, les dispositions de la présente section ne sont pas applicables aux logements financés à compter du 5 janvier 1977 au moyen de prêts locatifs aidés par l'État accordés par le Crédit foncier de France, aux logements financés au moyen de prêts conventionnés des banques et établissements financiers et, dans les départements d'outre-mer, aux immeubles à loyer moyen.

« Ces dispositions ne sont pas applicables aux logements ayant bénéficié d'une subvention de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat.

«Art. L. 441-15. - Un décret en Conseil d'État détermine en tant que de besoin les conditions d'application de la présente section. »

Art. 2.

Le I de l'article 1466 A du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La liste prévue au premier alinéa est actualisée au moins tous les cinq ans, de façon à tenir compte de l'évolution de la situation des grands ensembles et des quartiers d'habitat dégradé. Elle peut, à la même fin, être complétée entre deux actualisations. Elle est actualisée et complétée après avis du Conseil national des villes et du développement social urbain. »

Art. 3.

À titre transitoire, les renseignements visés à l'article L. 441-9 du code de la construction et de l'habitation détenus par les organismes d'habitations à loyer modéré à partir d'enquêtes réalisées au deuxième semestre 1995 et portant sur les ressources de l'année 1994 peuvent être pris en compte pour le calcul du supplément de loyer de solidarité perçu en 1996.

Art. 4.

I. - Dans la deuxième phrase de l'article L. 442-1-2 du code de la construction et de l'habitation, les mots : « Le représentant de l'État dans le département du siège de l'organisme » sont remplacés par les mots : « Le représentant de l'État dans le département du lieu de situation des logements ».

II. - Les dispositions de l'article L. 442-1-2 du code de la construction et de l'habitation, dans leur rédaction issue du I ci-dessus, sont applicables aux délibérations relatives aux loyers dont la transmission interviendra à compter du 1er octobre 1996.

Art. 5.

L'article L. 442-4 du code de la construction et de l'habitation est ainsi rédigé :

« Art. L. 442-4. - En cas de sous-occupation du logement, il peut être attribué au locataire un nouveau logement correspondant à ses besoins, nonobstant les plafonds de ressources prévus à l'article L. 441-1.»

Art. 6.

I. - Il est rétabli, après l'article L. 442-4 du code de la construction et de l'habitation, un article L. 442-5 ainsi rédigé :

« Art. L. 442-5. - Le Gouvernement dépose tous les trois ans et pour la première fois le 1er juillet 1997, sur le bureau des assemblées, un rapport sur l'occupation des logements d'habitations à loyer modéré et son évolution.

« À cette fin, les organismes d'habitations à loyer modéré communiquent les renseignements statistiques nécessaires au représentant de l'État dans le département du lieu de situation des logements après avoir procédé à une enquête auprès de leurs locataires. Les locataires sont tenus de répondre dans le délai d'un mois. A défaut, le locataire défaillant est redevable à l'organisme d'habitations à loyer modéré d'une pénalité de 50 F, majorée de 50 F par mois entier de retard.

« L'enquête mentionnée à l'alinéa précédent vaut enquête au sens de l'article L. 441-9.

« Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent article, notamment le contenu de l'enquête et la liste des renseignements statistiques. »

H. - Dans l'article L. 481-3 du même code, les mots : « est applicable » sont remplacés par les mots : « et l'article L. 442-5 sont applicables ».

Art. 7.

La dernière phrase de l'article L. 442-10 du code de la construction et de l'habitation est abrogée.

Art. 8.

Il est inséré, après l'article L. 443-12 du code de la construction et de l'habitation, un article L. 443-12-1 ainsi rédigé :

«Art. L. 443-12-1. -Lorsque le locataire achète le logement qu'il occupe, les suppléments de loyer payés au cours des cinq années qui précèdent l'acte authentique s'imputent sur le prix de vente. »

Art. 9.

L'article L. 472-1-2 du code de la construction et de l'habitation est ainsi rédigé :

«Art. L. 472-1-2. -Les dispositions de la section 2 du chapitre premier du titre IV et de l'article L. 442-5 du présent livre sont applicables dans les départements d'outre-mer aux sociétés d'économie mixte constituées en application de la loi n° 46-860 du 30 avril 1946 précitée et aux sociétés d'économie mixte locales pour les logements à usage locatif leur appartenant et construits, acquis ou améliorés avec le concours financier de l'État. »

Art. 10.

Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés les suppléments de loyer fixés en application du barème arrêté par la délibération du conseil d'administration du 8 novembre 1989 de la Régie immobilière de la ville de Paris en tant que la régularité de ces suppléments de loyer serait mise en cause à raison de l'annulation de cette délibération par la décision du Conseil d'État en date du 31 mars 1995.

Art. 11.

Pour l'application de l'article L. 441-3 du code de la construction et de l'habitation dans sa rédaction antérieure à la présente loi, les plafonds de ressources fixés pour l'attribution du logement à loyer modéré sont ceux en vigueur à la date à laquelle le supplément de loyer est exigé. Cette disposition présente un caractère interprétatif.

Art. 12.

Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés les barèmes de supplément de loyer devenus exécutoires avant la date de publication de la présente loi :

- en tant qu'ils ont été établis en fonction du loyer du marché ou en fonction d'un plafond de loyer fixé par l'administration pour certaines catégories de logements à loyer modéré ;

- en tant qu'ils n'ont pas été établis en fonction du nombre ou de l'âge des personnes vivant au foyer.

Sous la même réserve, l'exigibilité des suppléments de loyer ne peut être contestée en tant que ceux-ci résultent des barèmes ainsi validés.

Art. 13.

Les dispositions de la section 2 du chapitre premier du titre IV du livre IV du code de la construction et de l'habitation entreront en vigueur à la date qui sera fixée par le décret en Conseil d'État prévu à l'article L. 441-15 du même code et, au plus tard, dans un délai de quatre mois à compter de la publication de la présente loi.

Toutefois, les dispositions de l'article L. 441-8 relatives à l'absence de délibération exécutoire n'entreront en vigueur qu'à l'expiration du troisième mois suivant la date d'entrée en vigueur prévue au premier alinéa du présent article.

Les dispositions de l'article L. 441-9 sont applicables dès la publication de la présente loi.

Les barèmes établis en application de l'article L. 441-3 du code de la construction et de l'habitation dans sa rédaction antérieure à la présente loi cesseront d'avoir effet lorsque la délibération prévue à l'article L. 441-7 du même code sera exécutoire et au plus tard à l'expiration du troisième mois suivant la date d'entrée en vigueur prévue au premier alinéa du présent article.

Art. 14.

Les dispositions de la présente loi s'appliquent de plein droit, à la date de leur entrée en vigueur, aux baux en cours et aux bénéficiaires du droit au maintien dans les lieux.

Délibéré, en séance publique, à Paris, le 22 février 1996.

Le Président,

Signé : René MONORY.

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