PROPOSITION DE LOI visant à restaurer la gynécologie médicale
N°
249
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001
Annexe au procès-verbal de la séance du 3 avril 2001
PROPOSITION DE LOI
visant
à
restaurer
la
spécialité de
gynécologie médicale
,
PRÉSENTÉE
par MM. Serge MATHIEU, Jean BOYER,
James BORDAS, Henri de RAINCOURT,
Louis BOYER, Jean-Claude CARLE, Marcel-Pierre CLEACH, Jean CLOUET,
Charles-Henri de COSSÉ-BRISSAC, Jean-Léonce DUPONT, Jean-Paul
ÉMIN, André FERRAND, Anne HEINIS, Roland du LUART, Michel
PELCHAT, Jean PÉPIN, Xavier PINTAT, André POURNY, Henri REVOL,
François TRUCY,
Sénateurs.
(Renvoyée à la commission des Affaires sociales sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
Santé publique |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Les femmes sont inquiètes. La spécialité de
gynécologie médicale est en voie de disparition. Elles ont
été des milliers à manifester récemment pour
demander sa restauration.
La gynécologie médicale est une spécialité propre
à notre pays. Créée en 1965, cette
spécialité, que tous voisins européens nous envient, a
permis d'obtenir des résultats sanitaires remarquables.
Depuis trente ans, le dépistage et la prévention des cancers
féminins ont été très nettement
améliorés : chez les femmes régulièrement
suivies, le nombre des cancers du col de l'utérus est passé de
près de 6 000 en 1975 à 1 600 en 1995, soit une
réduction de près de 75 % en 20 ans. La mortalité par
cancer du sein chez les femmes de 50 à 69 ans a été
abaissée de 20 % à 30 %.
De très bons résultats ont été également
obtenus dans la prévention des maladies sexuellement transmissibles, des
infections, de l'hystérectomie et des ostéoporoses.
Enfin, la gynécologie médicale a contribué à la
diminution des interventions mutilantes, des stérilités et des
interventions volontaires de grossesse.
Or, au nom de l'uniformisation européenne, cette
spécialité a été supprimée en 1986. Depuis
treize ans, on n'enseigne plus la gynécologie médicale et il n'y
aura quasiment plus un seul gynécologue médical dans vingt-cinq
ans. Aujourd'hui au nombre de 1920, dont 87 % de femmes, ces
spécialistes ne seront plus que 1000 en 2 015 et 500 en 2 020.
Face au mécontentement des Françaises, le gouvernement a, par
arrêté du 25 août 2000, restauré un semblant de
qualification en gynécologie médicale, mais en l'assortissant de
conditions tellement dissuasives qu'il s'avère quasiment certain que
très peu d'étudiants en médecine opteront pour cette
filière.
§ La création de ce diplôme d'études spéciales
n'a pas apaisé les inquiétudes.
1) Contre l'avis du Conseil national de l'enseignement supérieur et de
la recherche et du Conseil supérieur des hôpitaux, le gouvernement
a décidé de mettre en place un diplôme commun à la
gynécologie médicale et obstétrique dans lequel la
gynécologie médicale devient une simple option. La
pérennité de la gynécologie médicale n'est donc
nullement assurée.
Ce dispositif ne garantit absolument pas la formation des gynécologues
médicaux, qui suppose la création de postes d'internes et de
chefs de cliniques dans la spécialité " gynécologie
médicale ", ainsi que la création d'une sous-section du
Conseil national des universités, pour assurer l'enseignement et
encadrer les étudiants.
Seul le rétablissement d'un diplôme de gynécologie
médicale spécifique et autonome, objet de la présente
proposition de loi, permettrait la restauration et la pérennisation de
cette profession, car c'est le seul moyen de garantir la mise en place et le
maintien des postes hospitaliers et universitaires nécessaires au
déploiement de cette spécialité.
2) En outre, obliger ceux qui se destinent à la gynécologie
médicale à faire trois ans de garde très astreignantes
d'obstétrique et de chirurgie alors qu'ils n'exerceront pas ces
spécialités plus tard les dissuadera de prendre cette voie. La
pression des chefs de service d'obstétrique fera le reste.
§ Par ailleurs, le succès de la gynécologie médicale
dans notre pays et les résultats sanitaires remarquables obtenus
grâce à elle tiennent à la possibilité d'avoir
accès directement à un spécialiste et à un
spécialiste femme pour évoquer tout ce qui relève de
l'intimité la plus personnelle.
1) Or, avec la mise en place du "médecin référent" et la
formation de trois mois en gynécologie qui sera bientôt
dispensée à tous les médecins généralistes,
ceux-ci seront incités à procéder eux-mêmes au suivi
gynécologique de leurs patientes.
2) Des baisses de remboursement viendraient d'ailleurs sanctionner les femmes
qui consulteraient directement leur gynécologue.
Le rétablissement de la spécialité de la
gynécologie médicale doit nécessairement avoir pour
corollaire le maintien du remboursement par l'assurance maladie des
consultations et soins s'y rapportant. A défaut, aucun étudiant
n'optera pour cette spécialité à l'avenir très
incertain.
Dans le souci de ne pas alourdir inutilement le budget de l'assurance maladie,
en conditionnant l'accès au gynécologue médical par un
recours préalable obligatoire auprès d'un
généraliste, la présente proposition de loi prévoit
que l'assuré conserve le droit de consulter le gynécologue de son
choix, tout en continuant d'être remboursé par l'assurance maladie
du coût de sa consultation ainsi que des soins prescrits.
Pour que toutes les femmes qui le souhaitent puissent demain être en
mesure de consulter un gynécologue médical, il vous est
demandé, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter la présente
proposition de loi.
PROPOSITION DE LOI
Article 1
er
Après l'article L. 162-2 du Code de la
sécurité
sociale, il est inséré un article L. 162-2-1 A ainsi
rédigé :
"
Art. L. 162-2-1 A.
- En vue de renforcer les dispositifs de
santé publique relatifs :
" - à la prévention, au dépistage et au traitement
des maladies susceptibles d'altérer la santé des femmes, et/ou
sexuellement transmissibles ;
" - à la contraception et à l'interruption volontaire de
grossesse ;
" - au suivi et au traitement de la ménopause ;
" - au traitement de la stérilité ;
" 1° Tout assuré peut consulter librement un
gynécologue médical de son choix ; le coût des
consultations et des soins s'y rapportant est pris en charge par l'assurance
maladie ;
" 2° Il est créé un diplôme d'études
spécialisées de gynécologie médicale distinct du
diplôme de gynécologie obstétrique et chirurgicale, dans
des conditions fixées par décret. "
Article 2
La perte de recettes pour les régimes sociaux est compensée par la création, à due concurrence, d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.