SERVICE DES ETUDES JURIDIQUES (Avril 2005)
ESPAGNE
Le nombre des gens du voyage serait compris entre 600 000 et 650 000, ce qui représente 1,40 % à 1,50 % de la population espagnole.
1) Le cadre juridique
La Constitution de 1978 reconnaît l'égalité de tous les citoyens espagnols devant la loi. Le Congrès des députés a adopté en octobre 1985 une proposition de résolution invitant le gouvernement à élaborer un plan en faveur des tsiganes. En 1988, le ministère des affaires sociales a donc élaboré le programme de développement pour les tsiganes, qui a été mis en oeuvre à partir de 1989, grâce à l'inscription de crédits spécifiques au budget de l'État et à la création d'une unité administrative spécialisée. Le plan cherche notamment à améliorer la formation scolaire et professionnelle, ainsi que l'éducation sanitaire et la protection sociale de la communauté tsigane, et à faciliter la coexistence entre cette dernière et les autres habitants. En matière de logement, le plan promeut la sédentarisation.
L'exécution de la politique d'intégration des tsiganes incombant aux communautés autonomes et aux collectivités territoriales, des accords ont été signés entre celles-ci et l'État, qui finance le tiers des projets approuvés dans le cadre du budget alloué pour l'année. Certaines communautés autonomes ont également mis à profit leurs compétences en matière d'action sociale pour compléter les mesures nationales.
2) La pratique
Depuis la fin du XV e siècle, des mesures ont été régulièrement prises pour limiter les déplacements des gens du voyage. Pendant la période franquiste, la garde civile avait reçu l'ordre de surveiller tout particulièrement cette population, a priori suspecte. Ainsi, les personnes sans domicile fixe pouvaient, au bout de trois jours, être obligées de quitter l'endroit où elles stationnaient.
À l'heure actuelle, la plupart des gens du voyage sont sédentarisés. Ils sont installés principalement en Andalousie, en Catalogne, ainsi que dans les communautés de Madrid et de Valence. Ils sont regroupés à la périphérie des grandes villes, où ils vivent dans des conditions de grande précarité.
Les tsiganes qui pratiquent encore le nomadisme sont une minorité et aucune disposition n'est prévue, tant au plan national que par les communautés autonomes, pour leur stationnement .
IRLANDE
Le nombre des gens du voyage serait d'environ 25 000, ce qui représente 0,6 % de la population irlandaise.
1) Le cadre juridique
En 1993, le ministère pour l'égalité et les réformes législatives a institué un groupe de travail sur les gens du voyage, qu'il a chargé d'établir un constat, de faire des recommandations et d'élaborer une politique globale en faveur de cette communauté. Le rapport du groupe de travail, publié en 1995, a servi de base à la loi de 1998 sur l'hébergement des gens du voyage et constitue encore aujourd'hui le fondement de la politique irlandaise dans ce domaine. Pour contrôler la mise en application des mesures législatives, un comité de suivi a été mis en place en 1998. Depuis plusieurs années, les programmes de gouvernement des partis formant la coalition au pouvoir contiennent des engagements en faveur des gens du voyage.
La loi de 1998 oblige les conseils élus des autorités locales responsables du logement (3 ( * )) à adopter un programme quinquennal d'hébergement des gens du voyage. En cas de carence, le programme est adopté par l'administrateur de la collectivité, qui est un fonctionnaire chargé d'en assurer la gestion conformément aux orientations du conseil.
Compte tenu de la faible autonomie financière des collectivités territoriales, la loi précise que toutes les dépenses que son application entraîne doivent être prises en charge par le budget de l'État.
Afin de faciliter la consultation des intéressés au cours de la préparation et de la mise en oeuvre de ces programmes, la loi institue, auprès de chaque autorité locale, un comité consultatif local pour les gens du voyage , composé de représentants de cette communauté, ainsi que d'élus et de fonctionnaires. Un comité consultatif national est également institué auprès du gouvernement.
L'établissement et la modification des programmes quinquennaux des collectivités s'effectuent selon une procédure qui s'efforce de concilier les intérêts de tous. Les autorités locales ont l'obligation de notifier aux comités consultatifs pour les gens du voyage leur intention d'élaborer ou de réviser leur programme. Les projets de programme sont établis à partir des besoins des gens du voyage, en considérant plus particulièrement les besoins en sites de transit et en tenant compte de l'évolution prévisible dans les cinq années. Ces projets doivent être rendus publics et une consultation de la population locale doit être organisée avant leur adoption.
La loi prévoit aussi que les autorités locales chargées de l' urbanisme doivent inclure les dispositions relatives à l'hébergement des gens du voyage dans leurs documents.
Pour permettre aux gens du voyage de vivre comme ils le souhaitent, les autorités locales peuvent leur accorder des prêts pour acquérir des terrains, pour construire des logements, pour acheter ou réparer des caravanes.
En contrepartie de ces diverses obligations, la loi confère aux collectivités locales des pouvoirs élargis en matière d'interdiction de campements sauvages.
2) La pratique
Le rapport de 1995 recommandait la création de 1 200 places destinées au stationnement résidentiel des gens du voyage, de 1 000 emplacements de transit et de 900 logements avant l'an 2000.
Les premiers programmes adoptés couvraient la période allant du 1 er janvier 2000 au 31 décembre 2004. Ils ont été financés en totalité par l'État : 130 millions d'euros ont été consacrés à la création et à la réhabilitation d'aires d'accueil, ainsi qu'à la construction de petits groupes de maisons spécialement destinées aux gens du voyage. Entre 2000 et 2003, 319 places de stationnement ont été créées et 236 rénovées.
Le gouvernement estime que, à la fin de l'année 2004, le nombre de familles vivant sur des emplacements illégaux avait été réduit de moitié par rapport à 2000. Les organisations représentatives des gens du voyage estiment, quant à elles, que 20 % des gens du voyage ne bénéficient pas aujourd'hui de conditions de logement adéquates et suggèrent d'introduire un régime de sanctions à l'égard des autorités locales qui, après avoir adopté un programme quinquennal, ne respectent pas leurs engagements.
Les autorités locales doivent adopter leurs nouveaux programmes pour les années 2005 à 2008 avant le 30 avril 2005. Le gouvernement a indiqué que l'effort devrait être poursuivi, notamment pour les aires de transit. Le budget national consacré à l'hébergement des gens du voyage s'élève à 45 millions d'euros pour 2005, ce qui représente une augmentation de 10 millions d'euros par rapport à 2004.
* (3) C'est-à-dire les collectivités locales de niveau inférieur, dont l'appellation varie selon qu'elles sont situées en zone urbaine ou rurale