B-UN FORT RALENTISSEMENT DU RYTHME DE CROISSANCE DEPUIS DEUX ANS
1-Les déboires du secteur aéronautique
Les
difficultés de Boeing sont pour beaucoup dans la crise économique
qui affecte actuellement le Washington. Les causes en sont connues : le
choc subi par l'économie américaine à compter du second
semestre 2000 s'est aggravé à la suite du 11 septembre 2001, avec
des conséquences particulièrement rudes dans le domaine du
transport aérien. A ces événements conjoncturels, il faut
ajouter une concurrence croissante de l'Européen Airbus, aujourd'hui en
passe de dépasser son rival américain.
La production de Boeing est passée de 527 avions commerciaux en 2001
à 381 en 2002. En 2003, Boeing ne prévoit que 280 livraisons,
tandis qu'Airbus avance le chiffre de 300. Si ces chiffres sont
confirmés, l'Européen dépasserait alors pour la
première fois l'Américain en nombre d'appareils livrés. En
2001-2002, Boeing a licencié environ 20 000 personnes dans la
région du Puget Sound, en raison de la diminution des commandes. Au
cours des quatre dernières années, ce sont au total 40 000
emplois qui ont été supprimés par Boeing. D'après
le Conseil de la Prévision économique de l'Etat de Washington,
Boeing, ses fournisseurs et ses clients ne pourront pas revenir à la
croissance avant 2004. Cette évolution dépendra pour beaucoup de
la réussite du nouvel avion commercial qui devrait être
lancé prochainement par Boeing. La crise a en effet conduit à un
changement de stratégie, dont témoigne l'abandon du projet
d'avion à grande vitesse Sonic Cruiser. Le nouvel avion envisagé
devrait favoriser des technologies susceptibles de réduire les
coûts du transport aérien.
De façon générale, au cours des dernières
années, l'image de Boeing comme entreprise symbole de la région a
été sérieusement écornée par la
décision de déplacer le siège social hors du Washington.
Fondée en 1916 près de Seattle, la compagnie était
considérée comme un élément du patrimoine
historique et identitaire de la région. En mars 2001, la direction de
l'entreprise a annoncé ce déménagement, explicitement
motivé par la volonté de favoriser la création de valeur
pour les actionnaires, en choisissant une ville moins excentrée et
économiquement plus porteuse
(« business-friendly »)
16(
*
)
. L'objectif de Phil Condit,
Président de Boeing, était aussi de séparer le pôle
stratégique de l'entreprise des lieux de production, afin de permettre
des décisions plus objectives, en échappant notamment à la
pression des syndicats. En outre, Boeing souhaitait consacrer ainsi la
diversification de ses activités et son statut de géant de
l'aéronautique, au-delà de sa seule activité de
constructeur d'avions commerciaux. C'est la ville de Chicago qui fut finalement
choisie pour héberger le nouveau siège social de l'entreprise. La
décision, qui pourtant ne concernait que 500 salariés (sur les 78
000 alors employés dans le Washington) et ne remettait pas en cause
l'implantation industrielle de Boeing près de Seattle, a
néanmoins été vécue, par les salariés et par
tous les dirigeants et habitants de l'Etat, comme une trahison.
2-Une crise généralisée
En 2000,
le produit intérieur brut de l'Etat de Washington était de 220
milliards de dollars
17(
*
)
,
plaçant le Washington à la 14
ème
place
nationale (l'Etat produit 2.2% de la richesse du pays). La
36
ème
conférence économique régionale du
Pacifique nord-ouest (qui s'est réunie en mai 2002) a souligné
que le Washington était l'Etat de la région le plus touché
par la récession qui a affecté les Etats-Unis en 2001. En
août 2002, le taux de chômage du Washington (corrigé des
variations saisonnières) était de 7.2%, soit le plus
élevé de tous les Etats-Unis. L'Etat avait perdu 50 100 emplois
entre août 2001 et août 2002.
De façon générale, l'économie du nord-ouest
américain est considérée comme plus cyclique que le reste
de l'économie américaine. En effet, cette région est
fortement dépendante de la conjoncture extérieure, puisque
largement tournée vers l'Asie. 33% des emplois du Washington sont
liés aux échanges internationaux. En outre, le ralentissement
économique de 2001 a particulièrement affecté les deux
secteurs emblématiques du Washington : l'aéronautique d'une
part, et les nouvelles technologies d'autre part. Des événements
comme le déplacement du siège de Boeing à Chicago et les
déboires de Microsoft devant la justice américaine
témoignent des difficultés économiques de l'Etat.
Toutefois, comme en Californie et comme aux Etats-Unis en
général, la crise a peu affecté les dépenses de
consommation, les achats de voiture et les achats immobiliers, ce qui en a
limité l'ampleur. La politique économique menée au niveau
national a joué un rôle déterminant dans le soutien de la
consommation privée au cours des années 2001 et 2002.