2. Les problèmes des Alliances Françaises
Depuis plusieurs années, le réseau des
Alliances Françaises traverse une période difficile et doit
trouver des solutions à ses problèmes pour être de nouveau
pleinement opérationnel.
Le déséquilibre du réseau
: il se renforce chaque
année, mais il reste toujours centralisé. Certes, il est à
l'image de la Corée :
" déséquilibrée avec
une tête hypertrophiée par rapport au reste du corps "
,
selon un ancien délégué général.
Séoul domine à elle seule l'ensemble du pays, produisant et
absorbant les trois quarts des biens et des équipements culturels.
L'Alliance Française de Séoul
"a beau faire des petits "
et vouloir fortifier ses assises provinciales, elle reste avant tout
orientée vers la capitale.
La baisse des inscriptions
: le réseau des Alliances
Françaises a connu un plein essor à l'époque des Jeux
Olympiques de Séoul, comme l'indique le tableau ci-après,
concernant le nombre d'étudiants inscrits entre 1987 et 1991.
|
Séoul |
Pusan |
Taegu |
Daejon |
Kwangju |
1987 |
6 000 |
530 |
630 |
250 |
165 |
1988 |
6 000 |
600 |
490 |
360 |
210 |
1989 |
5400 |
590 |
ND |
ND |
ND |
1990 |
4 300 |
680 |
ND |
ND |
ND |
1991 |
3 700 |
690 |
140 |
350 |
120 |
La baisse des inscriptions, notamment à Séoul
et Taegu, est due à la concurrence des autres langues et à la
plus grande facilité pour les étudiants coréens de venir
apprendre cette langue sur place. Autrement dit, l'Alliance Française
n'a plus le monopole de l'enseignement/apprentissage du français.
Toutefois, on note une certaine fidélisation du public. Ce taux de
fidélisation varie d'une Alliance à l'autre, d'une méthode
à l'autre, d'une période de l'année à l'autre :
juillet/août est la session annuelle la plus fournie, suivie de
janvier/février, correspondant toutes deux aux périodes de
vacances.
La non-titularisation des enseignants
: si l'ensemble du corps
professoral est stable et compétent, ses conditions de
rémunération restent assez modestes. Les enseignants sont
payés en fonction du nombre d'heures de cours (150 francs de l'heure en
moyenne) et n'ont pas de vacances ; le comité n'a toujours pas
accordé congés et mensualisation. A ce propos, le directeur des
cours n'a pas le droit de décider une augmentation de salaires de son
personnel : ces questions dépendent du comité local.
Les relations entre le président et le directeur
: ces relations
peuvent déboucher sur des conflits que connaissent la majorité
des Alliances Françaises.
Le président confond souvent son rôle de représentant
coréen avec le rôle d'animateur dévolu au directeur ;
à l'inverse, il arrive que ce dernier se prenne parfois pour le
président. Ces malentendus sont source de dysfonctionnements.
A Séoul, la confusion des rôles est accentuée par la
transformation du comité local en Fondation culturelle
franco-coréenne, dont le président est l'un des fondateurs de
l'Alliance Française de Séoul. A ce titre, il intervient dans
l'organisation culturelle et dans les décisions du directeur,
quelquefois pour s'y opposer.
La qualité inégale des directeurs
: le bon fonctionnement
et la qualité d'une Alliance Française dépendent
principalement de son directeur.
S'agissant de l'Alliance Française de Séoul, le directeur doit
être capable de diriger cette entité accueillant près de 4
000 étudiants. Dans les centres de dimension plus réduite, le
directeur est en relation permanente avec ses étudiants, ce qui
nécessite une parfaite connaissance de la mentalité
coréenne et un bon contact humain.
Les directeurs sont envoyés en Corée selon des critères
imprécis, qui ne dépendent pas nécessairement de leur
formation d'origine, ni de leurs motivations propres à venir en
Corée. Il en résulte des différences assez grandes d'un
directeur à l'autre, qui occasionnent des périodes plus ou moins
heureuses de la vie du centre.
Les principales qualités requises pour un directeur devraient
être à la fois humaines et intellectuelles :
- une grande ouverture d'esprit ;
- la disponibilité et une bonne capacité d'écoute ;
- une formation supérieure qui permette de s'adapter à
différentes situations ;
- l'expérience de l'enseignement du français langue
étrangère obligatoire.
Malgré ces imperfections, les différentes entités
concourant à l'action linguistique et culturelle fonctionnent. Il semble
que les mesures visant à accroître leur efficacité
devraient porter, en priorité, sur l'amélioration de la formation
et de la préparation des enseignants détachés en
Corée.
Comme l'écrit Louis PORCHER
54
:
" rien n'est plus
urgent que la création d'un CAPES de français langue
étrangère, largement justifié par les besoins et qui
mettrait fin à une pratique des nominations à l'étranger
extrêmement floue, c'est le moins que l'on puisse dire... "
.
________________________
54
Nouveaux terrains de recherche en formation, ELA n° 95,
juillet-septembre 1994, p. 105.