SERVICE DES ETUDES JURIDIQUES (Janvier 2005)
ROYAUME-UNI
Depuis le passage à l'armée de métier, qui s'est effectué entre 1958 et 1962, la réserve joue un rôle important au sein des forces armées. Elle se compose principalement de la réserve régulière, qui rassemble les anciens militaires professionnels, et de la réserve volontaire. La loi de 1996 sur les forces de réserve a renforcé le rôle de la réserve volontaire , en créant de nouvelles catégories de réserve , dont certaines permettent aux intéressés de servir à plein temps pendant plusieurs mois. La plupart des réservistes volontaires s'engagent à suivre des entraînements d'un niveau équivalent à ceux des militaires professionnels et à être mobilisés dans les cas prévus par la loi de 1996. Depuis les années 1990, des réservistes ont été mobilisés à plusieurs reprises. Le document sur l'état de la défense stratégique, publié en 1998 et complété en 2002, souligne la place majeure tenue par la réserve dans la défense globale et propose d'améliorer le recrutement des réservistes, notamment par le dialogue avec les employeurs. À cet effet, le ministère de la défense a lancé en octobre 2002 la campagne SaBRE . |
Seule, la réserve de l'armée de terre est étudiée dans le texte qui suit. Les mesures retenues sont celles qui s'appliquent aux personnes qui entrent actuellement dans la réserve, les réservistes recrutés il y a plusieurs années pouvant être assujettis à d'autres règles.
1) L'organisation de la réserve militaire
La réserve militaire est formée de deux composantes : la réserve régulière et la réserve volontaire.
Les réservistes peuvent être mobilisés en application des articles 52, 54 et 56 de la loi de 1996 sur les forces de réserve, c'est-à-dire en situation de crise, avérée ou imminente, le cas échéant à l'extérieur des frontières. Lorsque de telles circonstances surviennent, les réservistes qui n'ont pas été mobilisés peuvent choisir de s'engager volontairement. Les réservistes volontaires sont les premiers mobilisés.
L'article 52 dispose que la Reine signe un ordre de mobilisation s'il lui apparaît qu'un danger national est imminent, dans les situations d'extrême urgence, ou en cas d'attaque réelle ou redoutée du Royaume-Uni.
L'article 54 prévoit que le ministre de la défense signe un ordre de mobilisation s'il lui apparaît que des opérations de guerre sont en préparation ou en cours. Ainsi, lors de la seconde guerre du Golfe, un peu plus de 6 000 réservistes ont été mobilisés en février et mars 2003 dans le cadre de l'opération TELIC. Il s'agissait pour l'essentiel de réservistes volontaires, mais la mobilisation a aussi concerné des membres de la réserve régulière. C'est également sur la base de l'article 54 que la mobilisation des réservistes s'est effectuée pour les opérations en cours en Irak.
L'article 56 énonce que ministre de la défense signe un ordre de mobilisation s'il lui semble nécessaire ou souhaitable d'utiliser les forces armées hors du Royaume-Uni sur des théâtres d'opération ou en cas de catastrophe.
a) La réserve régulière
Elle rassemble les anciens militaires professionnels , qui sont soumis à des obligations de rappel et d'entraînement variables en fonction de la durée de leur carrière et de leur âge.
À côté de la réserve régulière stricto sensu , la réserve régulière inclut aussi la réserve à long terme (LTR) et les retraités. Les anciens militaires sont d'abord versés dans la réserve régulière stricto sensu . En avançant en âge, ils passent dans la LTR, puis dans le groupe des retraités.
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La réserve
régulière
stricto sensu
Elle est composée :
- des anciens professionnels, qui sont versés à la fin de leur carrière dans la réserve, où ils sont astreints à un engagement de rappel et d'entraînement pendant en général six ans ;
- d'anciens militaires de carrière qui ont choisi de rester dans la réserve régulière au-delà de leurs obligations légales, au lieu d'être versés dans la LTR.
L'entraînement annuel des membres de la réserve régulière comprend théoriquement une ou plusieurs périodes dont la durée ne peut excéder seize jours consécutifs et qui peuvent être complétées par d'autres obligations en cas de besoin. Cette disposition n'est plus appliquée depuis de nombreuses années, de sorte que les membres de la réserve régulière ne sont plus entraînés.
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La réserve à
long terme (LTR)
Après avoir achevé leur engagement obligatoire, les anciens militaires deviennent membres de la LTR, où ils restent soit jusqu'à l'âge de cinquante-cinq ans soit jusqu'à ce que la durée totale passée dans la réserve régulière puis dans la LTR atteigne dix-huit ans. Pour que les intéressés ne soient pas retenus trop longtemps dans la LTR, la disposition la plus favorable est retenue.
Les membres de la LTR ne sont soumis à aucune obligation d'entraînement.
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Les retraités de
l'armée
Ils sont tenus par un engagement de rappel jusqu'à l'âge de soixante ans, dès lors qu'ils perçoivent une pension militaire. Comme les précédents, ils n'ont pas d'obligation d'entraînement.
b) La réserve volontaire
Elle est traditionnellement composée des « forces de la réserve volontaire » (VRF). À côté de cette réserve classique, la loi de 1996 sur les forces de réserve a créé quatre nouvelles catégories de réserve dont les membres souscrivent des engagements particuliers : la réserve à temps plein, la réserve des engagements supplémentaires, la réserve de haute disponibilité et la réserve parrainée. Une forme de réserve supplémentaire, les forces de réaction du contingent civil, a été créée en 2002.
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Les forces de la réserve
volontaire (VRF)
Elles sont constituées de volontaires qui viennent de la vie civile et qui s'engagent en moyenne pour une durée de cinq ans . Ils accomplissent différentes tâches, soit à titre individuel, soit dans le cadre d'une unité de réserve, leur mission consistant à apporter un soutien aux différentes forces armées régulières. Ils ont en général une obligation d'entraînement d'un soir par semaine et de trente jours dans l'année, qui se répartissent en plusieurs week-ends et en un camp annuel de quinze jours consécutifs.
• La réserve à temps plein (FTRS)
Ses membres servent à temps plein, pendant une période donnée . Plusieurs types d'engagement sont proposés .
Les membres de la FTRS « engagement à temps plein » occupent des postes qui reviennent en principe à des professionnels, mais qui sont temporairement vacants. Ils sont appelés à remplir leur mission dans le monde entier. En principe, la durée de l'engagement initial est d'au plus douze mois. Il peut être prolongé exceptionnellement jusqu'à 42 mois. La limite d'âge est de cinquante ans pour les officiers et de quarante ans pour les autres.
Les membres de la FTRS « engagement limité » remplissent leur mission dans un lieu unique, le cas échéant à l'étranger, auprès d'une unité ou dans un quartier général. Ils acceptent à l'avance d'être détachés au plus 35 jours par an, aucune période de détachement ne pouvant excéder 21 jours. En principe, la durée de l'engagement initial est d'au plus 42 mois, mais, à titre exceptionnel, elle peut être prolongée.
Les membres de la FTRS « engagement à domicile » occupent des postes situés en un lieu unique, nécessairement sur le territoire national. La FTRS « engagement à domicile » se subdivise en deux groupes.
Les réservistes du premier groupe de la FTRS « engagement à domicile » sont destinés à occuper temporairement des emplois pour lesquels il n'y a pas de personnel militaire qualifié. Le contrat initial peut être conclu pour une durée de douze mois. Il peut être prolongé jusqu'à 42 mois. Il précise les contraintes particulières auxquelles le signataire est soumis. La limite d'âge est de cinquante ans pour les officiers et de quarante ans pour les autres.
Ceux du second, le groupe de l'état-major de réserve, sont presque exclusivement d'ex-officiers âgés de cinquante à cinquante-cinq ans et qui ont une grande expérience de l'encadrement. Ils sont nommés dans des postes désignés spécifiquement, pour des durées assez longues, puisque les contrats peuvent être conclus pour quinze ans. La limite d'âge est de soixante-cinq ans.
• La réserve des engagements
supplémentaires
Ses membres concluent des contrats qui permettent aux intéressés de travailler à temps partiel dans l'armée régulière ou dans des unités de réserve. Les engagements ont une durée minimale de treize semaines, le réserviste devant travailler pour l'armée au moins un jour par semaine pendant une période de treize semaines consécutives.
• La réserve de haute
disponibilité (HRR)
Elle est constituée de réservistes volontaires dont les compétences spécifiques (en langues, dans le domaine du renseignement, etc.) peuvent être requises occasionnellement, mais qui sont mobilisables sous sept jours .
Lorsque l'intéressé est lié à son employeur par un contrat de travail de plus de deux jours hebdomadaires, la souscription d'un tel engagement est subordonnée à l'accord écrit de l'employeur. Cet accord est renouvelable chaque année.
• La réserve parrainée
Elle est composée de salariés qui travaillent dans des entreprises liées à l'armée par des contrats de fourniture de service , les employeurs ayant accepté que leurs salariés deviennent réservistes. Les obligations du réserviste, notamment en matière d'entraînement, figurent dans le contrat conclu entre le ministre de la défense et le salarié.
• Les forces de réaction du contingent
civil (CCRF)
Elles ont été créées à la fin de l'année 2002. Leurs membres suivent un entraînement spécifique de cinq jours par an en plus de leur entraînement normal et sont ainsi capables de seconder les services civils de secours et les forces militaires régulières en cas de catastrophe naturelle ou d'attaque terroriste majeure sur le territoire national . Les membres des CCRF sont mobilisables sous 24 heures.
2) Le statut des réservistes volontaires
Seul, le cas des réservistes des forces de la réserve volontaire est étudié.
a) La rémunération
Pour chaque journée complète d' entraînement représentant au moins huit heures, les membres de la VRF reçoivent, outre les éventuels remboursements de frais de transport, la même solde de base qu'un soldat ou officier de l'armée régulière . Pour une présence comprise entre quatre et huit heures, l'indemnité versée correspond à la moitié de cette solde et, pour une présence comprise entre deux et quatre heures, au quart.
S'ils ont suivi les entraînements prescrits et ont réussi certains tests militaires, ils peuvent également percevoir une prime annuelle non imposable qui dépend de leur unité et de leur niveau d'engagement. Le montant de cette prime varie également en fonction du type d'engagement conclu et du nombre d'années de service dans la réserve. Pour la période comprise entre le 1 er avril 2004 et le 31 mars 2005, le montant de la prime s'établit comme suit :
- 350 £ (soit environ 500 €) pour la première année de service ;
- 770 £ (soit environ 1 100 €) pour la deuxième année de service ;
- 1 190 £ (soit environ 1 700 €) pour la troisième année de service ;
- 1 380 £ (soit environ 2 000 €) à partir de la cinquième année de service.
En cas de mobilisation, les réservistes reçoivent la même solde que leurs homologues de l'armée professionnelle , ainsi que, le plus souvent, une prime de mobilisation non imposable . En outre, les réservistes mobilisés peuvent percevoir des indemnités supplémentaires :
- l'indemnité standard (RSA), qui couvre la différence entre la rémunération civile et la solde , dans la limite de plafonds qui dépendent du grade ou de la spécialité ;
- l'indemnité pour contraintes supplémentaires (RHA), qui a pour objet de venir en aide au réserviste, lorsque celui-ci peut faire la preuve des difficultés rencontrées et que la RSA n'est pas suffisante.
b) La garantie du maintien de l'emploi civil
Aucune disposition ne règle explicitement les périodes d'absence pour entraînement, mais celui-ci se déroule en général en fin de semaine ainsi que pendant les congés payés annuels. En revanche, la loi de 1985 sur la protection de l'emploi civil des réservistes accorde au réserviste mobilisé un droit à réintégration dans le dernier emploi, dès lors que l'intéressé en fait la demande en temps voulu à son employeur. En cas de litige avec l'employeur, le réserviste peut s'adresser à un comité de réintégration , indépendant du ministère de la défense, pour que celui-ci ordonne soit la réintégration soit le versement d'une indemnité compensatrice.
La même loi punit d'une amende l'employeur qui licencie un salarié en raison de son appartenance à la réserve et prévoit que l'employeur peut être condamné à verser au réserviste concerné une indemnité d'un montant égal à cinq semaines du dernier salaire, à titre de réparation .
Après sa réintégration, le salarié réserviste bénéficie d'une protection contre le licenciement pendant une période dont la durée, comprise entre 13 et 52 semaines, dépend de son ancienneté avant sa mobilisation.
c) la protection sociale
La participation aux entraînements se faisant en général pendant les congés payés annuels, le réserviste reste couvert par son régime de protection sociale habituel.
En revanche, en cas de mobilisation, les réservistes peuvent choisir le régime de retraite de leur employeur, le ministère de la défense payant alors la cotisation patronale à la place de l'employeur, ou celui de l'armée. La cotisation salariale reste dans tous les cas à la charge du réserviste.
3) Les relations entre l'armée et les employeurs
a) Le droit d'absence des réservistes
En dehors des périodes de mobilisation, les réservistes ont besoin de l'accord de leur employeur pour participer à leurs activités militaires . Comme les dates des entraînements sont généralement connues longtemps à l'avance, cela pose peu de problèmes.
Si le réserviste est volontaire pour participer à des activités opérationnelles, il doit l'indiquer à son employeur et obtenir l'autorisation de ce dernier.
En cas de mobilisation, une autre règle s'applique. Le réserviste bénéficie d'un droit d'absence : la mobilisation est notifiée à l'employeur et le réserviste remet également à ce dernier un courrier du ministère de la défense apportant toutes les précisions nécessaires. Toutefois, l'employeur peut essayer d'obtenir une exemption ou un report en s'adressant, dans les sept jours, à un arbitre désigné par le ministère de la défense et en faisant valoir que l'absence du réserviste causerait un préjudice sérieux à son entreprise. S'il n'obtient pas satisfaction, il peut faire appel auprès d'une commission ad hoc , indépendante du ministère. En contrepartie de l'obligation qu'ont les employeurs de laisser leurs salariés réservistes s'absenter, ils bénéficient de différentes aides financières : remboursement, dans la limite de plafonds fixés par voie réglementaire, des dépenses entraînées par le recrutement de remplaçants (insertion d'annonces, entretiens d'embauche...), des frais courants liés à l'absence des salariés (honoraires des agences de fourniture de main d'oeuvre, heures supplémentaires...), des coûts de formation professionnelle si une remise à niveau est nécessaire au moment de la réintégration, etc.
Depuis le 1 er avril 2004, les nouveaux réservistes et ceux qui souscrivent un nouvel engagement sont tenus d'autoriser le ministère de la défense à notifier leur appartenance aux VRF à leur employeur.
b) Le partenariat entre l'armée et les employeurs
Le ministère de la défense a lancé la campagne SaBRE (Soutenir les réservistes britanniques et leurs employeurs) en octobre 2002.
Jusqu'alors, cette mission avait été menée par le Comité national de liaison avec les employeurs, NELC, créé en 1986, à l'époque de la guerre des Falklands. Le NELC a été remplacé par le Comité consultatif national des employeurs , le NEAB ( National Employer Advisory Body ), organisme indépendant chargé de fournir des avis au ministre de la défense sur les questions soulevées par l'emploi des réservistes, sur le développement de la communication à destination des réservistes et notamment sur l'efficacité et l'impact de SaBRE. Le NEAB réunit des cadres dirigeants, en particulier des directeurs des ressources humaines, un directeur d'hôpital et le directeur d'un établissement d'enseignement supérieur.
Relais entre les employeurs, les réservistes et le ministère de la défense, SaBRE a pour principal objet l'amélioration du recrutement des réservistes par la sensibilisation des employeurs aux bénéfices qu'ils peuvent retirer de l'emploi de réservistes.
Dans le cadre de cette campagne, un réseau de treize représentants locaux a été mis en place, un site Internet créé, des publications éditées et des campagnes dans les médias développées. Des rencontres avec les entreprises sont organisées, en particulier sous la forme de week-ends au cours desquels les employeurs et les cadres dirigeants sont invités à découvrir le rôle et les activités des réservistes en participant aux entraînements. Le ministère de la défense invite également les personnes intéressées à se rendre à l'étranger sur des théâtres d'opération ou des sites d'entraînement de la réserve.
SaBRE permet aussi d'informer les employeurs et les réservistes, de répondre à leurs questions, de favoriser leurs relations, notamment en aidant à la mise en place de codes de bonne conduite dans les entreprises .
De plus, il existe une liste des « employeurs solidaires ». Ainsi, un peu plus de 5 000 employeurs britanniques ont adressé un courrier confirmant leur soutien à la réserve et dans lequel ils s'engagent à faciliter la présence de leurs employés réservistes aux entraînements.