Étude d'impact au format PDF (298 Koctets)
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
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Ministère de l'Europe et
des affaires étrangères
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Projet de loi
autorisant l'approbation de l'accord portant reconnaissance réciproque et échange
des permis de conduire entre le Gouvernement de la République française et le
Gouvernement de l'Etat du Qatar et de l'accord portant reconnaissance
réciproque et échange des permis de conduire entre le Gouvernement
de la République française et le Gouvernement
de la République populaire de Chine
NOR : EAEJ2010457L/Bleue-1
ÉTUDE D'IMPACT
I- Situation de référence
Ø Relations bilatérales entre la France et la Chine :
Deuxième économie du monde, la Chine représentait plus de 20% des échanges commerciaux mondiaux en 2017 (OMC). Elle conforte également sa place de premier marché émetteur touristique avec 127 millions de visiteurs chinois à l'étranger dont 2,1 millions en France en 2017 (2 e destination hors Asie).
La relation franco-chinoise a été élevée au rang de partenariat stratégique global en 2004. Le dialogue stratégique (dernière session en janvier 2019) aborde l'ensemble des domaines de coopération. Le dialogue économique et financier de haut niveau créé en 2013, aborde l'ensemble des sujets économiques.
Le Dialogue de Haut niveau sur les échanges humains initié en septembre 2014 concerne les échanges universitaires, scientifiques, culturels et la promotion des droits des femmes.
Le Président de la République a effectué sa première visite d'Etat en Chine en janvier 2018. Cette visite a été l'occasion de fixer les grands axes du partenariat franco-chinois pour les prochaines années. Le président chinois Xi Jinping a effectué une visite d'Etat en France et une visite officielle en novembre 2015 en marge de la Conférence de Paris sur le climat. M. Wang Yi, ministre des affaires étrangères s'est rendu en France en mai 2018 et en janvier 2019.
Sur le plan économique, la Chine est le septième client de la France et son deuxième fournisseur. Nos échanges commerciaux restent marqués par un fort déséquilibre : c'est avec la Chine que la France réalise son plus important déficit commercial (29 milliards d'euros en 2018) 1 ( * ) . Les investissements croisés sont en plein essor. La présence française en Chine est ancienne et concerne tous les secteurs : agroalimentaire, industrie, transports, développement urbain, grande distribution, services financiers. Plus de 1 100 entreprises françaises sont présentes en Chine et représentent 570 000 emplois. Les investissements chinois en France ont connu une forte croissance ces dernières années (six milliards d'euros en stock en 2017), 700 filiales chinoises et hongkongaises y sont établies, employant 45 000 personnes.
Le partenariat économique se traduit par la consolidation de coopérations industrielles dans le nucléaire civil (Hinkley Point C, EPR de Taishan, retraitement de déchets nucléaires), l'aéronautique (chaîne d'assemblage de l'A320 et définition de l'A330 à Tianjin) et leur élargissement à de nouveaux secteurs (développement durable, santé, économie du vieillissement, innovation, services financiers).
En matière de coopération universitaire, 37 000 étudiants chinois se trouvent actuellement en France dans le cadre d'une mobilité tandis que plus de 10 000 étudiants français se trouvent en Chine pour leurs études.
Plus de 3 000 chercheurs des deux pays coopèrent au sein d'une soixantaine de structures conjointes tels l'institut Pasteur de Shanghai et le laboratoire pour les produits et les processus éco-efficients.
Le nombre de ressortissants français inscrits aux consulats de France en Chine est de 30 000 personnes en 2018, soit le double des inscrits en 2005.
Ø Relations bilatérales entre la France et le Qatar :
La relation entre la France et le Qatar s'est développée au début des années 1990, dans le domaine de la sécurité (signature d'un accord de défense en 1994) et des hydrocarbures. La volonté qatarienne de diversifier l'économie du pays et de réduire sa dépendance à la rente gazière a permis d'élargir le spectre des coopérations à l'aéronautique ainsi qu'aux coopérations culturelle et éducative. La signature d'accords et de contrats dans le domaine de l'économie, de l'éducation, de la défense et de la lutte contre le terrorisme, à l'occasion de la visite du Président de la République en décembre 2017 a renforcé le partenariat entre nos deux pays.
Nos liens économiques avec le Qatar sont solides, tant sur le plan commercial que financier.
Les échanges commerciaux bilatéraux ont systématiquement dépassé deux milliards d'euros par an depuis 2014.
La France demeure l'une des destinations privilégiées des investissements qatariens à l'étranger 2 ( * ) , estimés à 25 milliards d'euros en 2016, aux côtés du Royaume-Uni, de l'Allemagne et des Etats-Unis.
Bien implantées dans l'Emirat, les entreprises françaises continuent d'investir dans le domaine des infrastructures (préparation de la coupe du monde de football de 2022), de l'énergie, de l'environnement ou des nouvelles technologies, comme en attestent les contrats signés, pour un montant total de 16 milliards d'euros, lors de la visite présidentielle au Qatar fin 2017.
Dans le champ culturel, un accord de coopération a été signé en 2014 3 ( * ) . Dans le domaine de l'enseignement supérieur et de la recherche, les Qatariens ont invité plusieurs grandes institutions académiques internationales à installer une branche délocalisée dans la « cité de l'éducation ». C'est notamment le cas d'HEC Paris.
Le Qatar, qui compte près de 200 000 personnes francophones, est membre associé de l'Organisation internationale de la francophonie depuis 2012. Soixante étudiants boursiers du Gouvernement qatarien sont actuellement présents dans les universités françaises. Deux établissements d'enseignement français sont implantés à Doha, scolarisant 3 000 élèves.
La coopération de sécurité et de défense entre la France et le Qatar, formalisée en 1994 par un accord de défense, constitue un pilier de la relation bilatérale. D'importants contrats portant sur la vente de 36 avions Rafales au Qatar et de véhicules blindés ont été signés ces dernières années.
La communauté française au Qatar est de 4 500 personnes inscrites aux registres consulaires. Ce chiffre est en augmentation régulière.
Ø La reconnaissance et l'échange des permis étrangers en France
La reconnaissance est le mécanisme par lequel un Etat autorise le détenteur d'un permis de conduire régulièrement délivré par un autre Etat à conduire des véhicules sur son territoire. La durée de reconnaissance est généralement assez courte et est fixée par chaque Etat dans sa réglementation. Elle est souvent assortie d'une obligation d'accompagnement du titre étranger par un permis de conduire international ou d'une traduction dans sa langue.
L'échange des permis de conduire intervient quant à lui lors d'une installation durable dans un autre Etat. Il permet d'obtenir un permis de l'Etat d'installation sans avoir à repasser l'examen du permis local, sur présentation d'une attestation de droits à conduire obtenue auprès des autorités compétentes de l'Etat d'origine. En l'absence d'accord d'échange des permis de conduire ou de pratique réciproque, il est nécessaire d'obtenir le permis local par examen avant l'expiration de la période de reconnaissance du permis étranger pour pouvoir continuer à conduire.
En matière de permis de conduire, la réglementation française s'inscrit dans le cadre posé par la Convention de Vienne de 1968 sur la circulation routière 4 ( * ) et la directive européenne 2006/126/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 relative au permis de conduire 5 ( * ) , notamment en matière de reconnaissance des permis de conduire étrangers, de conditions de délivrance et de format des titres. Ce cadre international laisse cependant toute latitude à chaque Etat pour déterminer sa politique en matière de reconnaissance et d'échange des permis de conduire étrangers.
L'arrêté du 12 janvier 2012 fixant les conditions de reconnaissance et d'échange des permis de conduire délivrés par les Etats n'appartenant ni à l'Union européenne, ni à l'Espace économique européen6 ( * ) tire les conséquences de ce cadre conventionnel, prévoyant la reconnaissance des permis de conduire étrangers régulièrement délivrés pour un délai d'un an à compter de l'établissement par son titulaire de sa résidence normale en France. Tout conducteur titulaire d'un permis étranger non européen doit, avant l'expiration de ce délai, obtenir un permis de conduire français par échange ou par examen. Les usagers titulaires de titres de séjour spéciaux délivrés par le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères et de titres de séjour mention étudiant bénéficient de la reconnaissance de leur permis étranger quelle qu'en soit la nationalité et durant l'entière durée de leurs mission ou études ; ils ne sont donc pas concernés par l'échange.
Outre les Etats appartenant à l'espace économique européen, la directive de 2006 prévoyant la reconnaissance sans obligation d'échange absolue des permis européens dans toute la zone, le dispositif français des échanges de permis de conduire résulte pour l'essentiel de simples pratiques réciproques d'échange et repose au mieux sur des arrangements administratifs entre le ministre chargé de la Sécurité routière et l'autorité étrangère compétente en matière de permis de conduire. Cette pratique d'échange s'est constituée au gré de l'histoire et de nos relations diplomatiques, et sur le fondement de la réciprocité automatique des échanges dès lors que l'Etat de délivrance du permis échangeait le sien. L'entrée en vigueur de l'arrêté du 12 janvier 2012 a supprimé cette réciprocité automatique et ouvert la voie à une véritable politique en matière d'échanges des permis étrangers, axée autour de la lutte contre la fraude documentaire et la garantie de standards en matière de sécurité routière.
Ces pratiques réciproques d'échanges ont vocation, soit à être remplacées par des accords en bonne et due forme, soit à être interrompues si les garanties en matière de sécurité routière ne sont pas réunies.
En effet, le Conseil d'Etat, par un arrêt n° 382484 du 21 novembre 2016 7 ( * ) , a considéré que l'échange des permis de conduire d'un Etat étranger doit être conditionné par l'existence d'un accord de réciprocité entre la France et l'Etat en question. Or, actuellement, un seul accord intergouvernemental en bonne et due forme, avec Monaco, est en vigueur 8 ( * ) .
Une comparaison avec nos principaux partenaires européens permet également de constater que ces derniers, qui fondent généralement l'échange des permis étranger sur des accords bilatéraux, ne pratiquent l'échange en moyenne qu'avec une dizaine d'Etats tiers, un compte bien en deçà de la pratique française. En effet, la France échange actuellement (au 10 octobre 2019) avec 116 pays tiers.
C'est dans ce contexte que le ministère de l'Intérieur (Délégation à la Sécurité routière) et le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères (Direction des Français à l'étranger et de l'administration consulaire) ont engagé, au début de l'année 2018, une révision globale de ce dispositif. L'objectif est de n'échanger le permis français qu'avec des Etats pour lesquels un accord intergouvernemental existe, et de ne conclure de tels accords qu'avec des Etats satisfaisant à des critères de sécurité routière, de formation (des conducteurs, des enseignants à la conduite et des examinateurs), de sécurisation des titres et de conditions de délivrance des permis de conduire comparables à ceux de la France. Les données techniques nécessaires à cette évaluation sont obtenues localement par les représentations diplomatiques et consulaires françaises, puis font l'objet d'un examen qualitatif par la Délégation à la sécurité routière.
L'expertise est réalisée au regard des règles du code de la route et divers textes réglementaires pris pour son application et afférents à la sécurité et à la circulation routières. Sont examinés en particulier : les données générales relatives à la sécurité routière, les catégories de permis de conduire délivrés, les conditions d'âge ou de contrôle médical requises, les titres de conduite en circulation, leurs caractéristiques, leur sécurisation. La délégation à la sécurité routière (DSR) porte une attention toute particulière aux conditions d'examen et de formation des enseignants de la conduite et des examinateurs du permis de conduire. De même, la prévention de la fraude constitue pour la DSR un point de vigilance particulier concernant les caractéristiques des titres de conduite en circulation et la sécurisation de ces titres.
Deux mouvements parallèles structurent cette réforme :
- les Etats qui n'échangent actuellement pas leur permis avec la France mais l'ont saisie d'une demande officielle de conclusion d'un accord en ce sens ou ceux intéressant la France en raison notamment de la présence de nombreux ressortissants français sur place font l'objet de cette évaluation afin de juger de l'opportunité de conclure un accord d'échange avec eux ;
- les Etats avec lesquels la France échange actuellement ses permis font tous l'objet de cette évaluation et, selon les résultats obtenus, seront sollicités pour la conclusion d'un accord ou informés de l'arrêt de l'échange de leurs permis par la France.
C'est dans le premier mouvement que s'inscrivent ces deux accords avec la Chine et le Qatar, les permis de conduire délivrés par ces autorités n'étant pas échangés actuellement. Leurs titulaires transférant en France leur résidence normale doivent donc actuellement repasser le permis français pour pouvoir continuer de conduire en France.
II- Conséquences estimées de la mise en oeuvre de l'accord
a. Conséquences administratives :
La France n'échangeant à l'heure actuelle pas les permis de conduire avec le Qatar et la Chine, l'entrée en vigueur de ces deux accords aura comme conséquence première une augmentation du nombre de demandes d'échange. Les services affectés seront en premier lieu les deux services instructeurs de ce type de demandes : le centre d'expertise et de ressources des titres - échange de permis étrangers (CERT-EPE) de Nantes (rattaché à la Préfecture de Loire-Atlantique) et le centre de ressources des échanges de permis de conduire étrangers et des permis internationaux de conduite (CREPIC) de Paris (rattaché à la Préfecture de Police de Paris). Premier guichet des usagers sollicitant l'échange de leur permis étranger lors de leur installation en France, les services des étrangers des préfectures seront également concernés par cette augmentation :
- hors étudiants, ces derniers bénéficiant de la reconnaissance de leur permis de conduire chinois durant toute la durée de leurs études et n'étant par conséquent pas concernés par l'échange des permis, environ 5 000 nouveaux titres de séjours sont délivrés à des ressortissants chinois chaque année en France. A titre de comparaison, le CERT de Nantes reçoit 137 000 dossiers par an. Les dossiers chinois représentent donc potentiellement un accroissement annuel de près de 4 %.
- avec moins d'une dizaine de nouveaux titres de séjours délivrés à des ressortissants qatariens chaque année en France hors étudiants, la demande supplémentaire potentielle est marginale.
De plus, dans le cadre de l'instruction des demandes d'échange, et en cas de doute sur l'authenticité du titre présenté à l'échange ou de la validité des droits à conduire s'y trouvant rattachés, les services instructeurs peuvent en solliciter l'authentification auprès des autorités de l'Etat de délivrance du titre. Si le recours à une telle démarche n'a pas vocation à être systématique, il est cependant très probable, compte tenu de l'introduction d'une nouvelle pratique d'échange. Le bureau national des droits à conduire, point de contact pour la France, verra probablement une augmentation des sollicitations reçues.
En ce qui concerne les territoires d'outre-mer, cinq collectivités sont compétentes en matière de circulation routière et délivrent ainsi leur propre modèle de permis : la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, Wallis-et-Futuna, Saint-Barthélemy et Saint-Martin.
Les dispositions particulières de ces collectivités ainsi que la réglementation française applicable 9 ( * ) en matière de reconnaissance et d'échange des permis délivrés soit par le ministère français de l'Intérieur soit par d'autres pays permettent une application partielle des accords à ces territoires.
Ainsi, les permis qatariens et chinois pourront être échangés dans ces collectivités. En revanche, en l'absence de mention expresse des modèles de permis délivrés par ces collectivités dans les accords, ceux-ci ne seront pas échangeables au Qatar ou en Chine. Pour outrepasser cette difficulté, un échange préalable du permis de la collectivité pour un permis délivré par le ministère français de l'Intérieur sera nécessaire.
Pour ce qui est de la reconnaissance des permis, les accords pourront là-aussi trouver plein effet dans les collectivités territoriales avec une reconnaissance des permis qatariens et chinois sur leur territoire sans que la réciproque soit vrai, les dispositions du droit local s'appliquant au Qatar et en Chine pour les permis délivrés par les autorités des collectivités d'outre-mer. Sur ce point également, l'échange préalable du permis de la collectivité pour un permis délivré par le ministère français de l'Intérieur permettra de lever cet obstacle.
b. Conséquences juridiques :
• Articulation avec les accords ou conventions internationales existantes
Ces accords s'articulent sans difficulté avec la Convention de Vienne de 1968 sur la circulation routière, qui requiert la reconnaissance des permis valablement délivrés entre les Parties et ne contient aucune stipulation relative aux échanges de permis. Le Qatar est Partie à cette Convention, mais pas la Chine.
• Articulation avec le droit européen
La Directive 2006/126/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 relative au permis de conduire, si elle unifie les conditions de délivrance, de reconnaissance et d'échange des permis de conduire délivrés par les autorités d'un Etat membre de l'EEE, laisse à chaque Etat la possibilité de déterminer ses propres règles relatives à la reconnaissance et l'échange des permis de conduire délivrés par les autorités d'un Etat tiers.
Ces deux accords d'échanges avec la Chine et le Qatar entrent ainsi pleinement dans la compétence de la France au regard du droit européen.
• Articulation avec le droit interne
Les stipulations en matière de reconnaissance et d'échange des permis de conduire contenues dans les accords demeurent très proches du cadre général des échanges de permis étrangers prévu par l'arrêté du 12 janvier 2012 fixant les conditions de reconnaissance et d'échange des permis de conduire délivrés par les Etats n'appartenant ni à l'Union européenne, ni à l'Espace économique européen.
L'accord avec le Qatar y déroge cependant en permettant la reconnaissance du permis de conduire qatarien sans qu'il soit nécessaire qu'il soit accompagné d'une traduction en français ou d'un permis de conduire international, puisqu'y figurent des informations en anglais.
L'accord avec la Chine y déroge en permettant que le permis étranger puisse être restitué à l'usager lors de la remise du nouveau permis. En effet, l'arrêté du 12 janvier 2012 à son article 13 indique que l'autorité administrative conserve le titre étranger au moment de l'échange contre un permis de conduire français.
S'agissant des transferts de données à caractère personnel en application de l'article 7, sous c) et d) des accords, ceux-ci sont appelés à s'inscrire dans le cadre des dispositions du Règlement 2016/679, du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD) 10 ( * ) et de la loi modifiée n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés 11 ( * ) . En particulier, conformément à l'article 46, paragraphe 1, du RGPD, en l'absence de décision de la Commission européenne constatant que la Chine ou le Qatar assurent un niveau adéquat de protection des données personnelles, un responsable de traitement ne peut transférer des données personnelles vers ces pays que s'il a prévu des garanties appropriées et à la condition que les personnes concernées disposent de voies de droit effectives.
En application du paragraphe 2 du même article, ces garanties appropriées peuvent être fournies, sans autorisation particulière d'une autorité de contrôle, par un instrument juridiquement contraignant et exécutoire entre les autorités ou organismes publics. Or les stipulations des accords soumis à l'approbation du Parlement revêtent le caractère d'un tel instrument juridiquement contraignant et exécutoire entre autorités publiques.
En outre, les clauses de confidentialité de ces accords, qui limitent les transferts de données exclusivement aux fins de leur application, prévoient que chaque Partie s'engage à respecter la confidentialité des informations relatives au permis de conduire fournies par l'autre Partie, y compris dans l'hypothèse où l'accord viendrait à prendre fin, et que la divulgation ultérieure de ces données est subordonnée au consentement préalable de l'autre Partie.
Ainsi, dans la mesure où, d'une part, les transferts de données entre autorités que prévoient ces accords ont une finalité bien circonscrite, à savoir la reconnaissance ou l'échange d'un permis de conduire, d'autre part, qu'elles font suite à une démarche explicite par laquelle le titulaire du permis a consenti à la communication des données personnelles le concernant, enfin, que les données contenues dans les permis de conduire sont limitées aux seules données relatives à l'identité civile des titulaires des permis en cause, les garanties prévues par les clauses de confidentialité des accords apparaissent appropriées et proportionnées à la gravité de l'atteinte au droit à la vie privée des personnes concernées et à la protection de leurs données personnelles (cf. en ce sens, CJUE, 2 octobre 2018, Ministerio fiscal, C-207/16).
Toutefois, à supposer même le contraire, il sera noté que l'article 49, paragraphe 1, sous d), et paragraphe 4, du RGPD prévoit qu'en l'absence de décision d'adéquation ou de garanties appropriées, un transfert de données à caractère personnel vers un pays tiers peut avoir lieu lorsque ce transfert est nécessaire pour des motifs importants d'intérêt public, reconnus par le droit de l'Union ou le droit de l'Etat membre auquel le responsable du traitement est soumis.
Or la procédure d'authentification des permis de conduire prévue par l'accord vise à assurer la sécurité routière, qui constitue un motif important d'intérêt public reconnu par le droit de l'Union. 12 ( * )
Dans ces conditions, les transferts de données personnelles prévus par ces accords sont, en tout état de cause, conformes aux dispositions de l'article 49 du RGPD.
c. Conséquences économiques et sociales
Ces deux accords étant de nature à simplifier l'établissement et l'adaptation des ressortissants de chaque partie sur le territoire de l'autre partie permet de rendre notre pays économiquement plus attractif et de faciliter la mobilité de nos ressortissants et de nos entreprises à l'étranger.
III - Historique des négociations
Ø Accord France-Chine
Les négociations avec la Chine ont débuté en mars 2010, alors que le cabinet du Premier ministre souhaitait conclure des accords d'échange des permis de conduire avec tous les pays membres du G20. Ces négociations, interrompues en 2011 alors que la France était engagée dans la transcription de la directive européenne de 2006, ont été relancées en 2014, à la demande de la Chine. Ces négociations ayant précédé le processus de révision du dispositif français des échanges de permis de conduire étrangers, la Chine n'a donc pas fait l'objet de l'évaluation à laquelle sont désormais soumis tous les pays candidats et pays avec lesquels l'échange ne repose que sur la simple pratique réciproque.
Les difficultés apparues lors des différents échanges entre services français et chinois impliqués, ayant trait au cadre de la reconnaissance, aux modèles de permis pouvant faire l'objet d'un échange et aux modalités de l'authentification ont été petit à petit surmontées, par une égalisation à un an de la possibilité de conduire sur le territoire d'une partie avec un permis délivré par l'autre partie et la limitation des échanges aux seuls modèles de permis les plus récents dans chaque pays, présentant ainsi les garanties de sécurisation les plus avancées. Un premier texte a été signé en février 2017 sous la forme d'un arrangement administratif. Un accord intergouvernemental étant cependant nécessaire pour la France en raison de la décision du Conseil d'Etat du 21 novembre 2016, de nouvelles discussions ont donc eu lieu pour adapter ce format, permettant la signature de l'accord final à Paris le 23 novembre 2018 entre le Délégué interministériel à la Sécurité routière et l'ambassadeur de la République populaire de Chine en France.
Ø Accord France-Qatar
Concernant le Qatar, des premiers contacts ont eu lieu dès le début de l'année 2017, alors que les autorités qatariennes avaient exprimé leur intérêt à la conclusion d'un tel accord. Conformément aux principes de la révision du dispositif français d'échange des permis de conduire, la situation locale a fait l'objet d'une évaluation qualitative par le ministère de l'Intérieur. L'analyse, par la délégation à la sécurité routière, du dossier technique constitué par l'ambassade de France à Doha s'étant avérée positive, le Qatar satisfaisant aux critères évalués, le ministère de l'Intérieur et le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères ont engagé des négociations avec les autorités qatariennes en février 2018. Aucune difficulté particulière n'a été constatée au cours de celles-ci et la visite de l'Emir du Qatar en France a permis de finaliser le texte à un rythme soutenu. L'accord a ainsi été signé à Paris en marge de cette visite le 6 juillet 2018 par l'ambassadeur de France au Qatar et l'ambassadeur du Qatar en France.
IV- Etat des signatures et ratifications
L'accord portant reconnaissance réciproque et échange des permis de conduire entre la France et la Chine a été signé à Paris le 23 novembre 2018 entre le Délégué interministériel à la sécurité routière et l'ambassadeur de la République populaire de Chine en France.
La partie chinoise a notifié au ministère de l'Europe et des affaires étrangères l'accomplissement des procédures internes nécessaires à l'entrée en vigueur de cet accord le 10 mai 2019.
L'accord portant reconnaissance réciproque et échange des permis de conduire entre la France et la Qatar a été signé à Paris le 6 juillet 2018 par l'ambassadeur de France au Qatar et l'ambassadeur du Qatar en France.
La partie qatarienne a notifié au ministère de l'Europe et des Affaires étrangères l'accomplissement des procédures internes nécessaires à l'entrée en vigueur de cet accord le 10 avril 2019.
* 1 Publication de la Direction générale du Trésor : " Les relations commerciales entre la France et la Chine en 2018 (douanes françaises) ", 4 avril 2019.
* 2 Publication de la Direction générale du Trésor : " La relation économique entre la France et le Qatar ", 8 juillet 2019.
* 3 Décret n° 2019-833 du 8 août 2019 portant publication de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Etat du Qatar dans le domaine de la coopération culturelle, signé à Paris le 23 juin 2014.
* 4 Convention de Vienne de 1968 sur la circulation routière .
* 5 Directive 2006/126/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 relative au permis de conduire .
* 6 Arrêté du 12 janvier 2012 fixant les conditions de reconnaissance et d'échange des permis de conduire délivrés par les Etats n'appartenant ni à l'Union européenne, ni à l'Espace économique européen .
* 7 Conseil d'Etat, 5 e - 4 e chambres réunies, 21/11/2016, 382484, Publié au recueil Lebon .
* 8 Décret n°64-1161 du 19 novembre 1964 portant publication de l'échange de lettres des 26 et 31 août 1964 entre la France et Monaco, relatif à l'échange des permis de conduire.
* 9 Article 9 de l'arrêté du 20 avril 2012 fixant les conditions d'établissement, de délivrance et de validité du permis de conduire .
* 10 Règlement général sur la protection des données .
* 11 Loi modifiée n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés .
* 12 Cf. par ex. CJUE, 7 juillet 2016, Muladi, C-447/15 (voir pièce jointe), point 46, à propos de la directive 2003/59, du 15 juillet 2003, relative à la qualification initiale et à la formation continue des conducteurs de certains véhicules routiers affectés aux transports de marchandises ou de voyageurs.