Projet de loi relatif aux privilèges et immunités accordés à l'Institut d'études de sécurité et au centre satellitaire de l'Union européenne
N°
324
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002
Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 21
février 2002
Enregistré à la Présidence du Sénat le 12 juin
2002
PROJET DE LOI
autorisant l'approbation de la décision des représentants des
Gouvernements des Etats membres de l'Union européenne, concernant les
privilèges
et
immunités
accordés à
l'
Institut
d'études de sécurité
et au
Centre satellitaire de l'Union européenne
, ainsi qu'à
leurs organes et aux membres de leur personnel,
PRÉSENTÉ
au nom de M. JEAN-PIERRE RAFFARIN,
Premier ministre,
par M. DOMINIQUE DE VILLEPIN,
Ministre des affaires étrangères, de la coopération
et de la francophonie.
( Renvoyé à la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
Traités et conventions. |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Une décision des représentants des Gouvernements des Etats
membres de l'Union européenne, réunis au sein du Conseil,
concernant les privilèges et immunités accordés à
l'Institut d'études de sécurité et au Centre satellitaire
de l'Union européenne, ainsi qu'à leurs organes et aux membres de
leur personnel, a été adoptée à Bruxelles le 15
octobre 2001.
Afin de donner sa pleine dimension à la politique européenne de
sécurité et de défense (PESD), l'Union européenne a
décidé, lors du Conseil européen de Nice (7-8
décembre 2000), de prendre à sa charge les tâches qui
étaient dévolues à l'Union de l'Europe occidentale (UEO).
Le dernier conseil ministériel de l'UEO (Marseille, 13 novembre 2000)
avait préalablement donné son accord à une telle reprise.
En conséquence, le Conseil affaires générales du
20 juillet 2001 a décidé la création de deux
agences indépendantes de l'Union européenne, au titre des actions
communes PESC n° 554 et n° 555 (prises sur le fondement de
l'article 14 du traité sur l'Union européenne). La France a
obtenu que l'Institut d'études de sécurité soit maintenu
à Paris. Le Centre satellitaire de l'Union européenne restera
localisé à Torrejon (Espagne).
Conformément à la décision prise par le Conseil
européen de Nice, ces deux agences, qui incorporent les structures
correspondantes de l'UEO, ont pour vocation de contribuer au
développement de la politique européenne de
sécurité et de défense (PESD).
L'Institut d'études de sécurité a pour mission
d'établir des documents de recherche et d'analyse dans le domaine de la
PESC/PESD et d'organiser des séminaires. Par ailleurs, l'Institut
enrichira le dialogue transatlantique en organisant des activités
semblables à celles du Forum transatlantique de l'UEO et entretiendra un
réseau d'échanges avec d'autres instituts de recherche et groupes
de réflexion au sein et en dehors de l'Union européenne.
Le Centre satellitaire doit soutenir le processus de prise de décision
de l'Union dans le cadre de la PESC/PESD, en fournissant du matériel
résultant de l'analyse de l'imagerie satellitaire et de données
collatérales, y compris le cas échéant de l'imagerie
aérienne.
Afin de faciliter le fonctionnement de l'Institut et du Centre, il est
nécessaire d'accorder à ces nouvelles agences et à leur
personnel les privilèges, immunités et facilités
indispensables à leur fonctionnement et dont elles
bénéficiaient jusqu'à présent au titre de l'UEO.
La décision du 20 juillet 2001 se présente sous la forme d'un
accord de siège classique : les locaux et avoirs des agences
bénéficient de l'inviolabilité et de l'immunité de
juridiction (
article 1
er
), de même que leurs
archives (
article 2
).
Les agences bénéficient, dans le cadre de leurs fonctions
officielles, de l'exonération des impôts directs et des taxes et
droits indirects (
article 3
).
La liberté de communication est garantie par l'
article
4
.
L'entrée et le séjour du personnel sont facilités par le
pays hôte (
article 5
).
Les membres des organes et du personnel des agences bénéficient
de l'immunité de juridiction et de l'inviolabilité de leurs
documents dans le cadre de leurs fonctions officielles. Les membres du
personnel qui sont soumis à un prélèvement interne sur
leurs salaires sont exonérés d'impôt sur le revenu
(
article 6
). Le montant des traitements et salaires est toutefois pris
en compte pour établir l'impôt dû sur les autres revenus.
L'
article 7
prévoit que les immunités ne sont pas
accordées dans le cas d'accident de la circulation.
Les agences communiquent au pays hôte la liste de leur personnel afin de
permettre l'exonération de l'impôt sur le revenu (
article
8
).
L'
article
10
prévoit que les immunités des agences
et du personnel qui entraveraient l'action de la justice pourraient être
levées. Dans le cas d'une perquisition ou d'une saisie effectuée
à la requête des autorités judiciaires, le directeur de
l'agence devra être présent.
Le règlement des différents concernant la levée de
l'immunité d'une agence prévoit que le Conseil de l'Union
européenne tranchera le cas en statuant à l'unanimité
(
article
11
).
L'entrée en vigueur de la décision se fera le
1
er
janvier 2002, si tous les Etats membres ont
achevé leur procédure d'approbation (
article
12
).
Cet accord relatif aux privilèges et immunités des agences
s'avère donc, en définitive, proche de celui dont elles
bénéficiaient sous le régime de la convention sur le
statut de l'Union de l'Europe occidentale, des représentants nationaux
et du personnel international adoptée à Paris le 11 mai 1955. Son
adoption était indispensable car, en l'absence d'un tel instrument, il
aurait été nécessaire de mettre en oeuvre un plan social
pour le personnel, fort coûteux en raison du règlement de l'UEO.
Telles sont les principales observations qu'appelle la décision des
représentants des Gouvernements des Etats membres de l'Union
européenne, réunis au sein du Conseil, concernant les
privilèges et immunités accordés à l'Institut
d'études de sécurité et au Centre satellitaire de l'Union
européenne, ainsi qu'à leurs organes et aux membres de leur
personnel, et qui, comportant des dispositions de nature législative,
est soumise au Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.
PROJET DE LOI
Le
Premier ministre,
Sur le rapport du ministre des affaires étrangères, de la
coopération et de la francophonie,
Vu l'article 39 de la Constitution,
Décrète :
Le présent projet de loi autorisant l'approbation de la décision
des représentants des Gouvernements des Etats membres de l'Union
européenne, concernant les privilèges et immunités
accordés à l'Institut d'études de sécurité
et au Centre satellitaire de l'Union européenne, ainsi qu'à leurs
organes et aux membres de leur personnel, délibéré en
Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat, sera
présenté au Sénat par le ministre des affaires
étrangères, de la coopération et de la francophonie, qui
sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.
Article unique
Est
autorisée l'approbation de la décision des représentants
des Gouvernements des Etats membres de l'Union européenne, réunis
au sein du Conseil, concernant les privilèges et immunités
accordés à l'Institut d'études de sécurité
et au Centre satellitaire de l'Union européenne, ainsi qu'à leurs
organes et aux membres de leur personnel, signée à Bruxelles le
15 octobre 2001, et dont le texte est annexé à la
présente loi.
Fait à Paris, le 12 juin 2002
Signé : JEAN-PIERRE RAFFARIN
Par le Premier ministre :
Le ministre des affaires étrangères, de la coopération et
de la francophonie,
Signé : DOMINIQUE DE VILLEPIN
D É C I S I O N
des
représentants des Gouvernements des Etats membres
de l'Union
européenne, réunis au sein du Conseil, concernant les
privilèges
et immunités accordés à l'Institut
d'études de sécurité
et au Centre satellitaire de
l'Union européenne,
ainsi qu'à leurs organes et aux membres de
leur personnel
Les représentants des Gouvernements
des Etats membres de l'Union européenne, réunis au sein du
Conseil,
considérant ce qui
suit :
Afin de faciliter le fonctionnement de
l'Institut d'études de sécurité et du Centre satellitaire
de l'Union européenne, créés par le Conseil en tant
qu'agences indépendantes de l'Union européenne (cf. note 1)
(ci-après dénommées « agences de l'Union
européenne »), il est nécessaire d'accorder aux
nouvelles entités et à leur personnel, dans le seul
intérêt de l'Union européenne, les privilèges,
immunités et facilités indispensables à leur
fonctionnement,
Décident :
Article
1
er
Immunité de juridiction et exemption de
perquisition, saisie,
réquisition, confiscation et toute autre forme
de contrainte
Les locaux et les bâtiments, les biens, fonds et avoirs des agences de l'Union européenne, en quelque endroit qu'ils se trouvent sur le territoire des États membres et quel qu'en soit le détenteur, sont exempts de perquisition, saisie, réquisition, confiscation et de toute autre forme de contrainte administrative ou judiciaire.
Article
2
Inviolabilité des archives
Les archives des agences de l'Union européenne sont inviolables.
Article
3
Exonération d'impôts et de droits
1. Dans le cadre de leurs
fonctions officielles, les agences de l'Union européenne, ainsi que
leurs avoirs, revenus et autres biens sont exonérés de tout
impôt direct.
2. Les agences de
l'Union européenne sont exonérées des impôts et
droits indirects entrant dans les prix des biens immobiliers et mobiliers et
des services acquis pour leur usage officiel et représentant des
dépenses importantes. L'exonération peut prendre la forme d'un
remboursement ou d'une remise.
3. Les
biens acquis conformément au présent article avec
exonération de la taxe sur la valeur ajoutée ou des droits
d'accise ne peuvent être cédés à titre
onéreux ou gratuit que dans les conditions convenues avec l'Etat membre
qui a accordé
l'exonération.
4. Aucune
exonération ne sera accordée en ce qui concerne les impôts,
taxes et droits qui constituent la rémunération de services
d'utilité publique.
Article
4
Facilités et immunités concernant les communications
Les Etats membres autorisent les agences de l'Union européenne à communiquer librement et sans avoir à solliciter de permission, dans le cadre de toutes leurs fonctions officielles, et protègent ce droit conféré à ces agences. Les agences de l'Union européenne sont autorisées à utiliser des codes et à envoyer et recevoir de la correspondance officielle et d'autres communications par courrier ou par valise scellée en bénéficiant des mêmes privilèges et immunités que ceux qui sont accordés aux courriers et valises diplomatiques.
Article
5
Entrée, séjour et départ
Les Etats membres facilitent, au besoin, l'entrée, le séjour et le départ à des fins officielles des personnes visées à l'article 6. Cependant, il pourra être exigé des personnes qui revendiquent le traitement prévu par le présent article qu'elles fournissent la preuve qu'elles relèvent bien des catégories décrites à l'article 6.
Article
6
Privilèges et immunités des membres des organes
et des
membres du personnel des agences
de l'Union européenne
1. Les membres des organes des
agences de l'Union européenne et les membres du personnel de ces agences
jouissent des immunités
suivantes :
a)
L'immunité de juridiction pour toutes les paroles prononcées ou
écrites
et pour les actes accomplis dans l'exercice de leurs fonctions
officielles ; ils continuent à bénéficier de cette
immunité même lorsqu'ils ont cessé d'être membres
d'un organe ou membres du
personnel ;
b)
L'inviolabilité de tous leurs papiers, documents et autre matériel
officiels.
2. Les membres du personnel
des agences de l'Union européenne dont les traitements et
émoluments sont soumis à un impôt au profit de ces agences
dans les conditions indiquées à l'article 8
bénéficient de l'exonération de l'impôt sur le
revenu en ce qui concerne les traitements et émoluments versés
par ces agences. Toutefois, ces traitements et émoluments peuvent
être pris en compte pour évaluer le montant de l'impôt
à acquitter au titre des revenus provenant d'autres sources. Le
présent paragraphe ne s'applique pas aux pensions et retraites
versées aux anciens membres du personnel de ces agences et à
leurs ayants droit.
3. L'article 14
du protocole sur les privilèges et immunités des
Communautés européennes s'applique aux membres du personnel des
agences de l'Union européenne.
Article
7
Exceptions aux immunités
L'immunité accordée aux personnes visées à l'article 6 ne s'étend pas aux actions civiles engagées par un tiers en cas de dommages corporels ou autres, ou d'homicides, survenus lors d'un accident de la circulation causé par ces personnes.
Article
8
Impôts
1. Sous réserve des
conditions et suivant les procédures fixées par les agences de
l'Union européenne et approuvées par les conseils
d'administration, les membres du personnel de ces agences engagés pour
une durée minimale de un an sont soumis à un impôt au
profit de ces agences sur les traitements et émoluments versés
par celles-ci.
2. Chaque année,
les noms et adresses des membres du personnel des agences de l'Union
européenne visés au présent article ainsi que toute autre
personne ayant conclu un contrat de travail avec ces agences sont
communiqués aux États membres. Ces agences délivrent
à chacun d'eux une attestation annuelle indiquant le montant total, brut
et net, des rémunérations de toute nature versées par ces
agences pour l'année concernée, y compris les modalités et
la nature des paiements et les montants des retenues à la
source.
3. Le présent article ne
s'applique pas aux pensions et retraites versées aux anciens membres du
personnel des agences de l'Union européenne et à leurs ayants
droit.
Article
9
Protection du personnel
Les Etats membres prennent, si le directeur de l'agence de l'Union européenne concernée le leur demande, toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et la protection nécessaires des personnes visées par la présente décision, dont la sécurité est menacée en raison de leur service auprès des agences.
Article
10
Levée des immunités
1. Les privilèges et
immunités accordés en vertu de la présente décision
sont conférés dans l'intérêt des agences de l'Union
européenne et non dans l'intérêt des personnes
concernées. Ces agences et toutes les personnes qui jouissent de ces
privilèges et immunités ont le devoir d'observer par ailleurs les
dispositions législatives et réglementaires des Etats
membres.
2. Les directeurs sont tenus de
lever l'immunité dont bénéficient les agences de l'Union
européenne et les membres de leur personnel au cas où cette
immunité entraverait l'action de la justice et où ils peuvent le
faire sans nuire aux intérêts de ces agences. Les conseils
d'administration ont la même obligation à l'égard des
directeurs et des contrôleurs financiers. En ce qui concerne les membres
des conseils d'administration, il appartient, selon le cas, aux États
membres dont ces membres sont ressortissants ou à la Commission de lever
ces immunités.
3. Lorsque
l'immunité des agences de l'Union européenne visée
à l'article 1
er
a été levée, les
perquisitions et saisies ordonnées par les autorités judiciaires
des États membres s'effectuent en présence du directeur de
l'agence concernée ou d'une personne déléguée par
lui, dans le respect les règles de
confidentialité.
4. Les agences de
l'Union européenne coopèrent à tout moment avec les
autorités compétentes des États membres pour faciliter la
bonne administration de la justice et veillent à empêcher tout
abus des privilèges et immunités accordés au titre de la
présente décision.
5. Si
une autorité compétente ou une entité judiciaire d'un Etat
membre estime qu'il y a eu abus d'un privilège ou d'une immunité
accordés en vertu de la présente décision, l'organe auquel
incombe la levée de l'immunité aux termes du paragraphe 2,
consulte, sur demande, les autorités compétentes pour
déterminer si cet abus a bien eu lieu. Si les consultations
n'aboutissent pas à un résultat satisfaisant pour les deux
parties, la question est réglée selon la procédure
fixée à l'article 11.
Article
11
Règlement des différends
1. Les différends
concernant un refus de lever une immunité d'une des agences de l'Union
européenne ou d'une personne qui, en raison de ses fonctions
officielles, jouit de l'immunité au sens de l'article 6,
paragraphe 1, sont examinés par le Conseil en vue de parvenir
à un règlement à
l'unanimité.
2. Lorsqu'un tel
différend n'a pu être réglé, les modalités de
son règlement sont arrêtées par le Conseil statuant
à l'unanimité.
Article
12
Entrée en vigueur
La présente décision entre en vigueur le 1 er janvier 2002, à condition que tous les Etats membres aient notifié jusqu'à ce jour au Secrétariat général du Conseil que les procédures requises pour sa mise en oeuvre dans leur ordre juridique interne, à titre définitif ou provisoire, ont été accomplies.
Article
13
Evaluation
Dans les deux ans qui suivent l'entrée en vigueur de la présente décision, celle-ci fait l'objet d'une évaluation sous la supervision des conseils d'administration des agences de l'Union européenne.
Article 14
La présente décision est
publiée au
Journal officiel.
Fait
à Bruxelles, le 15 octobre 2001.
Le
président,
NOTE
(S)
:
(1) Actions communes 2001/554/PESC (
JO
L. 200 du
25 juillet 2001, p. 1) et 2001/555/PESC (
JO
L. 200
du 25 juillet 2001, p. 5).