EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
L'achat de protections hygiéniques concerne en France 15,5 millions de femmes âgées de 13 à 50 ans. Comme le rappelle un récent rapport d'information de la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale, « la prise en charge du coût de cette vie menstruée mérite d'être questionnée ». L'hygiène menstruelle tient en effet une place importante dans le budget d'une femme qui, selon une étude réalisée en 2019, y consacrerait 3 800 euros en moyenne au cours sa vie.
En 2016, la France a certes réduit la TVA de 20 % à 5,5 %, reconnaissant ainsi que les produits de protection hygiénique féminine étaient bien des produits de première nécessité. Il serait souhaitable d'aller plus loin en instaurant un taux à 0 %, comme l'ont fait certains pays : le Kenya, le Canada, l'Inde, l'Australie et plusieurs États américains... En France, comme dans les autres États membres de l'Union Européenne, il n'est pas possible de porter le taux de TVA à 0%, en raison de la directive européenne 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée. Selon les termes de cette directive, les pays de l'Union européenne ont la possibilité d'appliquer un taux réduit mais celui-ci doit être d'au moins 5 %. Le Royaume-Uni n'a d'ailleurs pu supprimer la TVA sur ces produits que le 1 er janvier 2021, suite à sa sortie de l'Union européenne.
Actuellement, en France, près de deux millions de femmes sont victimes de « précarité menstruelle », obligées parfois de choisir entre acheter des protections hygiéniques et un autre produit de première nécessité. Cette situation inacceptable constitue à la fois une atteinte à leur dignité, un frein à leur insertion et un risque pour leur santé.
Depuis quelques années, plusieurs actions ont été mises en place pour lutter contre la précarité menstruelle. Diverses associations ont ainsi permis de collecter des produits d'hygiène intime à destination de femmes qui en avaient besoin. Les résidences universitaires des Crous et les services de santé universitaires ont été récemment équipés en distributeurs de protections hygiéniques.
Les pouvoirs publics se sont également saisis de cette question. Le ministère de la santé a ainsi octroyé 5 millions d'euros à la lutte contre la précarité menstruelle, en donnant notamment la priorité aux femmes incarcérées, aux femmes en situation de précarité ainsi qu'aux collégiennes et aux lycéennes. Il est aujourd'hui urgent d'appuyer de nouvelles initiatives et de mettre en place un véritable plan d'action au niveau national pour s'assurer que chaque femme puisse avoir accès à des produits de protection hygiénique sans sacrifier une autre dépense de première nécessité.
Au-delà du problème de la précarité menstruelle, se pose également la question de la composition des protections hygiéniques et de l'absence de réglementation pourtant indispensable pour garantir un niveau suffisant de sécurité sanitaire et d'information des consommatrices.
Alors qu'aux États-Unis, au Canada ou au Japon, les protections menstruelles sont considérées comme des dispositifs médicaux, elles sont assimilées en Europe à des produits de consommation courante. Aussi, les fabricants ne sont pas tenus d'indiquer leur composition sur les emballages. Ces produits sont pourtant en contact direct et prolongé avec les muqueuses. Surtout, plusieurs études révèlent la présence de produits toxiques dans de nombreux produits hygiéniques.
Certes, le dernier rapport de l'Anses a rappelé que des tests en laboratoire avaient confirmé la présence de substances chimiques en très faible concentration, cependant sans dépassement des seuils sanitaires. La majorité de ces substances proviendrait de la contamination des matières premières ou des procédés de fabrication.
L'Anses rappelle néanmoins qu'aucune réglementation n'encadre de façon spécifique la composition, la fabrication, et l'utilisation de ces produits de protection intime. C'est la raison pour laquelle elle recommande l'élaboration d'un cadre réglementaire plus restrictif au niveau européen et soutient notamment, dans le cadre du règlement REACh, un projet de restriction des substances cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques dans les produits d'hygiène féminine.