D. PROBLÈMES RELATIFS A L'ENSEIGNEMENT/APPRENTISSAGE DES LANGUES-CULTURES
Mis à part ces quelques heureuses exceptions,
l'enseignement/apprentissage des langues-cultures continue à fonctionner
dans un cadre restreint avec un objectif théorique, sans tenir compte
des attentes et des besoins des apprenants actuels, qui souhaiteraient, en
premier lieu, une bonne maîtrise de la langue orale. Cet aspect
s'accentue dans les secondes langues, en particulier les langues
européennes.
Les conséquences d'une telle situation sont simplement
désolantes. Ainsi, les 3 500 étudiants qui terminent chaque
année leur licence de français sont rarement aptes à
communiquer dans cette langue, à moins d'avoir suivi une formation
complémentaire. Les quatre années d'études universitaires
sont en quelque sorte coupées des réalités de la langue
française contemporaine.
En fait, beaucoup pensent que l'enseignement des langues à
l'école est, de toute façon, insuffisant, surtout quand il s'agit
des langues enseignées de manière livresque comme le
français et l'allemand, et que l'on doit faire appel aux autres moyens
(cours privés ou séjours linguistiques à
l'étranger).
Certains croient même que l'enseignement/apprentissage des langues n'est
pas un des devoirs de l'école, mais une affaire personnelle que chacun
doit prendre à son compte en fonction de ses capacités
intellectuelles, financières, et en fonction du temps dont il dispose.
Un tel raisonnement ne facilite pas le développement des langues
étrangères au sein de l'école, où a lieu le premier
contact avec ces matières.
Au fond, une conception élitiste de l'enseignement reste ancrée
dans la mentalité des Coréens ; l'école doit demeurer un
haut lieu d'étude théorique, les aspects pratiques pouvant
être appris ailleurs. La floraison des instituts privés en
témoigne.
Dans le milieu universitaire, l'observation, l'adaptation, ou la critique,
sont encore très peu prises en compte, et cela ne laisse guère de
place à l'enseignement/apprentissage des langues-cultures,
nécessitant la volonté de s'adapter aux changements constants.
Par ailleurs, l'enjeu économique joue un rôle déterminant
pour le choix des langues. La prédominance de l'anglais et du japonais
le prouve. Pour les secondes langues, cet enjeu est moins crucial, mais non
exempt d'aléas.
Ainsi, la langue vietnamienne a subi un sort difficile. La seule section de
vietnamien à l'Université des Langues Etrangères a
été supprimée à l'arrivée des communistes au
Sud Viêt-nam. Pendant presque quinze ans, ce pays a disparu de l'esprit
des Coréens, alors que le gouvernement y avait
régulièrement envoyé ses soldats, à la demande des
Etats-Unis. A la suite de l'établissement récent des relations
bilatérales qui a stimulé le développement des
échanges commerciaux, le département de cette langue a
été réouvert, et la création de nombreuses sections
dans les facultés encouragée par le Ministre de l'Education.
Ce cas précis illustre bien l'absence de cadre juridique concernant la
création et la préservation des sections de langues :
déjà, dans le programme d'étude, le cours de langue n'est
tenu que s'il y a un professeur, il peut être suspendu à tout
moment et la langue disparaître de l'établissement du jour au
lendemain.
En réalité, les dirigeants coréens considèrent
l'apprentissage de la langue comme un moyen d'accéder à une
formation complémentaire à l'étranger, jugée utile
pour le pays. C'est ainsi que le gouvernement de Séoul donne la
priorité aux disciplines scientifiques et technologiques. Chaque
année, de nombreux boursiers sont envoyés à
l'étranger pour se perfectionner dans ces domaines. Les étudiants
projetant d'aller au Japon ou aux Etats-Unis sont relativement bien
formés dans ces langues, car ils ont acquis de bonnes connaissances de
base, et ils effectuent, en plus, une année de stage linguistique sur
place.
Pour le français ou l'allemand, l'enseignement, trop théorique
et livresque, ne les conduit pas au même niveau, et le stage accompli
dans le pays d'accueil reste insuffisant : en une seule année, ils ne
peuvent combler leur retard.
En définitive, le gouvernement coréen s'efforce de
développer une coopération avec les pays avancés, mais ne
se donne pas les moyens d'un enseignement/apprentissage des langues
concernées à la hauteur de ses ambitions. On peut cependant, pour
le français, tenter de proposer des voies pour rendre plus efficace son
enseignement/apprentissage et sa diffusion en Corée. Il s'agit de
promouvoir un enseignement du français adapté au contexte local.