N° 4

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 7 octobre 1998

PROJET DE LOI

autorisant la ratification d'une convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l'explosif ,

PRÉSENTÉ

au nom de M. LIONEL JOSPIN

Premier ministre,

par M. HUBERT VÉDRINE

ministre des affaires étrangères.

(Renvoyé à la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).

Traités et conventions .

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Dans le cadre des Nations unies, une convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l'explosif a été adoptée à New York le 12 janvier 1998, et signée le même jour par la France.

Cette convention a été adoptée par l'Assemblée générale, par consensus, à l'issue d'un travail préparatoire réalisé en deux sessions (février et octobre 1997) par le Comité spécial (6ème commission) créé à cet effet par la résolution 51/210 du 17 décembre 1996.

La France a pris une part active à l'élaboration de cette convention. En particulier, elle en a élaboré le texte avec ses partenaires du G8 (France, Allemagne, Canada, Etats-Unis, Italie, Japon, Royaume-Uni, Russie) en novembre 1996 et l'a présenté aux Nations unies en décembre 1996. Elle a joué un rôle important lors des ultimes discussions de novembre 1997, en sixième commission, qui ont abouti à la résolution proposant son adoption.

La convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l'explosif vise toute personne (auteurs, coauteurs et complices inclus) qui, intentionnellement, livre, pose, ou fait exploser ou détoner, ou tente de le faire, un engin explosif dans un lieu public, une installation gouvernementale ou publique, un système de transport public ou une infrastructure, pour peu que cet attentat vise à :

- provoquer la mort ou des dommages corporels graves ;

- causer des destructions massives entraînant ou risquant d'entraîner des pertes économiques considérables.

La tentative et la complicité de tels actes sont également réprimées.

Le lieu de commission de l'infraction doit être « public », mais cette notion est étendue :

- aux systèmes de transports publics ;

- aux installations gouvernementales ou publiques ;

- aux infrastructures, définies comme tout équipement public ou privé fournissant des services d'utilité publique, tels l'adduction d'eau, l'évacuation des eaux usées, l'énergie, le combustible, ou les communications.

« L'engin explosif ou autre engin meurtrier » s'entend au sens large comme toute arme ou tout engin explosif ou incendiaire qui est conçu pour provoquer la mort, des dommages corporels graves ou d'importants dégâts matériels, ou qui en a la capacité, ou de toute arme ou de tout engin qui est conçu pour provoquer la mort, des dommages corporels graves ou d'importants dégâts matériels, ou qui en a la capacité, par l'émission, la dissémination ou l'impact de produits chimiques toxiques, d'agents biologiques, toxines ou substances analogues ou de rayonnements ou de matières radioactives.

Peuvent se déclarer compétents les Etats du lieu de commission de l'infraction (qui inclut les aéronefs et les navires, et, à l'étranger, les installations publiques telles que les ambassades), les Etats de la nationalité de l'auteur, les Etats de la nationalité des victimes, les Etats auxquels les auteurs de l'infraction demandent d'accomplir un acte quelconque ou de s'en abstenir.

Cette convention est une convention d'incrimination qui demande aux Etats d'ériger en infraction pénale les faits précités, et qui comporte un dispositif juridique de coopération internationale fondé sur le principe « juger ou extrader », et des modalités classiques d'entraide et d'extradition.

Il convient de noter que cette convention, à l'instar des autres conventions anti-terroristes, prohibe le refus d'extrader pour motif politique. Néanmoins, cette disposition est contrebalancée par la possibilité réaffirmée de refuser l'extradition lorsque cette dernière a été présentée aux fins de poursuivre ou de punir une personne pour des considérations de race, de religion, de nationalité, d'origine ethnique, ou d'opinions politiques, ou de lui porter préjudice ou d'aggraver sa situation. En outre, la convention contient des garanties relatives à la protection des droits de la personne soupçonnée, en particulier quant à sa détention et à son extradition.

Cette convention prévoit plusieurs dispositions (dernier alinéa du préambule, article 1/4, article 19/2) relatives à l'exclusion des forces armées de son champ d'application.

La France n'entend pas faire une réserve sur la procédure du règlement des différends au terme de laquelle tout différend entre les Etats Parties sur l'interprétation ou l'application de la convention, qui ne peut être réglé par la négociation, sera soumis à l'arbitrage à la demande de l'un d'eux. Si dans les six mois qui suivent la date de la demande d'arbitrage les Parties ne parviennent pas à se mettre d'accord sur l'organisation de l'arbitrage, l'une quelconque d'entre elles peut soumettre le différend à la Cour internationale de justice, en déposant une requête conformément au statut de la Cour.

Cette convention est ouverte à la signature de tous les Etats du
12 janvier 1998 au 31 décembre 1999, au siège de l'Organisation des Nations unies, à New York. Les instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation seront déposés auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations unies. Elle est ouverte à l'adhésion de tout Etat. Les instruments d'adhésion seront déposés auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations unies. Elle entrera en vigueur le trentième jour qui suivra la date de dépôt auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations unies du vingt-deuxième instrument de ratification.

Tout Etat Partie peut dénoncer la présente convention par voie de notification écrite adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations unies. Cette dénonciation prendra effet un an après la date à laquelle la notification aura été reçue par le Secrétaire général de l'Organisation des Nations unies.

Telles sont les principales observations qu'appelle la convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l'explosif faite à New York le 12 janvier 1998 qui, comportant des dispositions de nature législative, est soumise au Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.

PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre des affaires étrangères,

Vu l'article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi autorisant la ratification d'une convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l'explosif, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat, sera présenté au Sénat par le ministre des affaires étrangères, qui sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.

Article unique

Est autorisée la ratification de la convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l'explosif, faite à New York le 12 janvier 1998, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Fait à Paris, le 30 septembre 1998

Signé : LIONEL JOSPIN

Par le Premier ministre :

Le ministre des affaires étrangères,

Signé : HUBERT VÉDRINE


CONVENTION INTERNATIONALE
pour la répression des attentats
terroristes à l'explosif,
faite à New York le 12 janvier 1998


CONVENTION INTERNATIONALE
pour la répression des attentats terroristes à l'explosif

Les Etats parties à la présente Convention,
Ayant présents à l'esprit les buts et principes de la Charte des Nations unies concernant le maintien de la paix et de la sécurité internationales et le développement des relations de bon voisinage, d'amitié et de coopération entre les Etats ;
Profondément préoccupés par la multiplication, dans le monde entier, des actes de terrorisme sous toutes ses formes et manifestations ;
Rappelant la Déclaration du cinquantième anniversaire de l'Organisation des Nations unies en date du 24 octobre 1995 ;
Rappelant également la déclaration sur les mesures visant à éliminer le terrorisme international annexée à la résolution 49/60 que l'assemblée générale des Nations unies a adoptée le 9 décembre 1994, dans laquelle les « Etats membres de l'Organisation des Nations unies réaffirment solennellement leur condamnation catégorique, comme criminels et injustifiables, de tous les actes, méthodes et pratiques terroristes, où qu'ils se produisent et quels qu'en soient les auteurs, notamment ceux qui compromettent les relations amicales entre les Etats et les peuples et menacent l'intégrité territoriale et la sécurité des Etats » ;
Notant que la déclaration invite par ailleurs les Etats « à examiner d'urgence la portée des dispositions juridiques internationales en vigueur qui concernent la prévention, la répression et l'élimination du terrorisme sous toutes ses formes et manifestations, afin de s'assurer qu'il existe un cadre juridique général couvrant tous les aspects de la question » ;
Rappelant en outre la résolution 51/210 du 17 décembre 1996 et la Déclaration complétant la Déclaration de 1994 sur les mesures visant à éliminer le terrorisme international qui y est annexée ;
Notant également que les attentats terroristes perpétrés au moyen d'engins explosifs ou d'autres engins meurtriers sont de plus en plus courants ;
Notant en outre que les instruments juridiques multilatéraux existants ne traitent pas de manière adéquate de ce type d'attentat ;
Convaincus de la nécessité urgente de développer une coopération internationale entre les Etats pour l'élaboration et l'adoption de mesures efficaces destinées à prévenir ce type d'acte terroriste et à en poursuivre et punir les auteurs ;
Considérant que ces attentats sont un sujet de vive préoccupation pour la communauté internationale tout entière ;
Notant que les activités des forces armées des Etats sont régies par des règles de droit international qui se situent hors du cadre de la présente Convention et que l'exclusion de certains actes du champ d'application de la Convention n'excuse ni ne rend licites des actes par ailleurs illicites et n'empêche pas davantage l'exercice de poursuites sous l'empire d'autres lois,
sont convenus de ce qui suit :

Article 1 er

Aux fins de la présente Convention :
1.  « Installation gouvernementale ou publique » s'entend de tout équipement ou de tout moyen de transport de caractère permanent ou temporaire qui est utilisé ou occupé par des représentants d'un Etat, des membres du Gouvernement, du Parlement ou de la magistrature, ou des agents ou personnels d'un Etat ou de toute autre autorité ou entité publique, ou par des agents ou personnels d'une organisation intergouvernementale, dans le cadre de leurs fonctions officielles.
2.  « Infrastructure » s'entend de tout équipement public ou privé fournissant des services d'utilité publique, tels l'adduction d'eau, l'évacuation des eaux usées, l'énergie, le combustible ou les communications.
3.  « Engin explosif ou autre engin meurtrier » s'entend :
a) De toute arme ou de tout engin explosif ou incendiaire qui est conçu pour provoquer la mort, des dommages corporels graves ou d'importants dégâts matériels, ou qui en a la capacité ; ou
b) De toute arme ou de tout engin qui est conçu pour provoquer la mort, des dommages corporels graves ou d'importants dégâts matériels, ou qui en a la capacité, par l'émission, la dissémination ou l'impact de produits chimiques toxiques, d'agents biologiques, toxines ou substances analogues ou de rayonnements ou de matières radioactives.
4.  « Forces armées d'un Etat » s'entend des forces qu'un Etat organise, entraîne et équipe conformément à son droit interne essentiellement aux fins de la défense nationale ou de la sécurité nationale, ainsi que des personnes qui agissent à l'appui desdites forces armées et qui sont placées officiellement sous leur commandement, leur autorité et leur responsabilité.
5.  « Lieu public » s'entend des parties de tout bâtiment, terrain, voie publique, cours d'eau et autre endroit qui sont accessibles ou ouverts au public, de façon continue, périodique ou occasionnelle, et comprend tout lieu à usage commercial, culturel, historique, éducatif, religieux, officiel, ludique, récréatif ou autre qui est ainsi accessible ou ouvert au public.
6. « Système de transport public » s'entend de tous les équipements, véhicules et moyens, publics ou privés, qui sont utilisés dans le cadre de services de transport de personnes ou de marchandises accessibles au public.

Article 2

1. Commet une infraction au sens de la présente Convention toute personne qui, illicitement ou intentionnellement, livre, pose ou fait exploser ou détoner un engin explosif ou autre engin meurtrier dans ou contre un lieu public, une installation gouvernementale ou une autre installation publique, un système de transport public ou une infrastructure :
a) Dans l'intention de provoquer la mort ou des dommages corporels graves ; ou
b) Dans l'intention de causer des destructions massives de ce lieu, cette installation, ce système ou cette infrastructure, lorsque ces destructions entraînent ou risquent d'entraîner des pertes économiques considérables.
2. Commet également une infraction quiconque tente de commettre une infraction au sens du paragraphe 1.
3. Commet également une infraction quiconque :
a) Se rend complice d'une infraction au sens des paragraphes 1 ou 2 ;
b) Organise la commission d'une infraction au sens des paragraphes 1 ou 2 ou donne l'ordre à d'autres personnes de la commettre ;
c) Contribue de toute autre manière à la commission de l'une ou plusieurs des infractions visées aux paragraphes 1 ou 2 par un groupe de personnes agissant de concert : sa contribution doit être délibérée et faite soit pour faciliter l'activité criminelle générale du groupe ou en servir les buts, soit en pleine connaissance de l'intention du groupe de commettre l'infraction ou les infractions visées.

Article 3

La présente Convention ne s'applique pas lorsque l'infraction est commise à l'intérieur d'un seul Etat, que l'auteur présumé et les victimes de l'infraction sont des nationaux de cet Etat, que l'auteur présumé de l'infraction se trouve sur le territoire de cet Etat, et qu'aucun Etat n'a de raison, en vertu du paragraphe 1 ou du paragraphe 2 de l'article 6 de la présente Convention, d'établir sa compétence étant entendu que les dispositions des articles 10 à 15, selon qu'il convient, s'appliquent en pareil cas.

Article 4

Chaque Etat partie prend les mesures qui peuvent être nécessaires pour :
a) Qualifier d'infraction pénale au regard de son droit interne les infractions visées à l'article 2 de la présente Convention ;
b) Réprimer lesdites infractions par des peines prenant dûment en compte leur gravité.

Article 5

Chaque Etat partie adopte les mesures qui peuvent être nécessaires y compris, s'il y a lieu, une législation interne pour assurer que les actes criminels relevant de la présente Convention, en particulier ceux qui sont conçus ou calculés pour provoquer la terreur dans la population, un groupe de personnes ou chez des individus ne puissent en aucune circonstance être justifiés par des considérations de nature politique, philosophique, idéologique, raciale, ethnique, religieuse ou d'autres motifs analogues, et qu'ils soient passibles de peines à la mesure de leur gravité.

Article 6

1.  Chaque Etat partie adopte les mesures qui peuvent être nécessaires pour établir sa compétence en ce qui concerne les infractions visées à l'article 2 lorsque :
a) L'infraction a été commise sur son territoire ;
b) L'infraction a été commise à bord d'un navire battant son pavillon ou d'un aéronef immatriculé conformément à sa législation au moment où l'infraction a été commise ;
c) L'infraction a été commise par l'un de ses ressortissants.
2. Chaque Etat partie peut également établir sa compétence sur de telles infractions lorsque :
a) L'infraction est commise contre l'un de ses ressortissants ;
b) L'infraction est commise contre une installation publique dudit Etat située en dehors de son territoire, y compris une ambassade ou des locaux diplomatiques ou consulaires dudit Etat ;
c) L'infraction est commise par un apatride qui a sa résidence habituelle sur son territoire ;
d) L'infraction est commise avec l'objectif de contraindre ledit Etat à accomplir un acte quelconque ou à s'en abstenir ;
e) L'infraction est commise à bord d'un aéronef exploité par le gouvernement dudit Etat.
3. Lors de la ratification, de l'acceptation, de l'approbation de la présente Convention ou de l'adhésion à celle-ci, chaque Etat partie informe le secrétaire général de l'Organisation des Nations unies de la compétence qu'il a établie en vertu de sa législation interne conformément au paragraphe 2. En cas de modification, l'Etat partie concerné en informe immédiatement le secrétaire général.
4.  Chaque Etat partie adopte également les mesures qui peuvent être nécessaires pour établir sa compétence en ce qui concerne les infractions visées à l'article 2 dans les cas où l'auteur présumé de l'infraction se trouve sur son territoire et où il ne l'extrade pas vers l'un quelconque des Etats parties qui ont établi leur compétence conformément aux paragraphes 1 et 2.
5.  La présente Convention n'exclut l'exercice d'aucune compétence pénale établie par un Etat partie conformément à son droit interne.

Article 7

1.  Lorsqu'il est informé que l'auteur ou l'auteur présumé d'une infraction visée à l'article 2 pourrait se trouver sur son territoire, l'Etat partie concerné prend les mesures qui peuvent être nécessaires conformément à sa législation interne pour enquêter sur les faits portés à sa connaissance.
2.  S'il estime que les circonstances le justifient, l'Etat partie sur le territoire duquel se trouve l'auteur ou l'auteur présumé de l'infraction prend les mesures appropriées en vertu de sa législation interne pour assurer la présence de cette personne aux fins de poursuites ou d'extradition.
3.  Toute personne à l'égard de laquelle sont prises les mesures visées au paragraphe 2 du présent article est en droit :
a) De communiquer sans retard avec le plus proche représentant qualifié de l'Etat dont elle a la nationalité ou qui est autrement habilité à protéger les droits de ladite personne ou, s'il s'agit d'une personne apatride, de l'Etat sur le territoire duquel elle a sa résidence habituelle ;
b) De recevoir la visite d'un représentant de cet Etat ;
c) D'être informée des droits que lui confèrent les alinéas a et b .
4.  Les droits visés au paragraphe 3 s'exercent dans le cadre des lois et règlements de l'Etat sur le territoire duquel se trouve l'auteur ou l'auteur présumé de l'infraction, étant entendu toutefois que ces lois et règlements doivent permettre la pleine réalisation des fins pour lesquelles les droits sont accordés en vertu du paragraphe 3.
5.  Les dispositions des paragraphes 3 et 4 sont sans préjudice du droit de tout Etat partie ayant établi sa compétence conformément à l'alinéa c du paragraphe 1 ou à l'alinéa c du paragraphe 2 de l'article 6 d'inviter le Comité international de la Croix-Rouge à communiquer avec l'auteur présumé de l'infraction et à lui rendre visite.
6.  Lorsqu'un Etat partie a placé une personne en détention conformément aux dispositions du présent article, il avise immédiatement de cette détention, ainsi que des circonstances qui la justifient, directement ou par l'intermédiaire du secrétaire général de l'Organisation des Nations unies, les Etats parties qui ont établi leur compétence conformément aux paragraphes 1 et 2 de l'article 6 et, s'il le juge opportun, tous autres Etats parties intéressés. L'Etat qui procède à l'enquête visée au paragraphe 1 en communique rapidement les conclusions auxdits Etats parties et leur indique s'il entend exercer sa compétence.

Article 8

1.  Dans les cas où les dispositions de l'article 6 sont applicables, l'Etat partie sur le territoire duquel se trouve l'auteur présumé de l'infraction est tenu, s'il ne l'extrade pas, de soumettre l'affaire, sans retard excessif et sans aucune exception, que l'infraction ait été ou non commise sur son territoire, à ses autorités compétentes pour l'exercice de l'action pénale selon une procédure conforme à la législation de cet Etat. Ces autorités prennent leurs décisions dans les mêmes conditions que pour toute autre infraction de caractère grave conformément aux lois de cet Etat.
2.  Chaque fois que, en vertu de la législation interne, un Etat partie n'est autorisé à extrader ou à remettre un de ses ressortissants qu'à la condition que l'intéressé lui sera remis pour purger la peine qui lui a été imposée à l'issue du procès ou de la procédure pour lesquels l'extradition ou la remise avait été demandée, et que cet Etat et l'Etat requièrent l'extradition acceptent cette formule et les autres conditions qu'ils peuvent juger appropriées, l'extradition ou la remise conditionnelle suffit pour dispenser l'Etat partie requis de l'obligation prévue au paragraphe 1.

Article 9

1.  Les infractions prévues à l'article 2 sont de plein droit considérées comme cas d'extradition dans tout traité d'extradition conclu entre Etats parties avant l'entrée en vigueur de la présente Convention. Les Etats parties s'engagent à considérer ces infractions comme cas d'extradition dans tout traité d'extradition à conclure par la suite entre eux.
2.  Lorsqu'un Etat partie qui subordonne l'extradition à l'existence d'un traité est saisi d'une demande d'extradition par un autre Etat partie avec lequel il n'est pas lié par un traité d'extradition, l'Etat partie requis a la latitude de considérer la présente Convention comme constituant la base juridique de l'extradition en ce qui concerne les infractions prévues à l'article 2. L'extradition est subordonnée aux autres conditions prévues par la législation de l'Etat partie requis.
3.  Les Etats parties qui ne subordonnent pas l'extradition à l'existence d'un traité reconnaissent les infractions prévues à l'article 2 comme cas d'extradition entre eux dans les conditions prévues par la législation de l'Etat requis.
4.  Les infractions prévues à l'article 2 sont, le cas échéant, considérées aux fins d'extradition entre Etats parties comme ayant été commises tant au lieu de leur perpétration que sur le territoire des Etats ayant établi leur compétence conformément aux paragraphes 1 et 2 de l'article 6.
5.  Les dispositions de tous les traités ou accords d'extradition conclus entre Etats parties relatives aux infractions visées à l'article 2 sont réputées être modifiées entre Etats parties dans la mesure où elles sont incompatibles avec la présente Convention.

Article 10

1. Les Etats parties s'accordent l'entraide judiciaire la plus large possible pour toute enquête ou procédure pénale ou procédure d'extradition relative aux infractions visées à l'article 2, y compris pour l'obtention des éléments de preuve dont ils disposent et qui sont nécessaires aux fins de la procédure.
2.  Les Etats parties s'acquittent des obligations qui leur incombent en vertu du paragraphe 1 en conformité avec tout traité ou accord d'entraide judiciaire qui peut exister entre eux. En l'absence d'un tel traité ou accord, les Etats parties s'accordent cette entraide en conformité avec leur législation interne.

Article 11

Pour les besoins de l'extradition ou de l'entraide judiciaire entre Etats parties, aucune des infractions visées à l'article 2 n'est considérée comme une infraction politique, comme une infraction connexe à une infraction politique ou comme une infraction inspirée par des mobiles politiques. En conséquence, une demande d'extradition ou d'entraide judiciaire fondée sur une telle infraction ne peut être refusée pour la seule raison qu'elle concerne une infraction politique, une infraction connexe à une infraction politique, ou une infraction inspirée par des mobiles politiques.

Article 12

Aucune disposition de la présente Convention ne doit être interprétée comme impliquant une obligation d'extradition ou d'entraide judiciaire si l'Etat partie requis a des raisons sérieuses de croire que la demande d'extradition pour les infractions visées à l'article 2 ou la demande d'entraide concernant de telles infractions a été présentée aux fins de poursuivre ou de punir une personne pour des considérations de race, de religion, de nationalité, d'origine ethnique ou d'opinions politiques, ou que donner suite à cette demande porterait préjudice à la situation de cette personne pour l'une quelconque de ces considérations.

Article 13

1.  Toute personne détenue ou purgeant une peine sur le territoire d'un Etat partie dont la présence dans un autre Etat partie est requise aux fins de témoignage ou d'identification ou en vue d'apporter son concours à l'établissement des faits dans le cadre de l'enquête ou des poursuites engagées en vertu de la présente Convention peut faire l'objet d'un transfert si les conditions ci-après sont réunies :
a) Ladite personne y donne librement son consentement en toute connaissance de cause ;
b) Les autorités compétentes des deux Etats concernés y consentent, sous réserve des conditions qu'ils peuvent juger appropriées.
2.  Aux fins du présent article :
a) L'Etat vers lequel le transfert est effectué a le pouvoir et l'obligation de garder l'intéressé en détention, sauf demande ou autorisation contraire de la part de l'Etat à partir duquel la personne a été transférée ;
b) L'Etat vers lequel le transfert est effectué s'acquitte sans retard de l'obligation de remettre l'intéressé à la garde de l'Etat à partir duquel le transfert a été effectué, conformément à ce qui aura été convenu au préalable ou à ce que les autorités compétentes des deux Etats auront autrement décidé ;
c) L'Etat vers lequel le transfert est effectué ne peut exiger de l'Etat à partir duquel le transfert est effectué qu'il engage une procédure d'extradition concernant l'intéressé ;
d) Il est tenu compte de la période que l'intéressé a passée en détention dans l'Etat vers lequel il a été transféré aux fins du décompte de la peine à purger dans l'Etat à partir duquel il a été transféré.
3.  A moins que l'Etat partie à partir duquel une personne doit être transférée, conformément aux dispositions du présent article, ne donne son accord, ladite personne, quelle qu'en soit la nationalité, ne peut pas être poursuivie ou détenue ou soumise à d'autres restrictions à sa liberté de mouvement sur le territoire de l'Etat auquel elle est transférée à raison d'actes ou condamnations antérieures à son départ du territoire de l'Etat à partir duquel elle a été transférée.

Article 14

Toute personne placée en détention ou contre laquelle toute autre mesure est prise ou une procédure est engagée en vertu de la présente Convention se voit garantir un traitement équitable et tous les droits et garanties conformes à la législation de l'Etat sur le territoire duquel elle se trouve et aux dispositions applicables du droit international, y compris celles qui ont trait aux droits de l'homme.

Article 15

Les Etats parties collaborent à la prévention des infractions prévues à l'article 2, en particulier :
a) En prenant toutes les mesures possibles, y compris, le cas échéant, en adaptant leur législation interne, afin de prévenir ou contrarier la préparation, sur leurs territoires respectifs, des infractions destinées à être commises à l'intérieur ou à l'extérieur de leurs territoires, notamment des mesures interdisant sur leurs territoires les activités illégales d'individus, de groupes et d'organisations qui encouragent, fomentent, organisent, financent en connaissance de cause ou commettent les infractions visées à l'article 2 ;
b) En échangeant des renseignements exacts et vérifiés en conformité avec les dispositions de leur législation interne et en coordonnant les mesures administratives et autres prises, le cas échéant, afin de prévenir la perpétration des infractions visées à l'article 2 ;
c) Le cas échéant, grâce à la recherche-développement portant sur les méthodes de détection d'explosifs et d'autres substances dangereuses pouvant causer la mort ou provoquer des dommages corporels, à des consultations sur l'établissement de normes pour le marquage des explosifs en vue d'en identifier l'origine lors des enquêtes effectuées à la suite d'explosions, à des échanges d'informations relatives aux mesures de prévention, à la coopération et au transfert de technologie, de matériel et de moyens connexes.

Article 16

L'Etat partie dans lequel une action pénale a été engagée contre l'auteur présumé de l'infraction en communique, dans les conditions prévues par sa législation interne ou par les procédures applicables, le résultat définitif au secrétaire général de l'Organisation des Nations unies, qui en informe les autres Etats parties.

Article 17

Les Etats parties s'acquittent des obligations découlant de la présente Convention dans le respect des principes de l'égalité souveraine et de l'intégrité territoriale des Etats, ainsi que celui de la non-ingérence dans les affaires intérieures des autres Etats.

Article 18

Aucune des dispositions de la présente Convention n'habilite un Etat partie à exercer sur le territoire d'un autre Etat partie une compétence ou des fonctions qui sont exclusivement réservées aux autorités de cet autre Etat partie par son droit interne.

Article 19

1.  Aucune disposition de la présente Convention ne modifie les autres droits, obligations et responsabilités qui découlent pour les Etats et les individus du droit international, en particulier les buts et principes de la Charte des Nations unies, et du droit international humanitaire.
2.  Les activités des forces armées en période de conflit armé, au sens donné à ces termes en droit international humanitaire, qui sont régies par ce droit ne sont pas régies par la présente Convention, et les activités menées par les forces armées d'un Etat dans l'exercice de leurs fonctions officielles, en tant qu'elles sont régies par d'autres règles de droit international, ne sont pas non plus régies par la présente Convention.

Article 20

1.  Tout différend entre des Etats parties concernant l'interprétation ou l'application de la présente Convention qui ne peut pas être réglé par voie de négociation dans un délai raisonnable est soumis à l'arbitrage, à la demande de l'un de ces Etats. Si, dans les six mois qui suivent la date de la demande d'arbitrage, les parties ne parviennent pas à se mettre d'accord sur l'organisation de l'arbitrage, l'une quelconque d'entre elles peut soumettre le différend à la Cour internationale de justice, en déposant une requête conformément au statut de la cour.
2.  Tout Etat peut, au moment où il signe, ratifie, accepte ou approuve la présente Convention ou y adhère, déclarer qu'il ne se considère pas lié par les dispositions du paragraphe 1. Les autres Etats parties ne sont pas liés par lesdites dispositions envers tout Etat partie qui a formulé une telle réserve.
3.  Tout Etat qui a formulé une réserve conformément aux dispositions du paragraphe 2 peut à tout moment lever cette réserve par une notification adressée au secrétaire général.

Article 21

1.  La présente Convention est ouverte à la signature de tous les Etats du 12 janvier 1998 au 31 décembre 1999, au siège de l'Organisation des Nations unies, à New York.
2.  La présente Convention sera ratifiée, acceptée ou approuvée. Les instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation seront déposés auprès du secrétaire général de l'Organisation des Nations unies.
3.  La présente Convention est ouverte à l'adhésion de tout Etat. Les instruments d'adhésion seront déposés auprès du secrétaire général de l'Organisation des Nations unies.

Article 22

1.  La présente Convention entrera en vigueur le trentième jour qui suivra la date de dépôt auprès du secrétaire général de l'Organisation des Nations unies du vingt-deuxième instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion.
2.  Pour chacun des Etats qui ratifieront, accepteront ou approuveront la Convention ou y adhéreront après le dépôt du vingt-deuxième instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion, la convention entrera en vigueur le trentième jour après le dépôt par cet Etat de son instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion.

Article 23

1.  Tout Etat partie peut dénoncer la présente Convention par voie de notification écrite adressée au secrétaire général de l'Organisation des Nations unies.
2.  La dénonciation prendra effet un an après la date à laquelle la notification aura été reçue par le secrétaire général de l'Organisation des Nations unies.

Article 24

L'original de la présente Convention, dont les textes anglais, arabe, chinois, espagnol, français et russe font également foi, sera déposé auprès du secrétaire général de l'Organisation des Nations unies, qui en fera tenir copie certifiée conforme à tous les Etats.
En foi de quoi les soussignés, dûment autorisés à cet effet par leurs gouvernements respectifs, ont signé la présente Convention, qui a été ouverte à la signature à New York le 12 janvier 1998.

Déclaration en vertu de l'article 6-3

« Conformément à l'article 6-3 de la Convention, la France établit sa compétence sur les infractions visées à l'article 2 dans tous les cas prévus à l'article 6-1 et 6-2. »
(cf. note 1)

NOTE (S) :

(1) TCA . - Imprimerie des Journaux officiels, Paris

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