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N° 381
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2014-2015
Enregistré à la Présidence du Sénat le 1 er avril 2015 |
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
tendant à créer une commission d' enquête sur le bilan et le contrôle de la création , de l' organisation , de l' activité et de la gestion des autorités administratives indépendantes ,
PRÉSENTÉE
Par M. Jacques MÉZARD et les membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen,
Sénateurs
(Envoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale.)
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Depuis 1978 et l'apparition de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) à l'occasion de l'adoption du projet de loi relatif à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, le nombre des « autorités administratives indépendantes » n'a cessé de croître au point qu'il est aujourd'hui difficile à déterminer avec précision compte tenu du caractère aléatoire de leurs modalités de dénomination.
En effet, il convient de rappeler que certaines de ces structures - telles l' Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL), la Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI) ou plus récemment la Haute autorité pour la transparence de vie publique (HTVP) - ont été qualifiées d'autorités indépendantes par la loi quand d'autres doivent cette qualité à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, voire aux travaux du Conseil d'État qui, dans son rapport de 2001, a dressé une typologie des organismes susceptibles d'être considérés comme tels. Aussi, on peut considérer qu'il existe aujourd'hui quarante autorités administratives (ou autorités publiques) indépendantes dans notre pays. Autrement dit, cela signifie qu'en moyenne plus d'une autorité administrative indépendante a vu le jour chaque année depuis 1978, cela ne va donc pas sans poser la question de leur création et plus exactement de la nécessité d'avoir régulièrement recours à de nouvelles structures de ce type.
Au-delà des débats relatifs à leur qualification ou à leur nombre, il faut bien reconnaître que l'intervention des autorités administratives indépendantes dans un nombre toujours plus grand de domaines qui couvrent aussi bien la protection de droits et libertés, la régulation de secteurs tels que ceux de l'énergie, des activités ferroviaires, des marchés financiers, des postes et communications électroniques, de la santé, de l'audiovisuel, du nucléaire ou encore de la transparence et du contrôle de la vie publique et de la vie politique leur assure désormais une place importante (et souvent déterminante) au sein de notre dispositif institutionnel si bien qu'on peut s'interroger si elles n'ont pas parfois acquis un pouvoir, allant au-delà même de leurs missions d'origine et au détriment (voire peut-être aussi avec la complicité bienveillante ou l'accord) des pouvoirs exécutif et législatif. C'est la raison pour laquelle le temps est venu de procéder à un bilan précis de l'activité des autorités administratives.
Ce bilan doit impérativement prendre la forme d'un contrôle tant de la création que de l'organisation, de l'activité et de la gestion (pas seulement budgétaire) des autorités administratives indépendantes dans la mesure où tous les travaux publiés à ce jour sur le sujet insistent en particulier sur la faiblesse du contrôle qui s'exerce actuellement sur ces autorités, et sur les difficultés liées à la façon dont elles sont amenées à rendre compte de leur action devant les instances institutionnelles démocratiques, au premier rang desquelles figure le Parlement.
Il y a plus de vingt ans, le Conseil d'État craignait déjà l'apparition de ce qu'il appelait un « conflit négatif de compétences » entre un Gouvernement soucieux de respecter l'indépendance de ces autorités et un Parlement souvent désireux de se tenir à distance de ces structures. Le rapport réalisé en 2006 par notre collègue Patrice GÉLARD dans le cadre de l'Office parlementaire d'évaluation de la législation ou, plus récemment, celui de 2011 des députés René DOSIÈRE et Christian VANNESTE au nom du Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques de l'Assemblée nationale regrettent l'insuffisance du contrôle démocratique exercé sur ces institutions de plus en plus nombreuses et aux domaines de compétences sans cesse élargis. Devant le constat de l'absence bien réelle de toute forme de contrôle effectif, le temps est donc venu de procéder à un véritable contrôle approfondi des autorités administratives indépendantes.
Sans remettre en cause a priori l'existence de telle ou telle autorité administrative indépendante mais devant le double constat de la place prise par de nombreuses de ces autorités dans le fonctionnement de nos institutions et du « pouvoir » dont elles disposent au regard des effets de leurs décisions ou recommandations, les auteurs de la présente proposition de résolution considèrent donc que le Parlement doit, avec les outils et les moyens d'une commission d'enquête parlementaire, établir un bilan et procéder à un contrôle de la création, de l'organisation, de l'activité et de la gestion des autorités administratives indépendantes.
PROPOSITION DE RESOLUTION
Article unique
En application de l'article 51-2 de la Constitution, de l'article 6 de l'ordonnance n°58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires et des articles 6 bis et 11 du Règlement du Sénat, il est créé une commission d'enquête composée de 21 membres sur le bilan et le contrôle de la création, de l'organisation, de l'activité et de la gestion des autorités administratives indépendantes.