Rémunération du prêt en bibliothèque et protection sociale des auteurs
N°
271
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002
Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 21
février 2002
Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 mars
2002
PROJET DE LOI
relatif à la
rémunération
au titre du
prêt
en
bibliothèque
et
renforçant
la
protection sociale des
auteurs
,
PRÉSENTÉ
au nom de M. LIONEL JOSPIN,
Premier ministre,
par MME CATHERINE TASCA ,
Ministre de la culture et de la communication.
( Renvoyé à la commission des Affaires culturelles sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
Culture. |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La question du droit de prêt en bibliothèque s'inscrit dans le
cadre général du droit des auteurs à
bénéficier d'une rémunération au titre de
l'exploitation de leurs oeuvres. Cet objectif est d'autant plus important que
l'application de ce droit est aujourd'hui rendue plus complexe par la diffusion
des technologies numériques et l'internationalisation des
échanges. Il doit être concilié
avec l'affirmation
du rôle essentiel des bibliothèques en faveur de l'accès du
plus grand nombre au livre et à la lecture, dans le souci d'un
renforcement des équilibres de la chaîne économique du
livre et de l'amélioration de la couverture sociale des auteurs.
Les politiques conduites par l'État et les collectivités locales
au cours des vingt dernières années ont permis un important
développement de la lecture publique : en 1980,
930 bibliothèques, 2,6 millions d'inscrits et 60 millions de
prêts ; en 1999, 3 560 bibliothèques, 6,6 millions d'inscrits et
190 millions de prêts. Les bibliothèques sont ainsi les
établissements culturels qui ont connu la plus forte progression de leur
fréquentation depuis vingt ans. Ce développement pose toutefois
avec de plus en plus d'acuité la question de la
rémunération des auteurs pour ce mode de diffusion de leurs
oeuvres, aujourd'hui très important.
Cette question a soulevé au printemps 2000 un vif débat entre les
professionnels du livre. Les éditeurs et une partie des auteurs
réclamaient l'instauration d'un paiement à l'acte d'emprunt,
certains auteurs allant même jusqu'à menacer d'interdire le
prêt de leurs oeuvres dans les bibliothèques. Les
bibliothécaires, soutenus par d'autres auteurs, craignaient, quant
à eux, que ces positions n'aboutissent à une remise en cause du
développement de la lecture publique.
A l'issue de concertations approfondies menées à l'initiative du
ministère de la culture et de la communication avec les
représentants des professionnels et des élus locaux, un large
consensus s'est dégagé sur les principes ainsi que sur les
modalités de mise en oeuvre d'un droit de prêt, que traduit le
présent projet de loi.
I. - La création d'une licence légale afin d'assurer une
sécurité juridique tant pour les auteurs et les éditeurs,
ayant droit de l'auteur, que pour les bibliothèques.
La directive communautaire n° 92-100 CEE du 19 novembre 1992 relative au
droit de location et de prêt fait obligation aux États membres de
prévoir le principe du droit exclusif de l'auteur d'autoriser ou
d'interdire le prêt de ses oeuvres. Notre législation sur la
propriété intellectuelle pose ce principe depuis 1957. La
directive donne néanmoins la possibilité aux États membres
d'y déroger « à condition que les auteurs au moins
obtiennent une rémunération au titre de ce prêt ». Le
présent projet de loi tire parti de cette possibilité en
créant un droit à rémunération au profit des
auteurs au titre du prêt d'ouvrages dans les bibliothèques. Il est
apparu équitable de tenir compte de la nature du lien contractuel entre
l'auteur et l'éditeur et d'étendre le bénéfice de
cette rémunération à l'éditeur, à part
égale, ce qui permet indirectement de garantir le niveau de la
rémunération des auteurs qui sont au centre du dispositif
proposé.
La licence légale ainsi créée permet de conforter les
bibliothèques dans l'exercice de leur mission de service public. En
effet, elle procure une sécurité juridique aux prêts
qu'elles effectuent et leur assure un « droit de prêter » qui
ne sera plus désormais susceptible d'être contesté.
II. - L'affirmation du rôle essentiel des bibliothèques dans
l'accès du plus grand nombre au livre et à la lecture justifiant
la mise en place d'un dispositif de « prêt payé »
et non d'un prêt payant.
La volonté de poursuivre l'effort en faveur de l'accès du plus
grand nombre au livre et à la lecture a conduit à écarter
d'emblée l'idée d'un « prêt payant » dont
l'usager aurait directement assumé la charge lors de chaque emprunt.
La rémunération des auteurs sera dès lors financée
par un mécanisme de « prêt payé » intervenant en
amont du prêt au lecteur et assumé conjointement par
l'État, les collectivités territoriales et les organismes dont
relèvent les autres bibliothèques.
Le « prêt payé » repose sur deux sources de
financement : un « prêt payé forfaitaire »,
d'une part, et un « prêt payé à l'achat »,
d'autre part.
Le « prêt payé forfaitaire » prend la forme d'un
versement par l'État d'un forfait annuel de 1,5 € par inscrit
dans les bibliothèques publiques, des comités d'entreprise et
associatives, et de 1 € par étudiant inscrit dans les
bibliothèques universitaires. Le montant de ces forfaits
,
défini par décret et prévu au budget de l'État par
la loi de finances sera pour la première année respectivement de
0,75 € pour les bibliothèques publiques et de 0,5 €
pour les bibliothèques universitaires.
La volonté de soutenir le nécessaire développement de la
lecture en milieu scolaire et universitaire a conduit à retenir un
forfait moins élevé pour les bibliothèques universitaires
et, conformément aux possibilités ouvertes par la directive
92-100 sur le droit de prêt, à exempter les bibliothèques
scolaires du « prêt payé forfaitaire ».
Le « prêt payé à l'achat » est
acquitté par les personnes morales ou organisations visées
à l'article 3 de la loi du 10 août 1981, c'est-à-dire
l'État, les collectivités locales, les établissements
d'enseignement, de formation professionnelle ou de recherche, les syndicats
représentatifs, les comités d'entreprise et les associations,
lors de l'acquisition des ouvrages pour leurs établissements de
prêt. Il est fixé à 6 % du prix public des ouvrages. Ce
pourcentage ne s'ajoute pas au prix d'achat mais il est déjà
compris dans celui-ci. Il est reversé par les fournisseurs aux
sociétés de gestion collective.
III. - La rémunération au titre du prêt, dont la gestion
est confiée à une ou plusieurs sociétés de gestion
collective, se répartira entre une rémunération
immédiate des auteurs et éditeurs au titre des droits d'auteur et
une rémunération différée des auteurs par le biais
du financement d'un régime de retraite complémentaire.
Les ressources dégagées par le droit de prêt sont
estimées, en année pleine, à 22,26 millions d'euros
(146 millions de francs)
et donneront lieu à une double
utilisation :
- le versement de droits d'auteur, qui seront calculés sur la base du
nombre d'exemplaires achetés par titre chaque année, et non du
nombre de prêts par titre. Ce mode de calcul reflète la
diversité des acquisitions des bibliothèques et permet une
rémunération plus équitable pour les auteurs d'ouvrages
à diffusion limitée et les petites maisons d'édition ;
- le financement d'un régime de retraite complémentaire pour les
auteurs et les traducteurs affiliés à l'AGESSA,
c'est-à-dire exerçant l'activité d'écriture ou de
traduction à titre principal. Les auteurs et les traducteurs sont en
effet les seuls, parmi
les créateurs, à ne pas
bénéficier, à ce jour, d'un tel régime. Cette
lacune est en elle-même préjudiciable à la création
car elle contribue à dissuader les auteurs et traducteurs de consacrer
leur entière activité à l'écriture. Cette part des
ressources issues du droit de prêt permettra de prendre en charge, dans
une limite de 50 %, une partie des cotisations, étant entendu que la
fraction complémentaire des cotisations restera à la charge des
écrivains et traducteurs ressortissants de ce régime.
Les sommes collectées au titre du droit de prêt feront l'objet
d'une gestion collective obligatoire, ce qui permettra aux parties versantes de
n'être sollicitées que par la ou les sociétés
agréées par le ministre chargé de la culture.
Le projet de loi reprend les critères d'agrément applicables,
depuis 1995, en matière de reprographie. Il les renforce en introduisant
la nécessité d'une représentation équitable des
auteurs et des éditeurs parmi les associés et les organes
dirigeants de la société.
IV. - Le renforcement des équilibres de la chaîne
économique du livre.
L'abandon du « prêt payant » au profit d'un « prêt
payé » rend nécessaire le renforcement de la loi du 10
août 1981 relative au prix du livre par un plafonnement des rabais pour
les ventes de livres aux collectivités.
Les achats de livres par les collectivités ne sont pas soumis à
un prix unique car le législateur s'était montré soucieux,
en 1981, de favoriser, tout particulièrement dans les
bibliothèques, une diffusion du livre qui accusait alors un grand
retard. Cette dérogation engendre aujourd'hui des dérives
préjudiciables aux librairies car l'arrivée massive de grossistes
sur les marchés des bibliothèques a provoqué une
surenchère au niveau des rabais. Ceux-ci atteignent des niveaux
inaccessibles à la plupart des librairies, sauf à mettre
gravement en péril leur équilibre financier et leur
capacité à maintenir une offre diversifiée de titres.
Dans ces conditions, l'application d'un « prêt payé »
sans mesure d'accompagnement accentuerait la pression des acheteurs sur les
rabais et accélérerait l'éviction des librairies de ces
marchés, alors qu'ils représentent souvent un chiffre d'affaires
vital pour ces entreprises. Il est donc prévu de plafonner les rabais
qui peuvent être consentis pour la vente de livres aux personnes
visées à l'article 3 de la loi du 10 août 1981 relative au
prix unique du livre. Cette mesure est directement induite par la mise en
oeuvre du droit de prêt puisqu'elle permet de prévenir un effet
pervers du dispositif.
Afin de lisser la charge supplémentaire pour les collectivités,
le « prêt payé à l'achat » sera mis en
application sur deux ans. La première année, le niveau de
plafonnement des rabais sera de 12 %, et le taux du reversement par les
fournisseurs, de 3 %.
*********
Le
présent projet de loi s'articule en cinq articles : le premier
complète le code de la propriété intellectuelle, le
deuxième modifie le code de la sécurité sociale, le
troisième modifie l'ordonnance n° 98-731 du 20 août
1998 afin d'étendre le dispositif à Saint-Pierre-et-Miquelon, le
quatrième modifie l'article 3 de la loi du 10 août 1981 relative
au prix du livre. Le quatrième article prévoit certaines
dispositions finales et transitoires.
DISPOSITIONS COMPLÉTANT LE CODE DE LA PROPRIÉTÉ
INTELLECTUELLE
L'article 1
er
du présent projet de loi
ajoute au
livre III du code de la propriété intellectuelle un titre V
relatif à la rémunération au titre du prêt en
bibliothèque. Ce titre met en oeuvre le droit de prêt sous la
forme d'une licence légale dans les conditions qu'il définit aux
articles L. 351-1 à L. 351-4 nouveaux du code de la
propriété intellectuelle.
Article L. 351-1
. - Cet article précise en premier lieu le champ
de la licence légale en le limitant aux oeuvres
de l'esprit
telles que considérées au premier alinéa de l'article
L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle,
c'est-à-dire les livres, brochures et autres écrits
littéraires, artistiques et scientifiques. Seules les oeuvres
imprimées sur papier et publiées sont ici visées. Le
prêt d'oeuvres sur d'autres supports demeure sous le régime du
droit exclusif de l'auteur.
Il définit en second lieu la notion de prêt, qui est reprise de
l'article 1-3 de la directive communautaire. Comme la directive le fait dans un
de ses considérants, cet article indique expressément que le
prêt n'englobe pas la mise à disposition à des fins de
consultation sur place.
Enfin, cet article
crée un droit à
rémunération légalement garanti en contrepartie de la
licence légale. Il définit les personnes
bénéficiaires de ce droit à
rémunération : il s'agit des auteurs, qui détiennent
ce droit à titre originaire, mais également des éditeurs,
dans la mesure où ils se sont vus céder ce droit par le contrat
d'édition qui les lie à l'auteur.
Article L. 351-2
. - Cet article pose le principe d'une gestion
collective obligatoire de la rémunération au titre du prêt
en bibliothèque, confiée à une ou plusieurs
sociétés de perception et de répartition des droits dont
le régime est encadré par le code de la propriété
intellectuelle. Comme cela est le cas pour la gestion d'autres régimes
de licence légale, ces sociétés devront en outre recevoir
un agrément de la part du ministre chargé de la culture. Ces
dispositions reprennent les critères d'agrément adoptés
pour la mise en oeuvre du droit de reprographie, en les complétant afin
de renforcer le caractère équitable de la répartition des
droits, et renvoie à un décret ultérieur la
détermination des modalités de délivrance et de retrait de
cet agrément.
Article L. 351-3
. - L'article définit la double assiette de la
rémunération perçue au titre du prêt en
bibliothèque. Une part de la rémunération est assise sur
le nombre d'usagers inscrits dans les bibliothèques accueillant du
public pour le prêt, à l'exception des bibliothèques
scolaires. Cette exemption s'inscrit dans le cadre de l'article 5-3 de la
directive communautaire. Une autre part de cette rémunération est
assise sur le prix public des livres achetés par les personnes morales
et les organisations pour leurs bibliothèques, qui accueillent du public
pour le prêt, énumérées au
b
de l'article 3
de la loi du 10 août 1981 relative au prix du livre.
Les deuxième et troisième alinéas précisent, d'une
part, le financement de la rémunération forfaitaire par usager
inscrit ainsi que les modalités de fixation de son taux et, d'autre
part, le financement de la rémunération perçue sur le prix
public des livres.
La rémunération forfaitaire par usager est mise à la
charge de l'État. Il reviendra à un décret d'en fixer le
mode de calcul et à la loi de finances de prévoir la charge
correspondante au budget de l'État. Le présent projet de loi
prévoit la possibilité de fixer un taux de
rémunération propre aux bibliothèques universitaires.
Le versement de la rémunération perçue sur le prix public
des livres incombe aux fournisseurs (détaillants, grossistes...) qui
réalisent ces ventes. Le terme de fournisseur est plus approprié
et moins réducteur que celui de détaillant qui est utilisé
dans le texte de la loi de 1981 relative au prix du livre et recouvre mieux la
réalité des pratiques. Le taux de cette
rémunération est fixé par la loi.
Article L. 351-4
. - Cet article définit les modalités
d'utilisation et de répartition de la rémunération au
titre du prêt.
Une première part qui ne pourra être inférieure à la
moitié du total de cette rémunération sera réparti
entre les ayants droit (auteurs et éditeurs) en fonction du nombre
d'exemplaires achetés chaque année par les bibliothèques.
Dans la mesure où cette base de répartition ne repose pas sur le
principe de stricte proportionnalité, contrairement à l'usage qui
prévaut généralement en matière de
rémunération des auteurs, elle doit être prévue par
la loi. Le projet de loi encadre par ailleurs la répartition de la
rémunération entre les auteurs et les éditeurs. Il est
prévu que la rémunération revenant aux auteurs soit
fixée à 50 % de la part destinée aux ayants droit.
La seconde part sera affectée annuellement à la prise en charge
d'une fraction des cotisations d'un régime de retraite
complémentaire en faveur des écrivains et traducteurs. Cette part
ne pourra excéder 50 % des cotisations dues par ces derniers.
L'article L. 335-4
du code de la propriété intellectuelle
est complété d'un alinéa supplémentaire qui
prévoit une peine d'amende de 100 000 € afin de
sanctionner le défaut de versement par les fournisseurs de la
rémunération due au titre du prêt en bibliothèque.
L'article L. 811-1
du même code est modifié pour exclure
l'application de ces nouvelles dispositions en Nouvelle-Calédonie, dans
les territoires d'outre-mer et à Mayotte.
DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
L'article 2
modifie le code de la sécurité sociale, en
actualisant certaines dispositions devenues obsolètes. Celles-ci
conditionnaient l'instauration de nouveaux régimes
complémentaires en faveur des artistes-auteurs - parmi lesquels les
écrivains et traducteurs - à la conclusion d'accords
professionnels ou interprofessionnels spécifiques. Or, de tels accords
n'ont jamais été conclus. La rédaction proposée
tire donc les conséquences de cette situation en prévoyant de
faire relever les intéressés des régimes
complémentaires d'assurance-vieillesse des professions libérales.
S'agissant des écrivains et traducteurs, un décret désigne
le régime complémentaire d'assurance-vieillesse qui leur est
applicable. Il fixera chaque année la part des sommes provenant de la
rémunération au titre du prêt en bibliothèque
affectée au financement du régime, ainsi que les modalités
de recouvrement des sommes correspondant à cette part et des cotisations
des affiliés à ce régime.
L'article 3
modifie l'ordonnance n° 98-731 du 20 août
1998 adaptant le code de la sécurité sociale à l'outre-mer
afin d'étendre ce régime aux auteurs de Saint-Pierre-et-Miquelon.
En effet, le code de la sécurité sociale ne s'applique pas
à Saint-Pierre-et-Miquelon.
Le régime d'assurance-vieillesse y est régi par la loi n°
87-563 du 17 juillet 1987 portant réforme du régime
d'assurance-vieillesse applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon et par
l'ordonnance n° 98-731 du 20 août 1998 portant adaptation aux
départements d'outre-mer, à la Nouvelle-Calédonie et
à la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon de
diverses dispositions relatives aux affaires sanitaires et sociales.
La loi du 17 juillet 1987 a créé dans cette collectivité
territoriale un régime d'assurance-vieillesse comportant une
assurance-vieillesse de base et la garantie de prestations minimales de
vieillesse.
Par ailleurs, l'article 6 de l'ordonnance du 20 août 1998, en son II,
dispose qu'à compter du 1
er
janvier 1999, « les
ressortissants du régime d'assurance-vieillesse de base de
Saint-Pierre-et-Miquelon exerçant une activité professionnelle
relevant de l'organisation autonome mentionnée au 3° de l'article
L. 621-3 du code de la sécurité sociale sont obligatoirement
affiliés au régime de retraite complémentaire
institué pour leur profession en application du premier alinéa de
l'article L. 644-1 dudit code. ». Le 3° de l'article L. 621-3
concerne l'organisation autonome d'assurance vieillesse des professions
libérales.
En métropole, les artistes-auteurs ne relèvent pas, pour la
retraite de base, de l'article L. 621-3, mais de l'article L. 382-1,
la loi n° 75-1348 du 31 décembre 1975 les ayant rattachés au
régime général de sécurité sociale. Les
dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 20 août 1998 ne
permettent donc pas de faire bénéficier les écrivains
résidant à Saint-Pierre-et-Miquelon du régime
complémentaire qui sera instauré en métropole. Il convient
donc, pour étendre la réforme à l'identique dans la
collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon, de modifier cet
article.
DISPOSITIONS MODIFIANT LA LOI DU 10 AOÛT 1981 RELATIVE AU PRIX DU LIVRE
L'article 4
a pour objet de modifier l'article 3 de la loi
n° 81-766 du 10 août 1981 relative au prix du livre qui
définit le régime applicable aux ventes de livres aux
collectivités.
Le projet de loi remplace le premier alinéa de l'article 3 de la loi du
10 août 1981 par un
a
afin de maintenir hors du champ
d'application de l'article premier de cette loi les ventes de livres scolaires
à certaines collectivités (État, collectivités
locales et établissements d'enseignement). En effet, ces
dernières ne peuvent pas bénéficier de cette exemption au
titre du nouveau second alinéa qui prévoit un plafonnement des
rabais pour leurs achats.
Dans le
b
du nouvel article 3, le projet de loi encadre le dispositif
dérogatoire au principe de prix unique (défini par l'article
premier de la loi de 1981) bénéficiant à certaines
collectivités, en instituant un plafonnement à 9 % des
rabais accordés par les fournisseurs pour les ventes de livres à
ces collectivités.
DISPOSITIONS FINALES ET TRANSITOIRES
L'article 5
définit la date d'entrée en application de la loi.
Cet article prévoit une mise en oeuvre progressive sur deux ans du
dispositif retenu en fixant pour la première année un taux
intermédiaire de plafonnement des rabais pour les collectivités
mentionnées au
b
de l'article 3 de la loi du 10 août 1981,
ainsi qu'un taux intermédiaire pour la rémunération dont
le versement incombe aux fournisseurs.
PROJET DE LOI
Le
Premier ministre,
Sur le rapport du Ministre de la culture et de la communication,
Vu l'article 39 de la Constitution,
Décrète :
Le présent projet de loi relatif à la rémunération
au titre du prêt en bibliothèque et renforçant la
protection sociale des auteurs, délibéré en conseil des
ministres après avis du Conseil d'État, sera
présenté au Sénat par la ministre de la Culture et de la
communication, qui sera chargée d'en exposer les motifs et d'en soutenir
la discussion.
Article 1er
Le code de la propriété intellectuelle est modifié ainsi qu'il suit :
I. - Il est ajouté au livre III un titre V ainsi rédigé :
« TITRE V
« RÉMUNÉRATION AU TITRE DU PRÊT EN
BIBLIOTHÈQUE
« Art. L. 351-1.
- L'auteur d'une oeuvre de
l'esprit,
telle qu'elle est définie par le 1° de l'article L. 112-2,
imprimée sur papier et publiée, ne peut s'opposer au prêt
d'exemplaires de cette oeuvre.
« Le prêt s'entend de la mise à disposition, sans
finalité lucrative et pour un temps limité, d'une oeuvre figurant
dans les collections d'une bibliothèque recevant du public ; il
exclut la consultation sur place.
« Le prêt ouvre droit à rémunération au
profit de l'auteur et de l'éditeur ayant droit de l'auteur.
«
Art. L. 351-2
. - La rémunération prévue
au troisième alinéa de l'article L. 351-1 est perçue, pour
le compte des auteurs et des éditeurs ayants droit des auteurs, par une
ou plusieurs des sociétés régies par le titre II du livre
III, agréées à cet effet dans des conditions
définies par décret en Conseil d'État et qui pourront
justifier, outre des exigences requises par l'article L. 122-12, d'une
représentation équitable des auteurs et des éditeurs parmi
leurs associés et dans leurs organes dirigeants.
« Art. L. 351-3.
- La rémunération prévue
au troisième alinéa de l'article L. 351-1 comprend deux parts.
« La première part, assise sur le nombre d'usagers inscrits
dans les bibliothèques accueillant du public pour le prêt,
à l'exception des bibliothèques scolaires, est à la charge
de l'État. Son mode de calcul, forfaitaire, est fixé par
décret et peut être différent selon que l'usager est
inscrit dans une bibliothèque universitaire ou dans une autre
bibliothèque.
« La seconde part est assise sur le prix public de vente des livres
achetés, pour leurs bibliothèques accueillant du public pour le
prêt, par les personnes mentionnées au
b
de l'article 3 de
la loi n° 81-766 du 10 août 1981 relative au prix du livre ;
elle est versée par les fournisseurs qui réalisent ces ventes. Le
taux de cette rémunération est de 6 % du prix public de vente.
«
Art. L. 351-4. -
La rémunération au titre du
prêt en bibliothèque contribue à renforcer la protection
sociale des auteurs. Elle est répartie dans les conditions
suivantes :
« 1° Une première part, qui ne peut être
inférieure à la moitié du total, est répartie
à parts égales entre les auteurs et les éditeurs ayants
droits des auteurs à raison du nombre des exemplaires de chaque ouvrage
achetés chaque année, pour leurs bibliothèques accueillant
du public pour le prêt, par les personnes mentionnées au
b
de l'article 3 de la loi n° 81-766 du 10 août 1981
relative au prix du livre ;
« 2° Une seconde part est affectée à la prise en
charge d'une fraction des cotisations dues au titre de la retraite
complémentaire par les auteurs d'une oeuvre de l'esprit définie
au 1° de l'article L. 112-2 du code de la propriété
intellectuelle, affiliés au régime général en
application de l'article L. 382-1 du code de la sécurité sociale.
Cette fraction ne pourra excéder la moitié des cotisations dues
en application de l'article L. 382-12 du code de la sécurité
sociale. »
II. - L'article L. 335-4 est complété par les dispositions
suivantes :
« Est puni d'une peine d'amende de 100 000 € le fait de ne pas
verser la rémunération due à l'auteur et à
l'éditeur ayant droit de l'auteur au titre du prêt en
bibliothèque et prévue au troisième alinéa de
l'article L. 351-3. »
III. - L'article L. 811-1 est remplacé par les dispositions
suivantes :
«
Art. L. 811-1
. - Les dispositions du présent code
sont applicables à Mayotte à l'exception du quatrième
alinéa de l'article L. 335-4 et des articles L. 351-1 à L.
351-4 et sous réserve des adaptations prévues aux articles
suivants. Sous la même réserve, elles sont applicables en
Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, dans
les Terres australes et antarctiques françaises et en
Nouvelle-Calédonie à l'exception du quatrième
alinéa de l'article L. 335-4 et des articles L. 351-1 à
L. 351-4, L. 421-1 à L. 422-10 et L. 423-2. »
Article 2
Le code
de la sécurité sociale est modifié ainsi qu'il suit :
I. - Les articles L. 382-11 et L. 382-13 sont abrogés.
II. - L'article L. 382-12 est remplacé par les dispositions
suivantes :
« Art. L. 382-12
. - Les personnes affiliées au
régime général en application de l'article L. 382-1
relèvent des régimes complémentaires d'assurance
vieillesse institués en application de l'article L. 644-1.
« Pour les auteurs d'une oeuvre de l'esprit définie au 1°
de l'article L. 112-1 du code de la propriété intellectuelle,
affiliés au régime général en application de
l'article L. 382-1, un décret désigne le régime
complémentaire d'assurance vieillesse applicable. Il
détermine chaque année la part mentionnée au 2° de
l'article L. 351-4 du code de la propriété intellectuelle ainsi
que les modalités de recouvrement des sommes correspondant à
cette part et des cotisations des affiliés. »
Article 3
Il est
ajouté à l'article 6 de l'ordonnance n° 98-731 du
20 août 1998 portant adaptation aux départements
d'outre-mer, à la Nouvelle-Calédonie et à la
collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses
dispositions relatives aux affaires sanitaires et sociales un VI ainsi
rédigé :
«
VI
. - Les dispositions de l'article L. 382-12 du code de la
sécurité sociale sont applicables aux personnes affiliées
au régime d'assurance vieillesse de base de Saint-Pierre-et-Miquelon qui
exercent une activité d'auteur d'oeuvres de l'esprit telles que
définies au 1° de l'article L. 112-2 du code de la
propriété intellectuelle lorsque cette activité, si elle
était exercée en métropole ou dans un département
d'outre-mer, emporterait leur affiliation au régime
général en application de l'article L. 382-1 du code de la
sécurité sociale. »
Article 4
L'article 3 de la loi n° 81-766 du 10 août 1981 relative au prix du livre est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. 3 . - Par dérogation aux dispositions du quatrième alinéa de l'article 1 er :
«
a
) Pour les livres scolaires, le prix
effectif de
vente au public est fixé librement lorsque l'acquéreur est une
association facilitant l'acquisition de livres pour ses membres ou lorsque
l'achat est effectué par l'État, une collectivité locale
ou un établissement d'enseignement, pour ses besoins propres excluant la
revente ;
«
b
) Pour les autres livres, le prix effectif de vente peut
être compris entre 91 et 100 % du prix de vente au public fixé par
l'éditeur ou l'importateur, pour les livres facturés pour leurs
besoins propres, excluant la revente, à l'État, aux
collectivités locales, aux établissements d'enseignement, de
formation professionnelle ou de recherche, aux syndicats représentatifs,
aux comités d'entreprise et aux bibliothèques accueillant du
public pour la lecture ou pour le prêt, notamment celles des associations
régies par la loi du 1
er
juillet 1901. Ce prix effectif
inclut le montant de la rémunération au titre du prêt
assise sur le prix public de vente des livres prévue au troisième
alinéa de l'article L. 351-3 du code de la propriété
intellectuelle. »
Article 5
La
présente loi entrera en vigueur le premier jour du premier mois suivant
sa publication au
Journal officiel
et au plus tôt le
1
er
janvier 2003.
Pour l'année 2003, le taux de la rémunération
prévue au troisième alinéa de l'article L. 351-3
du code de la propriété intellectuelle est fixé à 3
% du prix public de vente.
Pour la même année, le prix effectif de vente mentionné au
b
de l'article 3 de la loi n° 81 -766 du 10
août 1981 peut être compris entre 88 et 100 % du prix de vente
au public fixé par l'éditeur ou l'importateur.